Combien y a-t-il de civilisations extraterrestres dans la Voie Lactée ?

La Voie lactée abrite une multitude de planètes habitables et environ la moitié des étoiles de type solaire ont pour voisins des mondes de dimension terrestre qui pourraient abriter la vie.

De Nadia Drake
Publication 3 nov. 2020, 17:39 CET, Mise à jour 17 août 2024, 14:31 CEST
Cette vue d’artiste représente Kepler-186f, la première planète de dimension terrestre confirmée, orbitant autour d’une lointaine ...

Cette vue d’artiste représente Kepler-186f, la première planète de dimension terrestre confirmée, orbitant autour d’une lointaine étoile dans la zone habitable.

PHOTOGRAPHIE DE Illustration de la NASA AMES/JPL-CALTECH/T. Pyle

Voilà qui devrait ravir les chasseurs de vie extraterrestre : plus de 300 millions de mondes présentant des conditions propices à la vie telle que nous la connaissons sont dispersés dans la Voie lactée. Selon une nouvelle analyse, environ la moitié de ces étoiles de type solaire abritent des planètes rocheuses dans la zone habitable, où l’eau à l’état liquide pourrait s’accumuler ou s’écouler en surface.

« C'est une découverte scientifique que nous attendions tous », confie Natalie Batalha, astronome à l’université de Californie à Santa Cruz, qui a pris part à la nouvelle étude.

Publiée dans la revue Astronomical Journal, cette découverte identifie un chiffre crucial de l’équation de Drake. Mise au point en 1961 par mon père, Frank Drake, cette équation établit un cadre d‘estimation du nombre de civilisations détectables dans la Voie lactée. Et nous connaissons aujourd’hui les premières variables de la formule, à savoir le taux de formation d’étoiles de type solaire, la part de ces étoiles qui sont dotées de planètes et le nombre de mondes habitables par système stellaire.

La probabilité que des étoiles de type solaire soient dotées de planètes semblables à la Terre « pourrait être d’une sur un millier ou d’une sur un million, personne ne le sait vraiment », explique Seth Shostak, astronome à l’Institut SETI (Search for Extraterrestrial Intelligence ou de recherche d’intelligence extraterrestre) qui n’a pas pris part à la nouvelle étude.

Les astronomes ont eu recours aux données collectées par Kepler, le télescope spatial détecteur de planètes de la NASA, pour estimer le nombre de ces planètes. Pendant neuf ans, Kepler a observé les étoiles et a guetté les brefs scintillements causés par les planètes en orbite qui dissimulaient une partie de la lumière de leur étoile. En 2018, alors que sa mission touchait à sa fin, Kepler avait détecté environ 2 800 exoplanètes, dont la plupart n’avaient rien à voir avec celles gravitant autour de notre Soleil.

Mais le télescope spatial avait un objectif principal : déterminer à quel point les planètes semblables à la Terre étaient répandues. L’aide du satellite Gaia de l’Agence spatiale européenne, qui observe les étoiles de la galaxie, a été nécessaire pour effectuer cette estimation. Grâce aux observations de Gaia, les scientifiques ont enfin pu découvrir que la Voie lactée abritait des centaines de millions de planètes de dimension terrestre gravitant autour d’étoiles de type solaire et que la plus proche se situait très certainement à 20 années-lumière maximum de notre système solaire.

 

L’ÉQUATION DE DRAKE

L’équation de Drake utilise sept variables pour estimer le nombre de civilisations détectables dans la Voie lactée. Elle prend en compte des facteurs tels que la part d’étoiles de type solaire dotées de systèmes planétaires et le nombre de planètes habitables dans chacun de ces systèmes. Partant de là, l’équation prend en considération la fréquence à laquelle la vie évolue sur les mondes dans des conditions idéales et celle à laquelle ces formes de vie finissent par développer des technologies détectables. Dans sa forme originale, l’équation part du principe que des extraterrestres dotés d’un savoir-faire technologique évolueraient sur les planètes gravitant autour d’étoiles de type solaire.

