Colombie : ils sacrifient leurs vies pour défendre leurs terres

Depuis 2016, 1 297 dirigeants communautaires colombiens sont morts pour avoir résisté aux incursions des investisseurs et des cartels de la drogue.

De Jordan Salama
Photographies de Florence Goupil
Publication 17 mars 2022, 16:07 CET
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Ati Quigua, en plein rite de protection d’une rivière de la sierra Nevada de Santa Marta, du nord de la Colombie. Écologiste et femme politique de l’ethnie arhuaco, elle s’est élevée contre l’exploitation minière et les projets qui menacent les ressources naturelles de ce massif montagneux, réserve de biosphère de l’Unesco.

PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

Luis Manuel Salamanca se tient en équilibre sur le plateau couvert d’un pick-up bringuebalant, dévalant les routes sinueuses des Andes. Au petit matin de ce 22 mai 2018, le Massif colombien (ou nœud d’Almaguer)–ensemble de montagnes fertiles en forme de dôme du sud-ouest de la Colombie – s’éveille doucement.

Alors que le brouillard est en train de se lever, il aperçoit au loin une femme trayant une vache brune dans une clairière. Sur des routes étroites, des bus rouge et blanc pleins d’écoliers disputent le passage à des charrettes tirées par des chevaux et des mules. Plus de 200 m en contrebas, le río Magdalena se déverse dans une abrupte vallée vert émeraude, alimentée par des cascades tombant de toutes parts.

Nous nous dirigeons vers Quinchana, un village de quelque 90 familles caché dans les collines verdoyantes et plongé dans la brume du département du Huila. La région est connue pour ses cultures caféières et les explorations pétrolières ; plusieurs grandes rivières y prennent aussi leur source. Quinchana est également le point de départ du sentier menant à une petite communauté appelée « La Gaitana » et à un site archéologique recelant des vestiges précolombiens – des divinités mégalithiques et des tombeaux datant du Ier au VIIIe siècles.

Luis Manuel Salamanca a consacré sa carrière à l’étude et à la préservation de ce site. Cet homme de 64 ans est l’un des anthropologues les plus réputés de Colombie. Il a un visage doux et rond, n’élève jamais la voix et choisit toujours ses mots avec soin.

J’étais allé le voir à un moment de transition difficile pour la Colombie, qui venait de traverser un demi-siècle de violents conflits armés. Je suivais le cours du río Magdalena – le fleuve central et historique traversant le cœur de ce pays d’Amérique du Sud sur plus de 1500km–et passais du temps, le long de ses rives, avec des partisans du fragile processus de paix. La mi-2018 était relativement calme. Ça ne devait pas durer.

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Alexandra Isabel Salamanca tient une photo de son père, Luis Manuel Salamanca, jeune. Célèbre anthropologue et défenseur de l’environnement du département du Huila, il a été assassiné le 11 mai 2019. Aucune arrestation n’a eu lieu.

PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

« Mieux vaut partir avant qu’il pleuve », me dit Luis Manuel Salamanca en regardant les nuages. Le pick-up était bourré de passagers quand nous lui avions fait signe de s’arrêter, et Salamanca et moi n’avions eu d’autre choix que de nous accrocher à l’extérieur. « Mieux vaut partir avant qu’il pleuve », dit-il à nouveau à voix basse.

Les vestiges les plus connus du massif sont les extraordinaires statues mégalithiques d’un site classé au patrimoine mondial, un parc mêlant pelouses bien entretenues et sentiers de gravier situé dans la ville voisine de San Agustín, chef- lieu du département. On peut y admirer de grandes dalles de pierre verticales sculptées – en forme de lézards et de singes anthropomorphes – dominant les collines environnantes.

Se promener sur les sentiers soignés de San Agustín, c’est un peu comme visiter un zoo de pierres. À l’inverse, La Gaitana est cachée à flanc de montagne et le sentier est enfoui sous la végétation, depuis l’époque où Quinchana était la porte d’entrée d’un couloir du trafic de drogue contrôlé par la guérilla.

Pendant plus d’un demi-siècle, les Forces armées révolutionnaires de Colombie (Farc), d’inspiration marxiste, étaient en guerre contre le gouvernement colombien. Le conflit a attiré d’autres milices de gauche, des groupes paramilitaires d’extrême droite, des cartels de la drogue et l’armée américaine, ce qui a transformé d’immenses étendues de forêt tropicale et des régions reculées en zones dangereuses pour les visiteurs comme pour la population locale. Le conflit a fait près de 270 000 morts, 81 000 disparus et 7,4 millions de personnes déplacées.

