''Steve'', l'aurore boréale d'un nouveau genre
Des scientifiques amateurs canadiens ont observé pour la première fois une brève aurore qu’ils ont baptisée « Steve ». Les scientifiques sont désormais à l’œuvre pour découvrir son origine.
Steve seen with the Milky Way over Childs Lake, Manitoba.
Voilà un millénaire que les aurores boréales et australes émerveillent les observateurs de la nuit étoilée. Ces dernières années, des photographes scientifiques amateurs ont identifié un nouveau type d’aurore boréale, un ruban de plasma scintillant de couleur violette éphémère. Leur intrigante découverte a attiré l’attention des spatiologues, qui se sont lancés dans l’étude du phénomène.
« Au beau milieu de la nuit, des chasseurs d’aurores passionnés, en particulier dans l’Alberta au Canada, étaient en train d’observer la partie nord du ciel et de prendre de magnifiques photos lorsqu’ils ont aperçu un arc violet à peine perceptible plus au sud », a déclaré Elizabeth MacDonald, physicienne de l’espace au centre Goddard Space Flight de la NASA situé à Greenbelt, dans le Maryland. Selon elle, différents phénomènes physiques sont responsables de ces aurores violettes.
La physicienne et son équipe ont alors envoyé l’un des satellites Swarm de l’Agence spatiale européenne à travers l’aurore pour l’étudier. Publiée mercredi dans la revue Science Advances, les résultats de l’étude obtenus suggèrent que ces aurores sont constituées de particules chargées, chauffées et accélérées en provenance du Soleil qui interagissent avec une zone spécifique du champ magnétique de la Terre dans l’ionosphère.
N’étant pas sûrs de ce qu’ils venaient d’apercevoir, les scientifiques amateurs décidèrent de baptiser l’aurore à la structure étrange « Steve ». Ce nom a plutôt plu, et Elizabeth MacDonald et son équipe ont décidé de le conserver tout en proposant le rétro-acronyme STEVE, qui signifie Strong Thermal Emission Velocity Enhancement (forte augmentation de la vitesse d’émission thermique). Bien que les scientifiques aient percé le secret des courants aux latitudes plus basses de particules chargées depuis des décennies, ils ignoraient complètement que ceux-ci pouvaient produire des aurores visibles à l’œil nu. Aujourd’hui, les smartphones et les appareils photos numériques prennent des clichés de meilleure qualité que l’équipement dont disposaient les scientifiques à l’époque, ce qui leur permet de saisir ces aurores rares, qui ne durent qu’une heure environ.
POURQUOI « STEVE » EST-IL SI UNIQUE ?
Alors que les aurores rouges, vertes ou jaunes ont une forme semblable à celle d’un voile, STEVE ressemble plutôt à un ruban de couleur mauve ou pourpre qui traverse le ciel. Cette aurore est parfois accompagnée de formes vertes plus petites et instables qui ressemblent à une clôture. Par le passé, certaines personnes les appelaient à tort « arcs de protons », mais la structure de STEVE est plus étroite et plus nette.
Elizabeth MacDonald et son équipe ont plutôt identifié STEVE comme un phénomène nommé « dérive d’ions subaurorale ». Celui-ci se produit plus au sud, à environ 60 degrés au-dessus de l’équateur. C’est à cet endroit que l’alignement des champs électriques et magnétiques favorisent le déplacement rapide des ions et des électrons dans la direction est-ouest, ce qui les chauffe. Ces aurores, qui ne sont pas visibles en hiver et semblent être saisonnières, se produisent lorsque le soleil crache des particules chargées.
« Cette nouvelle méthode d’observation d’un phénomène spatial nous permet d’étudier ce dernier sous un nouvel angle », a déclaré Vassilis Angelopoulos, spatiologue à l’UCLA qui n’a pas pris part à l’étude. « Les scientifiques citoyens peuvent aussi nous aider à les localiser et à déterminer leurs altitudes ».
ET APRÈS ?
En raison de l’intérêt porté à ces aurores, Elizabeth MacDonald et d’autres scientifiques ont pour projet d’approfondir leurs études sur ce phénomène pour déterminer leur origine. Les scientifiques amateurs continueront de participer à l’étude indirectement en restant à l’affût de la moindre aurore. Si celles-ci sont observées à différents endroits, les scientifiques pourront utiliser les observations pour déduire où elles se produisent et à quelle altitude.
Les astronomes amateurs qui souhaitent localiser ces aurores pourront le faire dans l’hémisphère nord dans des régions comme l’Alberta, le Montana et le Michigan ou dans l’hémisphère sud, en Nouvelle-Zélande. Elizabeth MacDonald conseille aux scientifiques citoyens de télécharger l’application de son projet scientifique, Aurorasaurus, qui alerte ses utilisateurs lorsque des aurores ont été aperçues.
Elle ajoute, en faisant référence à un projet similaire de contributions de scientifiques citoyens dans le domaine ornithologique que « trouver STEVE, c’est un peu comme découvrir une nouvelle espèce d’oiseaux ».