Découverte d’une espèce de grenouille de pluie noire et jaune

Selon les scientifiques, cet amphibien rare vit dans les régions oubliées d’Équateur.

De Jennifer S. Holland
Publication 9 nov. 2017, 01:58 CET
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La nouvelle espèce a longtemps été confondue avec son proche parent, le Pristimantis ornatissimus, bien que leurs marques diffèrent.
PHOTOGRAPHIE DE Jaime Culebras

Une nouvelle espèce de grenouille de pluie découverte en Équateur est probablement déjà menacée d'extinction.

Les scientifiques ont longtemps confondu l'amphibien avec son proche parent, la Pristimantis ornatissimus, une espèce bien connue aux marques jaunes et noires distinctives.

Juan Manuel Guayasamin, biologiste évolutionniste à l'Université San Francisco de Quito, et ses collègues n'étaient pas à la recherche d'une nouvelle espèce ; ils pensaient examiner de plus près l'espèce connue. 

Mais l'équipe a remarqué, d'abord dans les photos puis plus tard en faisant des comparaisons avec les spécimens du laboratoire, une variation surprenante dans les marques entre les animaux de la région côtière du nord du Chocó et ceux originaires de la cordillère des Andes. 

« Nous nous sommes rendus compte que les grenouilles du Nord avaient des lignes longitudinales tandis que celles originaires du Sud avaient des motifs plus réticulés, » explique Guayasamin. La couleur de leurs yeux diffère également. « Nous avons donc décidé de d'étudier du côté de la génétique.» 

Les gènes ont donné raison aux scientifiques ; ces deux beautés colorées étaient bien de deux espèces distinctes. La découverte de la nouvelle espèce, la Pristimantis ecuadorensis, a été annoncée récemment dans la revue PLOS ONE.

Mais pour les scientifiques, il est difficile de se réjouir de cette découverte. Avec sa rareté et son minuscule habitat menacé, la grenouille répond aux critères d'inscription à la liste des espèces en voie de disparition établie par l'Union internationale pour la conservation de la nature, explique Guayasmin.

 

Une grenouille particulière

Les nouvelles espèces peuvent évoluer lorsque des obstacles géographiques tels que les montagnes ou les rivières séparent les animaux pendant une période prolongée.

Dans ce cas précis, un groupe de grenouilles se serait vraisemblablement détaché du reste de la population, et ce depuis un certain temps, à cause d'une séparation physique—peut-être par une grande rivière—pour finalement s'adapter à son nouvel environnement, devenant génétiquement distinct.

Il s'agit d'un environnement en pente ascendante : la nouvelle grenouille de pluie, cette espèce rare des forêts humides d'Équateur à la répartition limitée, vit au moins 350 mètres plus haut que son parent. 

« Dans les manuels scolaires, il est écrit qu'une grenouille classique pond ses œufs dans un point d'eau, mais ces forêts sont très pentues, et il y a peu de lacs ou d'étangs, » explique Guayasamin.

On peut donc parler d'adaptation ou plus précisément de développement direct : « Les femelles pondent leurs œufs dans un lieu humide comme dans une broméliacée ou sur un lit de feuilles mortes, et les embryons éclosent pour donner naissance à de jeunes grenouilles » sans qu'elles n'aient eu à passer par le stade têtard. 

« Elles ont donc pu coloniser ce territoire et se développer dans des zones vierges de diversité amphibienne. 

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La nouvelle grenouille de pluie vit dans une petite région d'Équateur, pourvue de forêts humides.
PHOTOGRAPHIE DE Jaime Culebras

Des forêts qui disparaissent

Néanmoins, ces zones sont à peine sauvages. « En Équateur, la plupart des forêts côtières ont été exploitées et transformées en prairies et en terres agricoles, » dit Guayasamin.

« Il est toujours très intéressant de faire de nouvelles découvertes, surtout lorsqu'il s'agit d'une aussi belle espèce, » ajoute-t-il. « Mais tous les spécimens nous trouvons ici, sur la côte en particulier, sont déjà menacés. »

Le statut immédiat « d'espèce en danger » de la  P. ecuadorensis « est décourageant à coup sûr, » a déclaré dans un e-mail Kelly Zamudio, biologiste évolutionniste à l'Université Cornell qui n'a pas participé à l'étude. 

Qu'il s'agisse d'une petite population et qu'elle ne soit adaptée qu'à des conditions locales aussi particulières « est un double coup dur, » note-t-elle.

« Le point positif, c'est que nous savons qu'elle existe ici et pouvons donc changer la donne. »

Guayasamin, chef de l'étude, espère qu'une attention particulière sera accordée à la conservation de la côte nord de l'Équateur, une région qui malgré sa riche biodiversité possède bien moins de zones protégées que d'autres régions tropicales du pays.

« Tout le monde suppose que les espèces de la forêt tropicale amazonienne sont celles qui sont le plus en danger, » dit-il. « Il est temps de parler de Chocó et des contreforts occidentaux des Andes, deux régions devraient être considérées comme prioritaires. »

 

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