Chansons douces : ce que les berceuses que nous chantons disent de nous

Dans les cultures du monde entier, les berceuses endorment les enfants. Elles révèlent aussi les espoirs, les craintes et les rêves d’avenir qui animent les parents.

De Hannah Reyes Morales, National Geographic
Photographies de Hannah Reyes Morales
Publication 7 déc. 2020, 16:49 CET
Altanzul Sukhchuluun et sa fille, Khulan, blotties l’une contre l’autre à l’heure du coucher à Oulan-Bator. ...

Altanzul Sukhchuluun et sa fille, Khulan, blotties l’une contre l’autre à l’heure du coucher à Oulan-Bator. Infirmière dans une clinique familiale de son district, Altanzul s’occupe des femmes etdes enfants vivant dans des quartiers où l’air est le plus pollué du pays.

PHOTOGRAPHIE DE Hanna Reyes Morales

La chanson s’élève au crépuscule. Entendez-la s’enrouler autour de la couverture, se glisser au creux de bras accueillants, dans des chambres du monde entier. À l’adresse d’un auditoire d’enfants, un chœur d’êtres aimants remplit la nuit de chants. Ils interprètent des berceuses.

Pour Khadija al-Mohammad, la nuit a toujours été le temps du silence, du réconfort et de l’apaisement des bruits de la journée. Dix-neuf ans plus tôt, dix ans avant la guerre civile syrienne, à la naissance de Mohammed, son fils aîné, elle chantait de douces berceuses. Des chansons transmises par sa mère et sa grand-mère célébrant les ancêtres et la terre natale.

Avec l’intensification des hostilités, sa famille quitta sa maison de Kafr Nubl en 2013 et se réfugia à contrecœur en Turquie, où le benjamin, Ahmad, est né il y a trois ans.

Enseignante et mère de cinq enfants, Khadija fait partie des 12 millions de personnes ayant fui la Syrie depuis 2011. Le conflit touchant le pays a probablement fait plus d’un demi-million de morts. Aujourd’hui citoyenne turque, Khadija, comme de nombreuses mères dans le monde, élève ses enfants dans un environnement hostile.

Les berceuses font écho à l’histoire de leurs interprètes. Celles de Khadija sont devenues des chansons sur la guerre. «Avec elles, mes enfants savaient ce que je ressentais», songe-t-elle. Dans ses cauchemars, des hélicoptères et l’armée syrienne la poursuivent, et elle se réveille inquiète pour ses enfants. Ils se blottissent alors contre elle. Sur un matelas posé à même le sol, elle allonge avec douceur Ahmad sur ses jambes, le berce et chante.

Dans sa maison d’Urfa, Khadija al-Mohammad met au lit son fils Ahmad, âgé de 3 ans. ...

Dans sa maison d’Urfa, Khadija al-Mohammad met au lit son fils Ahmad, âgé de 3 ans. Avec sa famille, elle a fui la Syrie en 2013. Elle se remémore l’évolution de ses berceuses, des douces chansons traditionnelles qu’elle chantait au début à ses aînés aux berceuses d’aujourd’hui sur la guerre et l’exil.

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«Ô avion, vole dans le ciel et ne frappe pas les enfants dans la rue. Sois tendre et gentil avec ces enfants.»

Les berceuses endorment les bébés depuis la nuit des temps. Nous en héritons, et nous les transmettons. Elles franchissent avec nous les frontières, et nous en créons de nouvelles en chemin. Elles portent la trace des générations passées, et témoigneront de notre passage après notre mort. Elles révèlent nos plus grandes peurs, mais aussi nos espoirs et nos prières. Ce sont probablement les premières chansons d’amour qu’entendent les enfants.

Comme beaucoup de berceuses dans le monde, la chanson de Khadija est une réponse aux tourments du jour. Et bien que les mélodies des berceuses soient rassurantes, leurs paroles sont, en revanche, souvent sombres. La berceuse islandaise Bíum, Bíum, Bambaló est hantée par l’apparition d’un visage derrière une fenêtre. La russe Bayou Bayouchki Bayou dissuade l’enfant de s’approcher du bord du lit, sinon, gare, un petit loup gris «l’emportera dans le bois, sous le petit saule».

Rock-a-Bye, Baby, l’une des berceuses les plus connues de langue anglaise, raconte, elle, l’histoire d’un berceau tombant de la cime d’un arbre, «avec le bébé et tout le reste».

Il en existe cependant une version moins connue, moderne et plus longue. La dernière strophe commence ainsi: «Rock a bye baby / Do not you fear / Never mind baby / Mother is near [Balance-toi bébé / N’aie pas peur / Ne t’en fais pas / Maman n’est pas loin] ». Les berceuses révèlent certes nos peurs mais, et c’est peut-être plus important encore, elles reflètent aussi notre besoin de réconfort. À l’image de la conclusion de cette berceuse: «Maintenant, dors profondément / Jusqu’à la lumière du matin.

