Golfe du Maine : un havre de biodiversité en proie au changement climatique

Le mélange singulier d’éléments qui a fait du golfe du Maine une oasis est aussi la raison pour laquelle ses eaux se réchauffent aujourd’hui plus vite que presque partout ailleurs.

De Anna Peele
Photographies de Brian Skerry
Publication 1 juin 2024, 14:12 CEST
Un banc de gaspareaux remonte le Mill Brook, dont les eaux finissent par rejoindre le golfe ...

Un banc de gaspareaux remonte le Mill Brook, dont les eaux finissent par rejoindre le golfe du Maine. Ces poissons vivent dans l’océan, mais reviennent frayer en eau douce. L’espèce s’est rétablie après la suppression de barrages et nourrit de nombreux poissons, oiseaux et mammifères.

PHOTOGRAPHIE DE Brian Skerry

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L’abondance du Golfe du Maine. Cette « mer à l’intérieur d’une autre mer », comme on l’appelle souvent, s’étend sur 58 000 km² le long de la côte est de l’Amérique du  Nord, du cap Cod, dans l’État américain du Massachusetts, à la province canadienne du Nouveau-Brunswick, et englobe les côtes du New Hampshire, du Maine et de la Nouvelle-Écosse. Les autochtones qui vivent dans cette région depuis plus de 12 000 ans ont appris les rythmes naturels du golfe et exploité ses eaux riches de manière durable. Les Européens, qui ont commencé à s’y installer au 15e  siècle, louaient dans leurs récits les pêches miraculeuses qu’ils pouvaient y faire, avec des morues de plus de 1,5 m de long. 

Le golfe du Maine combine un puissant bassin hydrographique, où de nombreux fleuves se jettent dans la mer, à un mélange unique de courants qui apportent et mélangent les nutriments, notamment les remontées d’eau du plateau continental, le Gulf Stream, le courant du Labrador et les courants côtiers circulant dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. En raison de la situation géographique du golfe dans une zone tempérée, il s’y produit aussi une stratification saisonnière qui sépare l’eau en couches plus chaudes et plus froides. Historiquement, celle-ci a favorisé le développement de la vie. Mais les choses ont changé. 

Au fil des siècles, l’essor de flottes de pêche commerciale sur-équipées a entraîné une forte diminution de la vie sauvage marine. Le cabillaud, dont les réserves semblaient autrefois inépuisables, ne représente plus que 1 % des niveaux de l’époque coloniale britannique. En  un peu plus de deux cents ans, nous avons donc éliminé 99 % de cette espèce de la région.

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    L’écologue marin Douglas Rasher prélève des échantillons d’eau dans une forêt de laminaires près de Winter Harbor. Cet habitat marin essentiel est aujourd’hui en train de disparaître le long de la côte la plus méridionale du Maine.

    PHOTOGRAPHIE DE Brian Skerry

    J’ai grandi dans une ville ouvrière du Massachusetts, à environ 60 km de l’océan, mais mes parents m’emmenaient à la plage en été. Aussi loin que je me souvienne, j’ai toujours été amoureux de la mer. Mon rêve était de devenir photographe et de partir explorer l’océan. En vingt-six ans de reportages photographiques pour National Geographic, j’ai eu la chance de pouvoir voyager sur les sept continents et dans la quasi-totalité des écosystèmes marins, de l’équateur aux pôles. 

    Il y a des années, j’ai décidé d’emménager sur le littoral du Maine afin d’en explorer plus souvent les eaux. C’est là que j’ai perçu les signes d’une menace imminente. Les milieux de la science et de la conservation marines, eux, avaient été alertés par un article publié en 2015 et signé Andrew Pershing, alors directeur scientifique à l’Institut de recherche du golfe du Maine. À mon tour, je ressens l’urgence de partager les merveilles des eaux de mon enfance, tout en mettant l’accent sur les effets du changement climatique. 

    Parmi les merveilles encore présentes dans le golfe du Maine figurent les phoques gris. L’un d’eux s’est montré très curieux à l’égard du photographe Brian Skerry lors d’une plongée dans les Isles of Shoals.

    PHOTOGRAPHIE DE Brian Skerry

    Au départ, mon projet était de visiter les plus beaux sites où j’avais plongé ces dernières décennies, comme Eastport. Mais, lorsque j’y suis retourné, l’endroit ressemblait à une ville fantôme. L’abondance de vie que j’y avais jadis observée avait disparu. Là où des créatures exotiques tapissaient le fond marin, il n’y avait plus que de la boue. Les eaux s’étaient nettement réchauffées. 

    Le mélange singulier d’éléments qui a fait du golfe du Maine une oasis est aussi la raison pour laquelle ses eaux se réchauffent aujourd’hui plus vite que presque partout ailleurs. Charles Tilburg, océanographe et directeur des programmes marins et environnementaux à l’université de Nouvelle-Angleterre, a passé une quinzaine d’années à étudier l’affaiblissement du courant du Labrador : celui-ci fournit moins d’eau froide au golfe, tandis que le Gulf Stream se déplace légèrement vers le nord et apporte de l’eau plus chaude à la région. Mais, malgré le stress provoqué par la surpêche et le changement climatique, certaines espèces ont bénéficié, fût-ce temporairement, de cette nouvelle donne.

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