Les punaises d'eau géantes se nourrissent de tortues, de canetons et même de serpents

L'existence de ce prédateur aquatique opportuniste a été révélée par des décennies de recherche.

De Joshua Rapp Learn
Publication 21 nov. 2024, 11:31 CET
01-giant-water-bug

Une punaise d'eau géante (Lethocerus deyrollei) attaque un poisson à Saitama, au Japon.

PHOTOGRAPHIE DE Yasuda Mamoru, Minden Pictures

Les punaises d'eau géantes sont des prédateurs voraces qui s'attaquent à tout, des canetons aux serpents venimeux en passant par les tortues, selon une étude qui rassemble des décennies de recherche sur ces insectes aquatiques.

Ce sont des « prédateurs qui se couchent et attendent [leurs proies] », explique Charles Swart, maître de conférences au Trinity College, dans le Connecticut, qui a étudié les punaises d'eau géantes.

« Ils s'accrochent à une plante dans l'eau, et attrapent et essaient de manger tout ce qui bouge devant eux. »

La recherche, publiée en mars 2019 dans la revue Entomological Science, examine de plus près l'écologie des punaises d'eau géantes, que l'on trouve presque partout dans le monde et qui comptent environ 150 espèces connues. Les plus grandes, Lethocerus grandis et Lethocerus maximus, vivent en Amérique du Sud et peuvent atteindre une longueur supérieure à 10 cm.

L'auteur de l'étude, Shin-ya Ohba, professeur associé d'entomologie à l'université japonaise de Nagasaki, est fasciné par ces insectes depuis qu'il en a vu un pour la première fois dans une animalerie à l'âge de sept ans.

« Les entomologistes japonais aiment les punaises d'eau géantes parce qu'elles ont une morphologie intéressante », explique-t-il.

 

UN PRÉDATEUR OPPORTUNISTE

Pour les besoins de son étude, Shin-ya Ohba a consulté la littérature existante sur les punaises d'eau, dont il a étudié un grand nombre d'individus au Japon, où les quatre espèces indigènes - y compris Kirkaldyia deyrolli, qui a fait l'objet de nombreuses études - sont des prédateurs de premier plan dans les rizières et les zones humides.

Un thème récurrent s'est dégagé : ces insectes semblent intrépides dans leur prédation. Par exemple, en 2011, Ohba a rapporté la première observation d'une punaise d'eau géante s'attaquant à une tortue.

02-giant-water-bug

Une punaise d'eau géante (Kirkaldyia deyrolli) s'attaque à une tortue - une observation rare.

PHOTOGRAPHIE DE Shin-ya Ohba

Malgré leur taille, ces insectes brunâtres se fondent parmi les plantes sur lesquelles ils se perchent, se balançant la tête en bas pour pouvoir respirer grâce à un « tuba » qui dépasse de leur derrière.

Lorsqu'une proie arrive à leur portée, ces prédateurs serrent rapidement leurs pattes avant et saisissent la créature avec leurs autres pattes. Les punaises transpercent ensuite leur proie avec une trompe en forme de poignard, injectant des enzymes et peut-être des produits chimiques anesthésiants.

Charles Swart, qui n'a pas participé à l'étude en question, note qu'on ne sait pas exactement ce qui compose les toxines des punaises d'eau géantes, ni si elles sont vraiment venimeuses.

« Elles décomposent les tissus et les aspirent à nouveau », explique-t-il, ajoutant que pour les proies les plus grosses, cette opération peut durer quelques heures, pendant lesquelles leur victime peut rester en vie, du moins en partie.

Swart ajoute que ces nouvelles recherches constituent un « examen très complet de tout ce que l'on sait sur ces animaux ».

 

DES MÈRES INFANTICIDES

Les punaises d'eau géantes détonnent parmi les insectes en ce sens que les mâles assument la majeure partie de la responsabilité des soins apportés aux œufs.

Chez certaines espèces, les mâles gardent les coquilles d'œufs - jusqu'à cinq à la fois - en les protégeant des prédateurs tels que les fourmis. Chez d'autres, les femelles collent leurs œufs directement sur le dos des mâles, qui les transportent jusqu'à ce qu'ils éclosent en nymphes.

L'étude d'Ohba note également que chez certaines espèces, comme K. deyrolli, les femelles sont tellement désireuses de trouver un partenaire qu'elles mangent les œufs d'autres femelles.

« En détruisant les œufs de sa concurrente, une femelle peut s'assurer que le mâle prendra soin de ses œufs à elle » explique Ohba. 

les plus populaires

    voir plus

    De plus, les larves de punaises d'eau, dont le stade de vie dure jusqu'à soixante jours, doivent être aussi résistantes que les adultes. Chez la plupart des espèces, elles éclosent à une saison où les petites proies sont moins abondantes, ce qui les oblige à s'attaquer à des proies de prime abord impossibles à attraper, comme les têtards ou les petits poissons.

    Les larves sont armées de pattes avant très recourbées, ce qui leur permet d'agripper plus facilement leurs proies.

    En ce qui concerne la chaîne alimentaire, Swart ajoute que les punaises d'eau géantes sont souvent la proie de poissons plus gros, de canards, voire de ratons laveurs ou de tortues. Certaines personnes les mangent également frites ou bouillies en Asie du Sud-Est.

     

    DES PRÉDATEURS NÉCESSAIRES

    Aussi effrayantes que puissent paraître les punaises d'eau géantes, leur statut de prédateurs de premier ordre les rend essentielles au maintien d'un écosystème sain.

    La pollution de l'eau peut nuire à leurs populations, et les espèces exotiques telles que les écrevisses et les grenouilles-taureaux peuvent s'attaquer aux punaises d'eau. 

    Il apparaît nécessaire de garantir une eau douce propre et exempte d'invasions pour ces espèces cruciales, explique M. Ohba.

    « Nous pouvons préserver des écosystèmes entiers grâce à la conservation des punaises d'eau géantes. »

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.fr en langue anglaise.

    les plus populaires

      voir plus
      loading

      Découvrez National Geographic

      • Animaux
      • Environnement
      • Histoire
      • Sciences
      • Voyage® & Adventure
      • Photographie
      • Espace

      À propos de National Geographic

      S'Abonner

      • Magazines
      • Livres
      • Disney+

      Nous suivre

      Copyright © 1996-2015 National Geographic Society. Copyright © 2015-2024 National Geographic Partners, LLC. Tous droits réservés.