Au Kenya, rencontre avec un zèbre noir à pois blancs

Cet animal à l'allure originale aperçu dans la réserve nationale du Masai Mara au Kenya aurait vraisemblablement développé une mutation génétique appelée pseudo-mélanisme.

De Katie Stacey
Publication 20 sept. 2019, 10:26 CEST
Tira, c'est le nom donné à ce jeune zèbre, pourrait être plus vulnérable aux piqûres de ...
Tira, c'est le nom donné à ce jeune zèbre, pourrait être plus vulnérable aux piqûres de taons en raison de l'absence des traditionnelles zébrures.
PHOTOGRAPHIE DE Frank Liu

Ce ne sont pas les rayures qui font le zèbre, la preuve en est avec ce spécimen à la robe noire mouchetée de blanc aperçu au Kenya, dans la réserve nationale du Masai Mara.

Le photographe Frank Liu était à la recherche de rhinocéros lorsque ses yeux se sont posés sur cet excentrique zèbre des plaines, a priori âgé d'une semaine. « Au premier regard, il semblait être d'une toute autre espèce, » raconte Liu. Antony Tira, le guide massaï qui a aperçu le zèbre en premier, lui a donné son nom, Tira.

Les rayures des zèbres sont aussi uniques que nos empreintes digitales mais selon Liu, l'étrange coloration de Tira pourrait bien faire de ce jeune zèbre le premier du genre à être observé dans la réserve du Masai Mara. Des poulains semblables ont déjà été observés au Botswana, à proximité du Delta de l'Okavango.

Tira et ces autres poulains sont atteints d'une pathologie appelée pseudo-mélanisme, une mutation génétique rare qui génère chez ces animaux une sorte d'anomalie dans leurs rayures, explique Ren Larison, biologiste spécialiste de l'évolution des rayures de zèbre au sein de l'université de Californie à Los Angeles.

Les zèbres peuvent également présenter d'autres variations de couleur, comme un albinisme partiel qui a déjà été observé chez un zèbre « doré » extrêmement rare photographié plus tôt cette année en Tanzanie, dans le parc national du Serengeti.

Il est utile pour la science de garder une trace de ces aberrations équines dans l'objectif plus étendu de surveiller les changements qui interviennent au sein d'une espèce et la façon dont ils sont gérés par les communautés locales.

 

DÉFILÉ RAYÉ

Des cellules spécialisées appelées mélanocytes produisent de la mélanine, le pigment rouge, jaune, brun ou noir qui détermine les couleurs des cheveux et de la peau chez les mammifères.

« Il existe toute une gamme de mutations capables d'altérer le processus de synthèse de la mélanine et pour tous ces troubles, on pense que les mélanocytes sont normalement distribués mais que la mélanine qu'ils produisent est anormale, » indique par e-mail Greg Barsh, généticien au HudsonAlpha Institute for Biotechnology.

Chez les zèbres, les mélanocytes sont uniformément distribués à travers leur peau de telle sorte qu'un zèbre rasé serait totalement noir. Dans le cas de Tira et des autres zèbres atteints de pseudo-mélanisme, Barsh pense que les mélanocytes sont bien là mais que la mélanine elle-même ne se manifeste pas correctement en rayures pour une raison inconnue.

Sur cette photographie récente, Tira se promène au cœur de la réserve nationale du Masai Mara, ...
Sur cette photographie récente, Tira se promène au cœur de la réserve nationale du Masai Mara, au Kenya, en compagnie de sa mère.
PHOTOGRAPHIE DE Frank Liu

L'avenir de Tira reste cependant incertain, la plupart des zèbres arborant ce type de coloration ne survivent probablement pas très longtemps, observe Larison. « Des études réalisées sur d'autres espèces ont montré que même s'il était plus difficile pour un prédateur de cibler un individu au sein d'un groupe, la même opération était plus facile lorsque cet individu était différent », explique-t-elle. (À voir : Une girafe blanche et d'autres animaux inhabituellement pâles.)

« J'ai vu plusieurs photos de poulains présentant ce même motif au fil du temps, mais une seule sur laquelle l'individu était juvénile ou adulte, et elle datait des années 1950. »

 

UN OBSTACLE À LA SURVIE

Malheureusement pour Tira, de récentes recherches conduites par Larison et d'autres scientifiques suggèrent que les zèbres auraient développé des rayures en évoluant afin d'éviter les piqûres de taons. Avec le camouflage et la thermorégulation, c'est l'une des cinq théories établies quant à l'origine de ces rayures. Des expériences réalisées sur le terrain ont montré que les taons n'aimaient pas se poser sur des surfaces rayées.

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    Si cette étude dit vrai, à l'inverse de ses congénères normalement rayés, Tira ne réussira pas à échapper aux piqûres de taons, des insectes porteurs de maladies comme la grippe équine, indique Tim Caro, biologiste au sein de l'université de Californie à Davis. (À lire : Un léopard noir a été vu au Kenya pour la première fois en 100 ans.)

    Toutefois, si Tira parvient à franchir ces nombreux obstacles et à atteindre l'âge adulte, il n'y aucune raison de penser qu'il ne s'intégrera pas au troupeau.

    Des recherches menées en Afrique du Sud ont montré que pour deux cas au moins de zèbres des plaines aux colorations singulières, ces animaux établissaient des relations normales avec les autres zèbres, y compris en ce qui concerne la reproduction.

     

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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