Comment améliorer la qualité de l'eau ? En plantant (beaucoup) d'arbres

Des chercheurs américains ont fait le lien entre reboisement et amélioration de la qualité des eaux. Ils appellent aujourd’hui les installations polluantes à reboiser davantage leurs terres.

De Arnaud Sacleux
Les arbres interagissent avec l’environnement en absorbant l’azote, le phosphore et le carbone qu’ils trouvent dans ...
Les arbres interagissent avec l’environnement en absorbant l’azote, le phosphore et le carbone qu’ils trouvent dans le sol. Reboiser certaines terres marginales dans la région du bassin de la rivière Ohio a permis de réduire drastiquement les pertes de nutriment de plus de 90 % et ainsi d'améliorer la qualité de l'eau qui en ruisselle.
PHOTOGRAPHIE DE fg trade, getty images via istock

Plus une zone est verdoyante, plus elle contribuera à la santé des habitats et organismes qu'elle abrite. Ce constat, réalisé par Arturo Keller, ingénieur mécanique et professeur à l’Université de Californie et Jessica Fox, de Electric Power Research Institute à Palo Alto, a été décrit et développé dans une étude publiée dans la revue Plos One. Cette étude a été réalisée dans la région du bassin de l’Ohio, où 10 % des terres cultivées actuelles ont été identifiées comme étant hautement prioritaires pour le reboisement et où a lieu le plus grand programme de qualité des eaux au monde, administré par l’Electric Power Research Institute (ERPI). Cet organisme aide financièrement les installations agricoles à réduire leur utilisation d’engrais et à la plantation d’arbres via des subventions.

En échange, ces installations s’engagent à réduire le taux d'éléments nutritifs, comme l’azote ou le phosphore, qu’elles déversent dans la rivière. L’étude permet aujourd’hui de quantifier ces déversements et d’établir un lien direct avec le reboisement de certaines terres.

 

LES TERRES MARGINALES DE LA RIVIÈRE OHIO

Plus d’un tiers du bassin de la rivière Ohio, zone fortement agricole, est source d'eau pour plusieurs millions de personnes. Elle est un excellent témoin pour cette étude car la rivière se déverse dans le golfe du Mexique, dont le ruissellement emporte les nutriments depuis les fermes et exploitations agricoles, entraînant la prolifération d’algues qui participent à la destruction de la vie marine.

« Afin de sélectionner les champs qui permettraient d'obtenir des résultats de qualité d'eau élevés, nous avons analysé l'utilisation actuelle des sols sur les bassins versants au nord de la rivière Ohio » affirme Arturo Keller. En ligne de mire, les terres dites « marginales », dont le rendement agricole est au plus bas à cause de la pauvreté du sol, de leur inclinaison ou de l’irrigation insuffisante. Ces territoires sont primordiaux car ils permettent, une fois reboisés, de réduire le ruissellement de ces nutriments et ainsi la pollution des bassins.

L’étude réalisée par Arturo Keller et Jessica Fox permet une identification de zones dont le reboisement déboucherait sur une amélioration optimale de la qualité de l’eau et d’évaluer l’ampleur du besoin.

 

DES CHIFFRES ENFIN CONCRETS

Les deux chercheurs se sont appuyés sur un outil de suivi des éléments nutritifs appelé NTT. « Cet outil a permis de mesurer dans certains cas les pertes de phosphore et d’azote lors de la conversion des cultures de maïs et de soja en terres boisées à 15 % près » affirme l’ingénieur. Les résultats sont probants ; dans les zones reboisées, les pertes d’azote ont diminué de près de 95 % par an, soit entre 40 et 80 kg/ha de moins, et les pertes de phosphore se chiffrent à -97 %, soit 1 à 4 kg par an. Pour Arturo Keller, il serait ainsi possible de diminuer le ruissellement de 60 millions de kilogrammes de phosphore et de 2 millions de kilogrammes de phosphore tous les ans.

Comment ? Les arbres interagissent avec l’environnement en absorbant l’azote, le phosphore et le carbone qu’ils trouvent dans le sol. De plus, le reboisement des terres cultivées marginales permet de fournir un habitat pour la biodiversité et le bois peut être exploité de manière durable.

C’est la première fois qu’une étude permet de quantifier de tels effets sur la qualité de l’eau, ce qui permettra de plus de faciliter l’attribution de subventions aux installations agricoles.

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