Vagues de chaleur record en Inde et au Pakistan : le changement climatique en action

Depuis plusieurs jours, l’Inde et le Pakistan sont frappés par des vagues de chaleur anormales, avec des pics enregistrés à 50°C. L’eau, d'ordinaire rare, vient à manquer, tout comme l’électricité.

De Margot Hinry
Publication 9 mai 2022, 17:40 CEST
 Balakot, une ville du district de Mansehra, dans la province de Khyber Pakhtunkhwa au Pakistan, sous ...

 Balakot, une ville du district de Mansehra, dans la province de Khyber Pakhtunkhwa au Pakistan, sous les flammes.

PHOTOGRAPHIE DE Fasyal khan

En 2017, National Geographic partageait la mise en garde des scientifiques concernant des futures vagues de chaleur mortelles qui s'abattraient sur l’Asie du Sud-Est d’ici 2100 : « Les régions les plus touchées par le changement climatique se trouvent dans le nord de l'Inde, au Bangladesh et au sud du Pakistan, où vivent près d'1,5 milliard de personnes ». 

En mai 2022, les thermomètres affichent dores et déjà des températures allant jusqu’à 50°C selon les régions d’Inde et du Pakistan. Les prévisions s’avéraient justes, mais bien avant ce que les scientifiques anticipaient.

Les habitants subissent depuis plusieurs jours des vagues de chaleur intenables, provoquant une hausse de la demande d’électricité, jusqu’à la pénurie. Les centrales électriques manquent de charbon et ne suffisent plus pour satisfaire la demande. « On n’aurait jamais imaginé que cela arriverait. Selon les scientifiques, le Pakistan est sur la liste des dix pays qui vont être le plus touchés par les effets du réchauffement climatique. C’est vrai qu’ils l’ont toujours dit, mais nous n’avions jamais pensé que cela pourrait vraiment arriver » témoigne Iqbal Badruddin Jamal, un jeune militant écologiste pakistanais, fondateur de Fridays for Future au Pakistan (FFF Pakistan).

Les températures dépassent les normales de saison de 8°C, atteignant les 48°C en journée dans certaines zones selon les données météorologiques du pays. Iqbal Badruddin Jamal décrit la situation des derniers jours ainsi : « les gens vivaient l’enfer, ils ne pouvaient même plus aller dehors ». Il précise que selon lui, les chiffres non-officiels concernant la population des régions concernées par ces vagues de chaleur seraient encore plus impressionnants.

Ces sécheresses sont très inquiétantes, au vu des conséquences des dernières vagues qui avaient frappé ces pays il y a quelques années. En 2015, une vague de chaleur a tué plus de 3 500 personnes en Inde et au Pakistan. La température humide observée était alors de 50°C. 

Incendies causés par les vagues de chaleur au Pakistan

Incendies causés par les vagues de chaleur au Pakistan

PHOTOGRAPHIE DE Fasyal khan

L’ADAPTATION, SEULE OPTION VIABLE POUR LES PAYS PAUVRES

Le porte-parole de Fridays for Future indique que sur place, les citoyens ne pensent pas modifier leurs habitudes pour éviter que ces phénomènes ne se reproduisent, le problème vient de plus loin. « À l'échelle individuelle, personne ne va agir puisqu’ils pensent que le sort n’est pas entre leurs mains. Les effets du changement climatique affectent le Pakistan encore plus vite que n’importe quel autre pays. Ce n’est pas la faute des populations ou du gouvernement, c’est un problème collectif ».

Pour Iqbal Badruddin Jamal, les Pakistanais n’ont qu’une seule option : s’adapter. « Je pense que l’Inde et la Chine pourraient agir sur leurs émissions de gaz à effets de serre mais ici nous ne pouvons pas faire grand-chose. Nous devrions plutôt nous inquiéter de la manière dont nous allons avancer. La seule solution, pour un pays qui émet moins d’émissions [que les pays les plus pollueurs], c’est de s’adapter ». Si depuis quelques années, le pays parvient à stabiliser son taux d'émissions par habitant, celui-ci reste cependant quatre fois plus élevé qu'en 1990.

Des incendies se déclarent dans plusieurs régions, ravageant des forêts entières. La semaine dernière, nos confrères et consœurs du Monde rapportaient les dégâts causés par l’incendie d’une gigantesque décharge en Inde. « Sous l’effet de la chaleur, le méthane généré par la matière organique en décomposition s’est enflammé. La capitale de l’Inde, qui, comme le reste de l’Asie du Sud, est au cœur d’une vague de chaleur record, a été enveloppée d’une épaisse fumée âcre ».

En février 2022, le Giec mettait en garde sur les effets des gaz à effet de serre, notamment sur les pays du Sud. Cet « atlas de la souffrance humaine » recense les différentes dégradations probables des pays qui seront les plus rapidement touchés par les effets climatiques. D’après le réseau Action Climat, les scientifiques du Giec prédisent que d’ici 2050, « rien qu’en Amérique latine, Afrique subsaharienne et Asie du Sud-est, on pourrait compter jusqu’à 143 millions de déplacés climatiques supplémentaires ».

« Les pays comme le Pakistan ont déjà beaucoup de problèmes, ils souffrent déjà d’un manque de ressources qui les rend encore plus vulnérables aux changements climatiques » ajoute le jeune militant. Beaucoup de personnes dans le besoin n’ont pas accès à l’eau potable en temps normal. Face à ces vagues de chaleur, l’accès à l’eau est essentiel. « Ils survivent avec l’eau qu’ils trouvent » témoigne le fondateur de FFF Pakistan. « Il faut aider les personnes âgées et les plus faibles, puisqu’il faut récupérer l’eau dans les rivières ou les sources et les rapporter jusque chez-soi. »

Sur place, « la plupart des citoyens doivent se gérer eux-mêmes. Ils savent que le gouvernement n’est pas en capacité de les aider » précise Iqbal Badruddin Jamal. De nombreuses régions du Pakistan dépendent de l’agriculture. « Les agriculteurs doivent surveiller leurs récoltes qui sont affectées, notamment les fruits et les légumes. C’est très important pour eux parce qu’ils savent qu’en perdant leur récoltes, ils n’auront rien d’autre. »

Pour limiter les effets du changement climatique, les Accords de Paris imposaient une limite de 1,5 à 2°C supplémentaires à ne pas dépasser. Les cartes ont été mises sur la table, les décisions et les changements doivent désormais être prises à grande échelle. Le dernier volet du rapport du Giec insiste notamment sur la manière drastique dont les plus gros émetteurs doivent réduire leurs émissions, le plus vite possible.

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