La banquise se fissure à une vitesse jamais égalée
À l'aide de ses satellites, la NASA continue de veiller sur l'Antarctique dans l'obscurité totale de la longue nuit polaire.
Cela fait des années que les scientifiques surveillent la plate-forme de glace Larsen C en Antarctique, observant cette immense fissure s'agrandir à une vitesse inégalée au cours des derniers mois. Le 12 juillet dernier un des plus grands icebergs de l'histoire (environ 50 fois plus grand que Paris) s'est détaché pour rejoindre la mer.
Dénommé A68, l'iceberg s'est complètement désolidariser de Larsen C. Pour les scientifiques alarmés par la fonte des calottes polaires, le travail ne fait que commencer. Surveiller A68 et les autres iceberg dans la mer de Weddell est crucial pour comprendre les effets du changement climatique sur cette région et le reste du monde.
Seul obstacle - de taille : l'Antarctique est actuellement plongé dans une nuit polaire totale.
L'orbite elliptique de la terre étant inclinée, l'Antarctique n'a de fait que deux saisons : l'été et l'hiver. Six mois par an, cette région du monde est donc plongée dans l'obscurité.
Les scientifiques de la NASA ont développé de nouveaux outils pour leur satellite Landsat 8 pour leur permettre de continuer leur veille quelle que soit la saison. Au lieu de capter la luminosité, le capteur infrarouge thermique (Thermal Infrared Sensor, ou TIRS), est capable de prendre des images mesurant les différences de températures entre l'eau et les différentes couches de glace.
« Comme pour vous et moi, prendre des photos la nuit est difficile. Pour améliorer la sensibilité de nos capteurs, Landsat est maintenant équipé de capteurs infrarouge détectant les émissions énergétiques, » explique Christopher Shuman, chercheur au Centre Goddard Space Flight de la NASA.
« Ces images nous permettent de voir l'évolution de la faille et d'évaluer la taille de l'iceberg qui s'est détaché dans l'obscurité totale. »
VOIR DANS L'OBSCURITÉ
Les images infrarouge sont ensuite nuancées en gris ou colorisées pour mettre en avant les différences de température dans la zone surveillée. Les couleurs les plus chaudes représentent l'eau plus chaude de l'océan tandis que les couleurs plus claires ou plus froides représentent les différentes couches de glace, plus froides.
Quand l'iceberg A68 s'est détaché de la plate-forme, les scientifiques ne pouvaient pas estimer à quel moment précis cela s'était produit.
« Nous devions faire des suggestions à partir des données thermiques que l'iceberg pouvait fournir, » poursuit Shuman. Les images infrarouge ont pu par la suite confirmer que l'iceberg était bien détaché de la plateforme.
Les températures de l'eau et de la glace changent chaque jour, mais le satellite passe régulièrement au-dessus de la zone, de telle sorte que les moindres changements peuvent être monitorés.
Grâce à cette technologie, les scientifiques de la NASA ont pu observer que depuis leur détachement, A68 et les autres icebergs se sont déplacés au gré des tempêtes et des courants dans la mer de Weddell. Les images montrent également que de nouvelles failles pourraient être en train de se former sur la plateforme Larsen C, menaçant sa stabilité.
Quand le soleil réapparaîtra en Antarctique à la fin du mois, Landsar 8 pourra à nouveau utiliser les outils d'imagerie haute résolution pour observer l'évolution de ces nouvelles failles.