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    PHOTOGRAPHIE DE Hanna Reyes Morales

    Au Japon, les Itsuki no Komoriuta («Berceuses d’Itsuki ») désignent les chansons de jeunes nourrices à domicile ayant travaillé dans des familles plus aisées du village d’Itsuki, avant la Seconde Guerre mondiale. Voici les paroles d’un de ces airs les plus populaires : «Personne ne versera de larmes quand je mourrai. Seules les cigales sur le plaqueminier pleureront.»

    Il y a quelques années, aux Philippines, j’ai chanté pour la première fois une berceuse à mon beau-fils, alors âgé de 4 ans. La lumière éteinte, il s’est mis à pleurer. J’ai vraiment eu l’impression de tout faire de travers. Prise de panique à l’idée de compromettre une relation pour moi précieuse, je l’ai pris dans mes bras et j’ai entonné You Are My Sunshine. Il s’est endormi. Mais de qui avais-je dissipé les craintes ?

    Les berceuses aident à apaiser à la fois l’enfant et la personne cherchant à le calmer. Professeure de psychologie du développement à l’université de Toronto, Laura Cirelli a posé son regard de scientifique sur les chansons maternelles. Elle a constaté que, lorsque les mères chantaient des berceuses, le niveau de stress diminuait pour le bébé, mais aussi pour les mamans. Dans ses plus récents travaux, elle a également observé que les chansons familières apaisaient bien plus les bébés que le fait d’entendre une voix ou des mélodies inconnues.

    Cirelli considère que chanter des berceuses est une «expérience multisensorielle» partagée par la mère et l’enfant. «Il ne s’agit pas seulement pour le bébé d’entendre de la musique, dit-elle. Il s’agit pour lui d’être tenu par sa mère, d’avoir son visage très près du sien, et de se sentir bercé avec douceur par elle, dans la chaleur de son étreinte.»

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    Sedil al-Mohammad se tient sur le toit de sa maison. Âgée de 12 ans, elle interroge souvent sa mère, Khadija, sur la vie en Syrie. Khadija dit qu’elle interprète des chansons syriennes pour que ses enfants se souviennent de leur pays.

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    Dans toutes les cultures, les berceuses « tendent à présenter un ensemble de caractéristiques qui les rendent apaisantes », confie Samuel Mehr, directeur du Music Lab de Harvard, qui étudie le fonctionnement de la musique et les raisons de son existence. Le projet de recherche du laboratoire, «Histoire naturelle de la chanson», est parvenu à la conclusion que les gens distinguent des motifs universels dans la musique, même quand elle émane d’autres cultures. Son équipe a demandé à 29 000 participants d’écouter 118 chansons et d’indiquer s’il s’agissait d’un chant de guérison, d’une musique de danse, d’une chanson d’amour ou d’une berceuse. Samuel Mehr note: «Statistiquement, les gens identifient plus aisément les berceuses.»

    Dans une autre étude, le laboratoire de Mehr a découvert que, même lorsqu’ils écoutaient des berceuses non chantées par la personne qui s’occupe d’eux, ou issues d’autres cultures, les enfants étaient quand même apaisés. « Il semble qu’il y ait une espèce de lien entre parentalité et musique qui est à la fois universel dans le monde entier, mais aussi vieux, ancestral en quelque sorte. Il s’agit de quelque chose que nous faisons depuis très longtemps.»

    La plus vieille berceuse à nous être parvenue a environ 4 000 ans et est originaire de Babylone. Inscrite sur une tablette d’argile, elle évoque un «petit bébé dans une sombre maison». Elle parle d’un «dieu domestique» qui, troublé par les cris d’un bébé, s’adresse à lui sur un ton menaçant. «Ils étaient plutôt brutaux dans leurs rapports avec les enfants », rapporte Richard Dumbrill, le directeur du Conseil international d’archéo musicologie du Proche-Orient (Iconea) de l’université de Londres. C’est lui qui a traduit le texte de la tablette écrit en akkadien. « Il est possible qu’en étant éduqués dans la peur, les bébés parvenaient à l’âge adulte avec des réflexes de défense.»

    La berceuse comme mise en garde – dors, sinon... – est commune à toutes les cultures. Des bêtes innombrables et effrayantes peuplent cette catégorie. Elles guettent les enfants qui résistent au sommeil, prêtes à les enlever et à les dévorer. L’horreur échappe à ceux qui sont trop jeunes pour comprendre. Les plus âgés en tirent, eux, en grande partie leur vision du monde.

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    À Mamba Point, un quartier de Monrovia, des enfants se rassemblent autour de Patience Brooks, qui tient sur ses genoux sa fille cadette, Marta. Les mères et les enfants du voisinage se relaient pour raconter des histoires et préparer le dîner de leurs familles.

