Syrie : le temple antique d'Aïn Dara détruit par des frappes aériennes

Le temple Aïn Dara, situé dans l’enclave d’Afrine, a été réduit en ruines après les frappes d'un raid aérien mené par les forces turques vendredi.

De Juliette Heuzebroc
Publication 31 janv. 2018, 09:19 CET
Le temple Aïn Dara, que l'on voit ici en 2010, est composé de pierres très rares ...
Le temple Aïn Dara, que l'on voit ici en 2010, est composé de pierres très rares datant de l'Âge de Fer.
PHOTOGRAPHIE DE Michael Danti

3 000 ans de civilisation, 3 000 ans d’histoire. C’est ce que représentait le temple d’Aïn Dara pour les Syriens et les historiens. Ces 3 000 ans se sont effondrés suite à une frappe aérienne de l’armée turque, qui cherche à reprendre le contrôle sur la région d’Afrine tenue par les Kurdes.

D’après Rami Abdel Rahmane, le directeur de l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), « l'ampleur des destructions est de 60 % ». Condamnant « les attaques turques contre les sites archéologiques d'Afrine », la direction générale des antiquités et musées a confirmé dans un communiqué « la destruction du temple d'Aïn Dara, l'un des édifices archéologiques les plus importants construits par les Araméens en Syrie ».

Ce site de culte de plus de 50 hectares a été construit au 10e siècle avant Jésus-Christ par les Araméens, qui occupèrent le sud de l’Anatolie entre 1 300 et 700 avant Jésus-Christ. Situé à une soixantaine de kilomètres d’Alep, le temple était pensé sur le modèle de l’Acropole et était consacré au culte de Ishtar, Astarté et Baal Hadad, divinités de la culture assyro-babylonienne.

Le temple Aïn Dara gardé par des lions en basalte.
Le temple Aïn Dara gardé par des lions en basalte.
PHOTOGRAPHIE DE Michael Danti

Aïn Dara, également dit Ayn Dara, était l’un des plus anciens sites néo-hittites, témoignage de la présence araméenne qui a suivi la chute de l’empire hittite en 1180 avant notre ère, après des siècles de règne sur l’Anatolie. Il était caractérisé par ses grands lions en basalte ainsi que ses fresques sculptées dans la pierre.

Les experts assimilent l’ampleur de cette catastrophe à celle de la destruction du mythique site de Palmyre par l’Etat Islamique en 2015. « La destruction du temple de Aïn Dara, c'est le même niveau d'atrocité que le temple de Bêl », déplore Maamoun Abdelkarim, ancien directeur général des Antiquités et Musées de Syrie. Le temple de Bêl avait alors été détruit par explosifs.

La frappe aérienne qui a ravagé le site fait suite à une offensive lancée depuis un peu plus d’une semaine par les Turcs pour déloger les kurdes de la région. En si peu de temps, les affrontements ont déjà fait 51 morts. Les experts sont également inquiets concernant la région dite des villages antiques du nord de la Syrie qui se situe à proximité du temple d'Aïn Dara où se déroulent les heurts. Ces villages, inscrits au patrimoine mondial en péril de l’Unesco depuis 2013, ont été construits entre le 1er et le 7e siècle et témoignent des premières occurrences du christianisme dans la région.

 

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