Le hamster d'Europe est désormais en danger critique d'extinction

Alors que les scientifiques estiment que ce petit rongeur pourrait disparaître d'ici 30 ans, les efforts de réintroduction en Europe et en France se multiplient.

De Christine Dell'Amore
Le hamster d'Europe, ou hamster commun, était jusqu'à il y a peu le plus présent en ...

Le hamster d'Europe, ou hamster commun, était jusqu'à il y a peu le plus présent en Europe et en Asie occidentale.

PHOTOGRAPHIE DE Joël Sartore, National Geographic Photo Ark

Avec leurs joues rondes, surplombant de petites pattes et un corps lui aussi rondelet pas plus grand que la paume de votre main, les hamsters domestiques sont des animaux de compagnie populaires. Les 26 espèces de hamsters sauvages qui se promènent dans certaines parties de l'Europe, de l'Asie et du Moyen-Orient, tout aussi mignonnes, ne sont elles pas nécessairement câlines.

L'agressif hamster d'Europe, par exemple, sautera et mordra toute personne qui essaiera de le toucher, explique Mikhail Rusin, chercheur au zoo de Kiev en Ukraine. « Même ceux qui sont nés en captivité, lorsqu'ils grandissent, ne sont pas apprivoisés », dit-il.

Aussi féroce soit-il, ce rongeur de 45 grammes ne peut pas se défendre contre des menaces telles que le changement climatique, l'agriculture intensive et la pollution lumineuse. Ces facteurs ont probablement contribué au déclin de la population de hamsters sauvages, ce qui a récemment incité l'Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à classer l'espèce comme étant en danger critique d'extinction. 

Cette espèce qui peuplait les prairies d'Europe et d'Asie occidentale, a vu son aire de répartition des hamsters diminuer de manière considérable. L'aire de répartition de l'espèce est en baisse de 94 % en France - où l'espèce se limite désormais à l'Alsace - et de plus de 75 % en Europe de l'Est, notamment en Ukraine et en Russie. Si rien n'est fait, le hamster d'Europe disparaîtra d'ici trois décennies, selon l'UICN.

Le statut plus préoccupant de l'espèce encouragera probablement de nouveaux efforts de conservation, dit Rusin, auteur de la nouvelle liste de l'UICN. Lui et ses collègues font déjà leur part : cette semaine, ils ont réintroduit 11 hamsters élevés en captivité dans la nature dans le parc national de Khotyn, en Ukraine, une première dans le pays.

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    Les hamsters européens sont une espèce clé de leur écosystème, servant de proies pour une multitude de prédateurs allant du renard roux aux grands oiseaux comme le hibou grand-duc.

    « Si nous perdons cette espèce, l'écosystème pourrait s'effondrer », explique Rusin - et cela pourrait en conséquence nuire aux Hommes qui dépendent de l'environnement pour satisfaire leurs besoins en eau et nourriture. « Certaines personnes pensent qu'elles sont déconnectées de la nature, mais on ne l'est jamais. »

    L'extinction de l'espèce rendrait le monde plus terne, ajoute Rusin. Son ventre noir, ses taches blanches et son dos châtain font de ce hamster « peut-être l'un des plus beaux rongeurs d'Europe ».

     

    UNE MULTITUDE DE MENACES

    Les hamsters d'Europe ont évolué pour vivre à toute vitesse : ils viennent au monde après des gestations de 18 jours et leur durée de vie est courte, environ deux ans. Mais au cours du siècle dernier, les taux de reproduction et la durée de vie du hamster ont considérablement diminué. Pendant la majeure partie du 20e siècle, les femelles donnaient naissance à environ 20 juvéniles par an ; aujourd'hui elles mettent bas en moyenne cinq à six fois par an et la durée de vie moyenne d'un hamster qui est maintenant d'environ deux ans était auparavant trois fois supérieure.

    La cause de ce déclin est probablement une combinaison de facteurs, comme l'expansion de la monoculture - la pratique de planter exclusivement une culture, généralement du blé ou du maïs - dans toute l'Europe.