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    « Je chante pour oublier le papa du bébé », confie Patience Brooks avec un sourire, après avoir mis au lit sa fille de 8 mois, Marta. L’heure du coucher chez Patience, à Monrovia, au Liberia, est un moment de grande animation. Le quartier de Mamba Point vibre de musique, du bruit des convives attablés pour dîner, des conversations... Ses chansons du soir mélangent à la fois le chant, le scat et le beatbox, connu localement sous le nom de lie-lies. Patience tapote le dos de Marta tout en sautillant et en la balançant dans ses bras, et sa fille s’endort au rythme de sa danse.   

    Dors, bébé, dors,

    Dors, bébé, dors. 

    Maman veut te voir dormir. 

    Et puis, quand tu dors, 

    Maman se sent si bien, 

    Maman se sent si bien. 

    Alors, dors, dors, 

    Dors, bébé, dors.

    Mère de deux enfants, Patience a donné naissance à sa première fille à 13 ans. Pour elle, le maternage représente un défi quotidien. Une situation courante au Liberia où environ trois adolescentes sur dix ont un bébé ou tombent enceintes entre 15 et 19 ans.

    Dans ce quartier, les rues sont des espaces de vie en commun. Les femmes surveillent à tour de rôle des dizaines d’enfants pendant qu’ils jouent et échangent. Celles qui ne sont pas de garde en profitent pour préparer le dîner et s’occuper de leur foyer après le travail.

    « Il était une fois...» Patience commence, et les enfants écoutent. Ils inventent l’un après l’autre des contes et chantent ensemble. Au crépuscule, l’air résonne de refrains parlant de créatures magiques et d’aventures dans les bois.

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    Dans la province de Bataan, Amy Villaruel met sa fille Jazzy au lit. La vie des Villaruel dépend de la pêche. L’heure du coucher y est dictée par les marées. Le mari et les fils d’Amy pêchent souvent la nuit.

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    Les recherches de Laura Cirelli ont montré que les enfants qui partagent des expériences musicales en simultané avec d’autres personnes sont plus susceptibles de leur offrir leur soutien. Elle s’en explique: «Si vous chantez les mêmes chansons que les membres de votre communauté, c’est déjà un signe de votre appartenance et de votre parenté avec le groupe.»

    Il existe autant d’heures de coucher et de berceuses que de régions du monde. Pour Zaijan Villaruel, 10 ans, un Philippin, le sommeil est dicté par les marées et les besoins de sa famille. La nuit, il pêche avec son père et ses frères aînés, et s’endort au bruit des vagues et du moteur du bateau à balancier sur le chemin du retour.

    La subsistance des communautés de pêcheurs comme celle de Zaijan et de son père, Umbing Villaruel, dépend de la mer. Elles subissent les pires effets du changement climatique. Umbing ne veut pas que ses fils deviennent pêcheurs; les prises ont considérablement diminué en dix ans à cause de la surpêche. Mais du fait du confinement pendant la pandémie, Zaijan a appris à pêcher pour aider sa famille.

    En journée, dans sa maison de la province de Bataan, Zaijan chante à sa petite sœur de 2 ans, Jazzy, des airs qu’il a appris grâce à leur machine à karaoké. Il la berce doucement d’avant en arrière, et elle s’endort. Aux Philippines, d’où je viens, nous prononçons les mots tahan na entre deux berceuses, le plus souvent pour calmer une personne en pleurs. Ils se traduisent par «arrête de pleurer ». Mais dire « tahan na », c’est aussi dire « se sentir en sécurité», « se sentir en paix». Tahanan  signifie « maison » en philippin. C’est « l’endroit où les larmes s’apaisent ».

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    Des enfants font la sieste dans une garderie à Oulan-Bator. La pièce est équipée de purificateurs d’air, des appareils dont la plupart des foyers de la capitale ne disposent pas. À cause des centrales électriques et des maisons chauffées au charbon, la pollution de l’air atteint des niveaux dangereux.

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    Le Carnegie Hall, haut lieu de la musique à New York, a mis sur pied le projet Lullaby en 2011. Il repose sur des études montrant que les berceuses profitent à la santé maternelle, renforcent les liens entre les parents et l’enfant et aident au développement de ce dernier. Le projet favorise les collaborations entre musiciens professionnels et jeunes parents. Il a contribué à la création de milliers de berceuses dans de nombreux pays. Tiffany Ortiz supervise Lullaby. Elle spécifie: «Nous concevons essentiellement les berceuses comme des points d’ancrage.»

    «De nombreuses mères parleront avec ferveur des chants et des berceuses comme d’un moyen pouvant les aider à remettre leur foyer sur les rails», explique Dennie Palmer Wolf, chercheuse consultante pour le projet. Des familles de migrants en Grèce ont participé au programme, et les collaborateurs locaux comparent leurs berceuses à des « sanctuaires portatifs ».