L’accord de paix signé en 2016 devait tout changer. Les soldats des Farc acceptaient de déposer les armes et le gouvernement s’engageait à réintégrer les rebelles dans la société. Surtout, l’État promettait de créer ou d’améliorer les services publics dans les zones rurales autrefois contrôlées par les guérilleros. On pouvait espérer que les anciennes zones de conflit rouvriraient aux visiteurs, créant ainsi plus d’opportunités pour les habitants.

Mais l’appât du gain provenant des ressources inexploitées se paie cher. Les chercheurs d’or, les éleveurs de bétail et les narcotrafiquants se sont installés, et les populations osant défendre leurs terres et leur culture contre ces projets de développement sont devenues des cibles. Selon l’Institut d’études pour le développement et la paix (Indepaz), ONG basée à Bogotá, 1 297 « leaders sociaux » colombiens, dont de nombreux Amérindiens et Afro-Colombiens, ont été assassinés depuis l’accord de paix de 2016.

« La manière dont ces meurtres de dirigeants sont perpétrés, le genre de leaders visés, les lieux où cela se produit – c’est systématique », m’a fait remarquer Leonardo González, de l’Indepaz. Systématique et fréquent : la Colombie a été le pays le plus meurtrier du monde pour les activistes écologistes en 2020 et pour la deuxième année consécutive, selon Global Witness, organisme d’enquête sur l’environnement et les droits de l’homme basé à Londres. Presque un an jour pour jour après ma rencontre avec Luis Manuel Salamanca, l’anthropologue s’ajoutait au nombre de ces tragiques victimes. Dans la nuit du 11 mai 2019, il a été la cible de coups de feu et laissé pour mort devant sa porte.

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    PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

    Ma virée en pick-up avec Luis Manuel Salamanca prend fin à l’aérodrome de Quinchana. Notre voyage doit se poursuivre à pied. La matinée est calme, mais je ne suis pas tranquille. Les villes contrôlées par les Farc comme Quinchana étaient encore il y a peu des zones interdites aux indésirables.

    La reconquête de grandes étendues du territoire colombien sur les Farc a été une bénédiction pour la science et pour le tourisme. Avec sa multitude d’écosystèmes, de paysages et d’espèces, la Colombie se classe deuxième dans le monde pour la richesse de sa biodiversité. Les biologistes ont exploré de nouvelles régions, découvrant des espèces inconnues et protégeant celles qui étaient menacées. Le nombre de touristes étrangers a augmenté chaque année de plus d’un million de 2016 à 2019.

    Dans le même temps, la libre circulation des bûcherons, des éleveurs et des chercheurs d’or a alimenté la déforestation, et la culture de la coca – essentielle à la fabrication de cocaïne – a atteint un niveau record en 2018, selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime. De grands projets de développement – comme le barrage de Los Besotes dans la sierra Nevada de Santa Marta et les explorations par fracturation hydraulique le long du río Magdalena – menacent d’inonder les terres, de polluer l’eau et de déplacer les communautés et les espèces dépendant de ces deux ressources.

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    PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

    Les autorités n’ont pas réussi à mettre au pas ceux qui privilégient les profits immédiats sur la protection des ressources. Il existe même des preuves de corruption généralisée au sein des autorités régionales. Des politiciens au plus haut niveau, y compris des membres du parti au pouvoir, le Centro Democrático, ont été liés à des groupes paramilitaires violents impliqués dans de nombreux meurtres. Les paras, comme on les appelle, sont apparus dans les années 1970 et 1980 quand de riches propriétaires terriens, des trafiquants de drogue et des entreprises défendant leurs intérêts ont financé des milices privées pour éliminer les gauchistes.

    L’incapacité de l’État colombien à établir une présence forte dans les anciennes zones de conflit a permis aux groupes criminels de prospérer et de s’entre-tuer pour les ressources naturelles, les couloirs de contrebande ainsi que les ports où ils pouvaient transporter des marchandises illicites. Les activistes se défendent – et le paient de leur vie.

    Parmi les personnes visées figurent des dirigeants indigènes, des enseignants, des scientifiques, des défenseurs de l’environnement, des agriculteurs qui tentent de remplacer la coca par des cultures légales, des féministes et des défenseurs de l’accord de paix de 2016. Juana Perea Plata, 50 ans, la propriétaire d’un écolodge, a mobilisé les opposants au port industriel proche de chez elle, dans le département du Chocó, sur la côte Pacifique. Elle a été assassinée en octobre 2020 par le Clan del Golfo, un cartel de la drogue notoire créé par des paras.

