Les calaos victimes des chasseurs en Afrique centrale

L’une des plus grandes familles d’oiseaux des forêts tropicales pourrait disparaître d’Afrique centrale. En cause, sa traque intensive par les chasseurs et la perte de son habitat. Le point avec deux études récentes.

De Julie Lacaze
Deux calaos à casque noir, au jardin zoologique tropical de La Londe-les-Maures, dans le Var (France).
Deux calaos à casque noir, au jardin zoologique tropical de La Londe-les-Maures, dans le Var (France).
PHOTOGRAPHIE DE Wikimédia Commons

Les calaos sont aujourd’hui menacés dans toutes les régions du globe où ils sont présents. Il en existe 57 espèces, réparties sur les continents asiatique et africain. La spécificité de ces oiseaux : une grande taille (30 à 120 cm), une longue queue et, chez certaines espèces, un casque de kératine sur la tête. En Asie, les calaos à casque rond sont victimes d’un intense trafic vers la Chine (lire notre article). En Afrique centrale, ils sont visés en tant que viande de brousse par les chasseurs. Deux études récentes publiées dans la revue Conservation letters, en février et juillet 2018, dénoncent cette dernière pratique, qui s’intensifie sur ce continent.

 VIANDE DE BROUSSE  AU CAMEROUN

 Selon une équipe du zoo de San Diego Global, en Californie (États-Unis), auteur de la première étude, les calaos et certains rapaces sont de plus en plus souvent abattus illégalement pour fournir des protéines aux populations locales africaines durant les périodes de chômage (souvent la saison sèche). Leur grande taille en fait des proies faciles.

Le constat a été établi sur 19 villages bordant la forêt protégée d’Ebo, dans l’ouest du Cameroun. En tout, 789 personnes ont répondu à des questionnaires portant sur la consommation et la chasse de vautours (Gypohierax angolensis), de divers espèces d’aigles et de calaos à casque noir et à cuisses blanches (Ceratogymna atrata et Bycanistes albotibialis), ainsi que celles de trois mammifères (écureuil, rat et pangolin).

Résultat : les calaos sont particulièrement traqués. La consommation moyenne pour 240 hommes a été estimée à 29 calaos entre février et juin 2015, contre 8 rapaces ou encore 19 pangolins. Les personnes qui les consomment sont généralement de jeunes hommes, sans emploi et peu éduqués.

La pratique de la chasse semble en revanche augmenter avec le niveau d’instruction des personnes interrogées. Les chercheurs soulignent que ce paradoxe pourrait s’expliquer par une meilleure compréhension des questionnaires par les populations les plus éduquées, le recours à la chasse pour financer leurs études, ou par des facteurs culturels, comme le fait de surmonter plus facilement certains tabous.

 SIX ESPÈCES EN DÉCLIN DANS LES FORÊTS GHANÉENNES

Une équipe de biologistes de l’université du Ghana dresse un constat encore plus inquiétant, qui porte sur huit espèces de calaos. Celles-ci proviennent de 26 forêts du sud du pays, une aire considérée comme un point chaud de biodiversité. Entre 1990 et 2014, six de ces huit espèces ont décliné. Les grands calaos, notamment, ont totalement disparu de certaines réserves, comme celle de Bia, dans le sud-ouest du Ghana. Les auteurs estiment également que le taux de rencontre de l’animal a diminué de 32 à 88 % entre 1990 et 2009. Les espèces particulièrement meurtries : les grands calaos frugivores et les petits insectivores. Les chercheurs pensent que les premiers sont victimes de l’intensification de la chasse dans la région. Les seconds souffrent essentiellement de la réduction et de la fragmentation de l’habitat forestier.

Les deux équipes demandent l’instauration de mesures d’urgence pour sauver cette famille d’oiseaux en Afrique. Les calaos étant des animaux à reproduction lente, leurs populations mettront d’autant plus de temps à se remettre de ce déclin dramatique. Les auteurs de l’étude portant sur le Cameroun invitent notamment l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN) à déplacer les calaos à casque noir et à cuisses blanches de la catégorie “préoccupation mineure” vers celle “données insuffisantes” au sein de la liste rouge des espèces vulnérables.

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