    «Comme les prières ou les contes traditionnels, vous pouvez les emporter partout avec vous », ajoute Dennie. «Elles ne prennent pas de place dans les bagages. C’est une façon d’établir une continuité là où il n’y en a presque pas.»

    Les berceuses reflètent le présent, mais elles plongent souvent leurs racines dans le passé.

    En Mongolie, les nomades chantent la berceuse Buuvei depuis des générations. Son refrain «buuvei» signifie «n’aie pas peur». «L’amour est la chose la plus importante, transmise comme un legs », nous dit Bayartai Genden, chanteuse et danseuse traditionnelle mongole, grand-mère de treize petits-enfants.

    Bayartai peste contre la pollution atmosphérique qui recouvre la capitale de la Mongolie, Oulan-Bator. Ce brouillard la sépare du ciel bleu où reposent ses ancêtres. Elle interprète une berceuse à son petit-fils nouveau-né. En fond sonore, un purificateur d’air bourdonne.

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    Un nuage de pollution plane au-dessus d’Oulan- Bator. La pollution de l’ai due à la combustion du charbon en hiver est l’une des pires du monde. La situation a conduit l’Unicef à lancer un cri d’alarme concernant la santé des enfants de la capitale, touchés par une augmentation des infections respiratoires et une capacité pulmonaire plus faible que celle de leurs semblables vivant en dehors de la ville.

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    Plus de la moitié des enfants de Mongolie vivent à Oulan-Bator, où la pneumonie est la deuxième cause de décès chez les moins de 5 ans. L’Unicef a déclaré que la pollution de l’air de la ville était devenue un problème critique pour la santé des enfants. «J’utilise ces mots pour protéger mes enfants.

    Ils aident mes enfants à guérir», dit Oyunchimeg Buyankhuu à propos des berceuses qu’elle chantait lorsque ses deux filles étaient souvent malades à cause de la pollution.

    En ces temps troublés de Covid-19, les contes nous rassemblent. Les femmes représentent près de 70 % des travailleurs sociaux et auxiliaires de vie dans le monde. Les mères qui se battent en première ligne contre la pandémie mettent non seulement leur vie en danger mais doivent en outre s’occuper au mieux de leur propre famille.

    Infirmière dans le Massachusetts, Elizabeth Streeter travaille à l’étage Covid-19 d’un hôpital. Au début du mois d’avril, quand la pandémie s’est intensifiée, elle a pris la décision difficile de s’isoler de ses quatre garçons pour éviter de les exposer au virus. Le soir, elle communiquait avec eux par téléphone. Elle chantait la berceuse préférée de son fils de 3 ans, sans savoir quand elle pourrait de nouveau le serrer dans ses bras.

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    La médecin Molly Thomas appelle sa femme, Hannah Leslie, et leurs filles, Ada et Delaney, depuis le Massachusetts General Hospital de Boston où elle travaille. Elle chante aux filles une berceuse et leur souhaite une bonne nuit. Molly s’est isolée de sa famille pendant la période où elle soignait des patients contaminés par le Covid-19.

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    Allison Conlon, infirmière à Bridgewater (Massachusetts), exerce dans une unité de soins intensifs. Elle aussi s’est coupée de sa famille. Le soir, elle appelait Lucas, son fils de 2 ans, pour lui faire la lecture et lui chanter The Wheels on the Bus et Itsy-Bitsy Spider.

    Chanter une berceuse, c’est établir un lien entre la personne qui s’occupe de l’enfant et l’enfant lui-même. Mais, ce que nous percevons peut-être moins, c’est que ces chansons douces racontent aussi des histoires qui nous rattachent d’une part à notre passé et, d’autre part, les uns aux autres. Bayartai Genden décrit la berceuse comme «un échange entre deux âmes ». Les berceuses font partie du tissu à partir duquel les personnes veillant sur les enfants créent les espaces propices à l’endormissement. Khadija al-Mohammad dit qu’Ahmad réclame ses berceuses «non seulement pour dormir, mais aussi pour sentir ma tendresse». Ces chansons nous rappellent que nous ne sommes pas seuls. Et, malgré l’obscurité de la nuit, elles semblent nous promettre que, de l’autre côté, nous attend la lumière du matin.

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    Allison Conlon, infirmière s’occupant de patients atteints par le Covid-19, rend visite à son fils de 2 ans, Lucas, dans leur maison de Bridgewater (Massachusetts). Profitant d’un jour de congé, elle lui lit des histoires avant qu’il ne fasse la sieste. Par sécurité, elle est séparée de lui par une porte vitrée.

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    Article publié dans le numéro 255 du magazine National Geographic

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