    Un an plus tard, Néstor Leonel Lozano Muriel, membre du cartel, a été condamné à près de dix- huit ans de prison pour le meurtre de la militante. Carlos Fredy Londoño Bautista, 47 ans, enseignant et dirigeant syndical qui protégeait les traditions locales dans le département du Meta, à la lisière de la forêt amazonienne, a été tué devant ses élèves, en août 2021. Francisco Vera, lui, est un écologiste de 11 ans, résidant dans le département de Cundinamarca. Connu pour sa campagne sur les réseaux sociaux contre la fracturation hydraulique et l’exploitation minière, il a reçu des menaces de mort en janvier 2021 et s’est vu attribuer un garde du corps par le gouvernement.

    Mais les activistes estiment que celui-ci devrait faire davantage que leur affecter des gardes du corps. Ils demandent des investissements dans l’éducation et des programmes sociaux pour créer des alternatives au trafic de drogue et à l’exploitation des ressources naturelles dans les zones reculées. Ils demandent également au gouvernement de ratifier l’accord d’Escazú, premier traité environnemental signé par vingt-quatre pays d’Amérique latine et des Caraïbes, et premier accord contraignant engageant les signataires à protéger les défenseurs de l’environnement.

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    PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

    Dans un rapport sur la déforestation publié en novembre 2021, des chercheurs de l’ONG International Crisis Group ont cité des hauts responsables colombiens chargés de l’application des lois ayant déclaré que « des hommes politiques impliqués dans des activités telles que l’élevage de bétail ont soudoyé des fonctionnaires ou manipulé des enquêtes judiciaires. Des personnalités éminentes ont échappé à toute sanction, même dans les cas où les autorités avaient établi qu’ils avaient financé des défrichements illégaux. Des informations à propos des enquêtes du gouvernement sur des affaires spécifiques ont été communiquées à des groupes armés, qui ont ensuite tenté de corrompre ou de menacer les fonctionnaires concernés. »

    Une rare exception a eu lieu en 2019, lorsqu’un gouverneur, deux maires et une femme d’affaires locale ont été condamnés collectivement à une amende de plus d’un million de dollars pour avoir autorisé la construction d’une route de 138 km à travers la forêt amazonienne dans le département du Guaviare. Le projet a entraîné 230 km2 de déforestation, le déplacement de petits agriculteurs au profit de grandes exploitations de bétail et de plantations illégales d’huile de palme. Les familles d’éminents sénateurs ont aussi été impliquées dans des affaires de spoliation de terres et de pots-de-vin pour des projets d’élevage.

    Certains politiciens conservateurs ont cherché à discréditer les activistes en les qualifiant de marxistes et ont minimisé les dangers pesant sur eux. Dans les jours précédant et suivant le meurtre de deux syndicalistes enseignants ruraux, en novembre 2020, des sénateurs du parti au pouvoir ont accusé le syndicat national des enseignants d’« endoctriner » les enfants. Dans une interview télévisée, en 2017, Luis Carlos Villegas, alors ministre de la Défense, a affirmé que l’« immense majorité » des meurtres perpétrés depuis l’accord de paix ne visaient pas à faire taire les activistes, mais étaient plutôt dus à des différends concernant des droits de propriété, des femmes ou des profits illicites.

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    PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

    À deux heures de marche de Quinchana, Luis Manuel Salamanca et moi avons trouvé le site archéologique de La Gaitana, gardé par deux statues de singes de 1m de haut, au large visage, avec des oreilles rondes et une bouche montrant de grandes rangées de dents. Les vrais singes, tout comme les tapirs des Andes, les ours à lunettes, les jaguars et les pumas, ont fui depuis longtemps vers des régions montagneuses encore plus reculées et moins perturbées par les humains. Les vestiges de leur présence sont ici immortalisés dans la pierre.

    L’anthropologue m’amène jusqu’à une clairière pleines de buttes herbues, hautes de 40 cm. « Un ancien cimetière pour enfants », lâche-t-il tranquillement, en désignant des stèles de pierre noire recouvertes de mousse. Malgré son âge, Luis Manuel Salamanca semble incapable de tenir en place. Il a d’ailleurs été tué alors qu’il sortait faire une marche, de nuit, dans les rues de San Agustín. Quand il n’étudiait pas un site, il se promenait à vélo dans les collines.

