Le sphinx tête-de-mort, objet de tous les fantasmes macabres
De nombreux papillons possèdent des ocelles et d'autres motifs pour effrayer les prédateurs. Mais attribuer une valeur défensive à la tête de mort est une interprétation anthropique car ce symbole n'est évocateur que pour les Hommes.
Le sphinx tête-de-mort (Acherontia atropos) n'est pas un papillon comme les autres. Son corps aérodynamique, associé à une musculature vigoureuse qui commande des ailes de grande envergure, en fait l'un des plus rapides et lui permet de parcourir des milliers de kilomètres, soit bien plus que la plupart des lépidoptères.
Son alimentation n'est pas ordinaire non plus. Très friand de miel, le sphinx tête-de-mort n'hésite pas à pénétrer dans les ruches pour ingérer des quantités de miel parfois supérieures à son propre poids. Car sa trompe, courte et robuste (contrairement à celles de ses congénères), lui permet d'aspirer avec force le miel, un produit bien plus visqueux que le nectar.
En outre, une membrane interne de la trompe fonctionne comme une valve pour faciliter la déglutition.
Plus insolite encore : l'Acherontia atropos est capables d'émettre un cri, une rareté dans le monde des insectes. Le son est double : d'abord, l'air aspiré fait vibrer une membrane située dans la trompe, puis ladite membrane s'ouvre pour expulser l'air. Un peu comme les mouvements de compression et d'expansion d'un accordéon, en plus rapide : le cycle dure 0,2 seconde.
Mais à quoi sert ce cri ? Sans doute à empêcher l'attaque des abeilles, le son émis ressemblant au bourdonnement de la reine. Nombre d'entomologistes pensent que la production de ce son est due au système d'ingestion.
Comme cela s'est produit maintes fois dans l'évolution, une structure sélectionnée pour résoudre un problème acquiert une autre fonction. Ici, la musculature céphalique créée pour engloutir le miel constitue une parfaite pompe à air.