    En tant qu'habitants des prairies, les hamsters vivent principalement sur les terres agricoles et se nourrissent des cultures. Mais le maïs ou le blé sont à eux seuls un régime pauvre d'un point de vue nutritionnel, ce qui peut causer des problèmes de santé, tels que des carences en protéines et en vitamine b3. Un manque de b3, par exemple, peut conduire à un comportement anormal chez les femelles hamsters d'Europe et notamment les pousser à l'infanticide, explique Caroline Habold, éco-physiologiste au CNRS-Université de Strasbourg. Et un manque de protéines dans le lait des mères se nourrissant de blé peut ralentir le développement de leurs petits. De plus, lorsque les agriculteurs récoltent le fruit de leur labeur, les hamsters sont soudainement privés de nourriture et donc plus vulnérables aux prédateurs.

    Un hamster d'Europe élevé en captivité reste dans un enclos protégé avant d'être réintroduit dans la nature, en France.

    PHOTOGRAPHIE DE Mathilde Tissier IPHC – LIFE Alister

    Des hivers plus chauds et plus humides en raison du changement climatique sont également préjudiciables à l'espèce. En hiver, ces animaux hibernants creusent des trous de plus de deux mètres de profondeur, où ils se blottissent au chaud, isolés par une couche de neige. Sans cette couche de neige, ils sont plus exposés aux éléments, tels que le froid et la pluie, qui peuvent tous deux les tuer.

    Une étude co-écrite par Habold en Alsace suggère que la combinaison de la culture du maïs et d'une augmentation des précipitations hivernales peut avoir fait baisser la masse corporelle des hamsters jusqu'à 21 % depuis 1937, ce qui pourrait avoir des effets néfastes sur leur fertilité.

    Un autre facteur possible du déclin de l'espèce est la pollution lumineuse, qui peut perturber les rythmes circadiens des animaux. De plus en plus, les sources de lumière artificielle peuvent brouiller ces signaux, explique Stefanie Monecke, psychologue médicale à l'Université Ludwig Maximilians de Munich. 

    Monecke souligne que les impacts de la pollution lumineuse et du changement climatique sur les hamsters européens « ne sont que des hypothèses, mais tout va dans ce sens. »

     

    RETOUR À LA NATURE

    Heureusement, les hamsters d'Europe se reproduisent bien en captivité : il existe des programmes en Belgique, en France, en Pologne, en Allemagne et en Ukraine, entre autres.

    La partie la plus difficile, selon Rusin, est de réintroduire des hamsters qui ne sont pas adaptés à la vie sauvage et sont facilement capturés par les prédateurs. Ériger des clôtures ou des filets autour de leur nouvel habitat pendant quelques mois peut les protéger pendant leur acclimatation, dit-il.

    Certains scientifiques, comme Habold en Alsace, travaillent avec des agriculteurs pour créer des terres cultivées plus favorables aux hamsters. Par exemple, dans les parcelles plus petites, la culture principale peut être mélangée avec une autre culture, comme le soja riche en protéines, plus sain pour les hamsters. Et les agriculteurs peuvent cultiver les marges de ces parcelles avec une variété de plantes comme le tournesol, la luzerne et le colza. Habold encourage également les agriculteurs à réduire leur fréquence de labour et leur utilisation de pesticides.

    Habold diffuse le message que la diversité des cultures est globalement bénéfique pour la bonne santé de l'exploitation et de l'écosystème environnant, car de nombreux types de plantes peuvent soutenir plus de types de communautés fauniques, comme les pollinisateurs.

     

    PARALLÈLE AVEC DES ESPÈCES ÉTEINTES

    En France, les initiatives de conservation n'ont fait que stabiliser le nombre de spécimens, qui n'a pour autant pas augmenté. C'est pourquoi la décision de l'UICN est si importante, selon Habold.

    L'inscription du hamster pourrait également stimuler le financement de la recherche sur les échecs de reproduction de l'espèce, qui sont particulièrement inquiétants, explique Monecke.

    « Pensez au pigeon voyageur - c'était l'oiseau le plus abondant de tous les temps, et il s'est éteint en cent ans », note-t-elle. « Le problème était qu'ils n'étaient plus en mesure de se reproduire, ce qui est assez similaire au hamster. Il y a tellement de parallèles. »

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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