    La nouvelle de son assassinat a fait la une des journaux nationaux. La Nación, quotidien influent, l’a salué comme « le plus illustre des Agustinianos [habitants de San Agustín] », célébrant ses contributions à la compréhension scientifique et culturelle. Le mobile exact du crime reste inconnu, mais on se souvient de lui comme d’un citoyen au franc-parler ne craignant pas de défendre ses convictions – ce qui a pu lui valoir des ennemis. Il s’est opposé à la construction du mégabarrage voisin El Quimbo, ouvert en 2015 – et pour lequel, 450 familles ont été déplacées et 80 km2 de forêt et de terres agricoles ont été inondées dans le département du Huila. Il a aussi combattu le schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux du río Magdalena, un projet de réseau de barrages défendu par les gouvernements colombien et chinois – la Chine étant le deuxième partenaire commercial de la Colombie. S’ils étaient construits, ces ouvrages inonderaient certaines des zones les plus reculées du bassin fluvial dans le Massif colombien, faisant craindre des pertes calamiteuses tant au niveau environnemental qu’archéologique. Dans les jours suivant la mort de Salamanca, des centaines de personnes sont descendues dans les rues de San Agustín, des bougies allumées à la main, pour réclamer justice. Une récompense de 2 700 dollars a été promise en échange d’informations et le maire de San Agustín s’est engagé à apporter des réponses.

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    PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

    Près de trois ans après, personne n’a été inculpé. Dans les affaires impliquant des leaders activistes, c’est plutôt courant. Les autorités arrêtent parfois les individus qui ont appuyé sur la détente, mais rarement ceux qui ont ordonné ou encouragé les meurtres.

    En décembre 2021, le bureau du procureur général de Colombie a reconnu avoir identifié les instigateurs de seulement 111 des quelque 500 meurtres de défenseurs des droits humains recensés depuis 2016 par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme et n’avoir condamné que quinze des personnes ayant planifié ces assassinats. Le système judiciaire est quasi inexistant dans les zones rurales anciennement contrôlées par les Farc.

    L’une des militantes les plus en vue de Colombie s’appelle Francia Márquez Mina. Celle qui s’emploie à chasser les mineurs d’or illégaux des communautés afro-colombiennes du département du Cauca a d’ailleurs reçu le prestigieux prix Goldman pour l’environnement en 2018. Menacée de mort, elle a dû fuir sa ville natale, en 2014. Le 4 mai 2019, à Santander de Quilichao elle a échappé à une tentative d’assassinat : des hommes ont ouvert le feu avec des fusils et des grenades, blessant trois de ses gardes du corps. « Rien n’est fait pour mettre fin aux meurtres, déplore-t-elle. L’État laisse faire les assassins. »

    Pourtant, de nombreux activistes estiment qu’ils n’ont pas d’autre choix que de poursuivre leur mission malgré les risques – même si cela signifie utiliser des téléphones jetables, changer leurs habitudes ou déménager fréquemment. Sauver les communautés menacées d’exploitation, poursuit Francia Márquez Mina, « est de notre responsabilité». Candidate à l’élection présidentielle de mai 2022 en Colombie, même si elle a peu de chances de l’emporter, elle insiste : « Si nous n’agissons pas, rien ne changera. »

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    Un membre de la Guardia Indígena contemple les collines de Tierradentro, réserve archéologique inscrite au patrimoine mondial, dans le Cauca. Il tient un bâton fixé à un rocher sacré, symbole du pouvoir des autochtones sur la terre. Malgré les menaces de mort, les gardes se sentent garants de la protection des trésors naturels et culturels du pays.

    PHOTOGRAPHIE DE Florence Goupil

    La marche de protestation contre le meurtre de Luis Manuel Salamanca, le 15 mai 2019, était le prélude à d’autres événements. En novembre, la même année, des manifestations de mécontentement ont eu lieu dans toute la Colombie. Idem au cours du premier semestre 2021, avec des rassemblements contre les hausses d’impôts, l’augmentation de la pauvreté et la lenteur de la mise en œuvre de l’accord de paix. À Cali, Pereira ou Ibagué, la répression de la police anti-émeute a fait des dizaines de morts et des centaines de blessés parmi les manifestants. Les menaces qui pèsent sur les activistes constituent l’un des principaux griefs des manifestants dans tout le pays. Et pourtant, le carnage continue : en 2021, 165 meurtres de leaders sociaux ont été enregistrés par Indepaz à la mi- décembre. Pendant ce temps, la Colombie, qui recèle d’immenses réserves de biodiversité et des puits de carbone vitaux, quasiment uniques au monde, doit endurer les exactions des investisseurs et des criminels.

    En 2018, en regardant à nos pieds les collines vertes du Massif colombien, Luis Manuel Salamanca et moi avions vu une fine couche de nuages recouvrir la vallée, comme une fumée montant de la terre. Améliorer les moyens de subsistance dans les anciennes zones de conflit tout en sauvegardant les communautés et les ressources naturelles est une entreprise de longue haleine, m’avait-il alors confié. « C’est comme acheter une ferme abandonnée, avait-il ajouté. Ça demande beaucoup d’argent et de travail, puis il faut attendre un certain temps, en espérant que les résultats seront visibles un jour. »

    Cet article a initialement été publié dans le numéro 270 du magazine National Geographic. S'abonner au magazine

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