Le véritable coût du changement climatique

Un rapport récent alerte sur les coûts faramineux engendrés par le réchauffement climatique, des dégâts causés par les tempêtes aux dépenses sanitaires. D'après ses auteurs, les solutions pourraient, elles, engendrer des retombées économiques.

De Stephen Leahy
Publication 9 nov. 2017, 02:23 CET
À Saint-Martin, près de Marigot, le 8 septembre 2017.
À Saint-Martin, près de Marigot, le 8 septembre 2017.
PHOTOGRAPHIE DE Martin Bureau, AFP

Selon un nouveau rapport remis à l'ONU, les phénomènes climatiques extrêmes exacerbés par le changement climatique ainsi que l'impact sanitaire de la combustion d'énergies fossiles ont coûté au cours de la dernière décennie au minimum 240 milliards de dollars (environ 204 milliards d'euros) par an à l'économie américaine et la perte de productivité mondiale liée au changement climatique pourrait être équivalente à 2000 milliards de dollars par an à l'horizon 2030.

Et cette somme ne tient pas compte des trois ouragans majeurs de ces derniers mois. Les dommages financiers engendrés par ces seuls événements vont coûter à l'État français plus de 200 millions d'euros. 

D'après une autre étude récente intitulée The Economic Case for Climate Action in the United States, publiée en ligne jeudi dernier par l'organisation Universal Ecological Fund, les dommages économiques causés par les catastrophes naturelles associés aux coûts sanitaires liés à la pollution atmosphérique coûteront aux États-Unis au minimum 360 milliards de dollars (306 milliards d'euros) par an au cours de la décennie à venir, affectant potentiellement la croissance économique du pays.

« La combustion des énergies fossiles a un coût démesuré que l'économie mondiale ne peut ni se permettre, ni supporter », affirme Robert Watson, co-auteur de l'étude et directeur du Centre Tyndall pour la recherche sur le réchauffement climatique, basé au Royaume-Uni.

Ouragan Harvey : une catastrophe naturelle d'une violence inouie

« Nous souhaitons dresser un tableau à l'attention des Américains afin de leur montrer que les coûts de l'inaction face au changement climatique sont titanesques », a expliqué à National Geographic Robert Watson, également ancien président du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat.

Watson s'empresse de souligner que les phénomènes météorologiques extrêmes, tels que les canicules, les ouragans, les feux de forêt et les épisodes de sécheresse ne sont pas uniquement le fait du changement climatique. Néanmoins, il ne fait aucun doute que leur intensité et leur fréquence aient été exacerbées par le réchauffement de l'ordre d'un degré de la planète, a-t-il décrété dans une interview.

Si une hausse de température d'un degré peut paraître insignifiante, son impact économique est considérable. Le nombre de catastrophes naturelles entraînant un coût d'au minimum 850 millions d'euros a augmenté de plus de 400 % depuis les années 1980. Une partie de cette augmentation est due à l'explosion des coûts liés au logement et aux infrastructures commerciales sur les littoraux. « Cependant, cela n'explique pas les hausses importantes de cette dernière décennie », ajoute le co-auteur.

Or, le réchauffement climatique n'est pas près de s'arrêter — on attend une hausse des températures de 2 degrés à l'horizon 2050, qui ne fera que s'accentuer ensuite —, à moins qu'une réduction drastique des émissions des énergies fossiles plus importante que celle convenue lors de la COP21 ne soit réalisée, indique Watson. « Les dégâts causés par le réchauffement climatique vont très certainement redoubler », prévient-il.

 

À LA RECHERCHE DE SOLUTIONS

Le rapport se penche également sur les solutions susceptibles de réduire les émissions carbone ainsi que la pollution atmosphérique qui pourraient être bénéfiques pour l'économie. Le doublement de la part actuelle des énergies renouvelables pourrait par exemple créer des millions de nouveaux emplois tout en réduisant de façon considérable la part d'électricité générée par les centrales au charbon. Cela aurait pour effet d'améliorer la qualité de l'air et d'ainsi réduire les coûts liés à la santé.

Dans ce cas de figure, les économies liées aux dépenses sanitaires et la réduction des coûts relatifs aux dégâts climatiques excéderaient 1,1 millier de milliards. Or, en mars dernier, l'administration Trump, qui est à la tête du pays le plus pollueur du monde, a signé un décret présidentiel appelant à l'examen du Clean Power Plan [une des principales politiques environnementales liées à l'énergie des mandats de Barack Obama, ndlr], tandis que le nouveau responsable de l'Agence américaine de protection environnementale a décrété que les États n'étaient plus obligés de s'y conformer. (Lire aussi : Les États-Unis isolés du reste du monde après le retrait de l'Accord de Paris).

« Presque tous les économistes vous diront qu'une taxe carbone ou un système de plafonnement et d'échange sont la meilleure des solutions. »

Au cours des années 1980 aux États-Unis, la pollution atmosphérique acide a été freinée par un programme de plafonnement et d'échange défendu par George H.W. Bush. Selon le scientifique, ce programme était alors le premier de ce type au monde et il s'est avéré efficace.

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      PHOTOGRAPHIE DE Luke Sharrett, Bloomberg via Getty Images

      D'AUTRES RAISONS DE S'ATTAQUER AUX ÉMISSIONS CARBONE

      Le passage aux énergies renouvelables permettrait également l'économie d'énormes quantités d'eau douce. La production d'électricité est l'industrie la plus gourmande en consommation d'eau : afin de produire de l'électricité, des quantités d'eau considérables sont utilisées dans les systèmes de refroidissement notamment. Selon l'étude menée par Wiser, si 35 % de cette production était réalisée à base d'énergies renouvelables, la réduction de la consommation d'eau permettrait de répondre aux besoins de 1,9 million de foyers. Cependant, ni les gains réalisés grâce à ces économies d'eau, ni les coûts environnementaux ou les avantages sur la santé ne figurent dans le rapport.

      Le rapport Economic Case for Climate Action ne tient pas compte non plus d'un certain nombre de pertes induites par le climat, telles que la diminution des récoltes causée par la sécheresse. Ces pertes s'élèvent à 56 milliards de dollars (47,5 milliards d'euros) depuis 2012. Ne figurent pas non plus les pertes financières liées aux effets sanitaires des vagues de chaleur, ou les conséquences sur les écosystèmes et les ressources en eau.

      « Notre rapport sous-estime les coûts réels induits par l'utilisation continue des énergies fossiles », reconnaît Watson.

      « Aujourd'hui, toutes nos estimations minimisent largement les faits », explique Amir Jina de l'université de Chicago, co-auteur d'une autre étude portant sur les conséquences du réchauffement climatique aux États-Unis. « Le changement climatique ne se limite pas à de petites augmentations de température : il a des conséquences énormes sur notre santé et notre bien-être à l'échelle locale. »

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