Nigéria : l'application qui lutte contre le gaspillage alimentaire
Le Nigérian Oscar Ekponimo a créé une application pour réduire la famine dans son pays. Un projet primé en 2016 aux Rolex awards.
L’année de ses 11 ans, Oscar Ekponimo se souvient d’avoir eu faim. Très faim. « Mon père a fait un accident vasculaire cérébral et il a perdu son emploi, se rappelle le Nigérian. Nous étions cinq enfants, c’était très difficile de nous nourrir. La plupart du temps, je partais à l’école sans manger… Je me suis promis qu’une fois adulte j’utiliserai mes compétences pour que personne d’autre ne vive cela. »
Promesse tenue : Oscar, désormais trentenaire, a reçu un Rolex award. Cette récompense, remise par la société suisse horlogère, soutient des projets novateurs dans cinq domaines : sciences et santé, techniques appliquées, exploration et découvertes, environnement et patrimoine culturel.
Concrètement, cela veut surtout dire qu’il a reçu 50 000 francs suisses qui vont lui permettre de concrétiser son projet. L’application « Chowberry » qu’il a créée vise à réduire le gaspillage alimentaire et la famine dans son pays. Une idée qui a mûri progressivement. « En 2005, nous distribuions des repas, avec des amis, pour les enfants des rues. J’ai découvert que les magasins d’alimentation jetaient de nombreux produits qui approchaient de la date de péremption. J’en ai convaincu certains d’en faire don. Mais cette initiative n’était pas durable. Il fallait une solution pérenne qui soit rentable pour les détaillants. »
La même année, le jeune homme entame des études d’informatique à l’Université de Calabar, au sud-est du pays. En parallèle, un chef d’entreprise local lui propose de travailler à temps partiel, lui offrant en échange un ordinateur et de la documentation pour approfondir ses connaissances en programmation de logiciels. Toutes ses matinées et ses soirées, Oscar les passe à engloutir des livres d’informatique. Son projet ne le quitte plus.
En 2014, son application est enfin prête. Le principe est simple : des magasins d’alimentation scannent leurs produits - conserves, céréales, boissons, biscuits, produits laitiers, … - et, quelques jours avant la limite de consommation, ceux-ci apparaissent sur une plateforme de vente en ligne. Plus ils approchent de la date de péremption, plus leur prix chute. « Il suffit d’avoir un téléphone mobile ou un ordinateur et une connexion internet pour bénéficier d’une nourriture à bas prix, s’enthousiasme l’entrepreneur. Et pour les plus pauvres, qui n’ont pas accès au réseau, nous sommes aussi en lien avec des associations de bienfaisance qui achètent en gros et redistribuent les denrées. »
Pour l’instant, l’application regroupe une dizaine de commerçants. Mais, grâce à la dotation de Rolex, il va pouvoir améliorer son logiciel et multiplier ses partenariats : « Mon objectif est d’associer 100 ou 200 détaillants et grandes surfaces pour toucher entre 50 000 à 100 000 ménages dans les prochaines années ». Et pourquoi pas traverser les frontières ? « La famine est une problématique mondiale et cette initiative est reproductible. On pourrait la développer dans d’autres pays d’Afrique voire sur d’autres continents. »
Dans le numéro de décembre 2017 du magazine National Geographic, un grand reportage sur les jeunes entrepreneurs africains qui réinventent le quotidien.