« Lorsque des astronomes évoquent le fait de découvrir ces planètes, tout le monde parle de l’équation de Drake », déclare Jason Wright, astronome à l’université d’État de la Pennsylvanie qui étudie les planètes potentiellement habitables, mais n’a pas pris part à l’étude. « Chacun d’entre nous a cela en tête lorsque nous faisons ce calcul ».

Il aura fallu plus d’un demi-siècle aux scientifiques pour commencer à déterminer le nombre de planètes pouvant abriter la vie. En 1961, les astronomes pensaient que le Soleil était la seule étoile à compter des planètes en orbite et même si les théories relatives à la formation des planètes suggéraient que les exoplanètes pouvaient être nombreuses, il n’existait aucune preuve empirique de leur existence. Mais, au cours de la dernière décennie, il est devenu évident que ces planètes étaient extrêmement répandues et plus nombreuses que les étoiles dans la Voie lactée. En moyenne, quasiment une planète (au moins) gravite autour de chaque étoile.

Cette découverte était « un grand pas en avant », confie Jason Wright. « Cela voulait dire que de nombreux sites propices à la vie telle que nous la connaissons avaient potentiellement été détectés ». Cependant, le facteur suivant de l’équation de Drake, à savoir le nombre de planètes habitables par système planétaire, était plus difficile à calculer, confie Natalie Batalha.

 

DES PLANÈTES POTENTIELLEMENT HABITABLES 

C’est en observant les baisses de lumière causées par le passage des planètes devant les étoiles et occultant brièvement une partie de la lumière de celles-ci que Kepler distingue les mondes lointains. En fonction de la quantité de lumière des étoiles occultée et de la fréquence du phénomène, les scientifiques peuvent déterminer la taille de la planète et le temps qu’elle met pour graviter autour de son étoile. En utilisant cette approche, Kepler a détecté des milliers d’exoplanètes de toutes tailles et de tout type d’orbites. Mais les scientifiques étaient surtout en quête d’une donnée : savoir quelle était la part de planètes semblables à la Terre, c’est-à-dire rocheuses, au climat tempéré et gravitant autour d’étoiles de type solaire.

Les premières estimations suggéraient que 20 % des étoiles de type solaire abritaient peut-être une planète répondant à ces critères. Nous savons aujourd’hui que ce chiffre est plus proche de 50 %, si ce n’est plus.

« Cela est supérieur à ce que je pensais. Je disais toujours au public qu’une étoile sur quatre ou sur cinq avait des planètes. Ce résultat est une agréable surprise », explique Natalie Batalha. « Chaque étoile de type solaire est assurée, en moyenne, d’avoir au moins une planète potentiellement habitable ».

Toutefois, le calcul de la fréquence de ces planètes posait des défis imprévus. Les étoiles observées par Kepler étaient bien plus actives que ce à quoi s’attendaient les scientifiques et produisaient des signaux pouvant imiter ou troubler les signatures des planètes en transit. En outre, le télescope spatial était capricieux et nécessitait des manœuvres périodiques qui compliquaient les observations.

Pour parvenir à leur conclusion, Natalie Batalha et ses collègues ont combiné les données collectées par Kepler et Gaia, qui suit et décrit un milliard d’étoiles situées à proximité. Grâce à Kepler, les chercheurs ont identifié des planètes au rayon compris entre 0,5 et 1,5 fois celui de la Terre et qui seraient vraisemblablement plutôt rocheuses que gazeuses. Quant au satellite Gaia, il leur a permis d’obtenir les températures et la taille des étoiles autour desquelles ces planètes gravitent.

Plutôt que de fonder l’habitabilité potentielle d’une planète sur la distance qui la sépare d’une étoile, l’équipe a calculé la quantité d’énergie qui atteint l’une et l’autre. À partir de là, elle a pu sélectionner les planètes où les températures favoriseraient l’accumulation de l’eau à l’état liquide à la surface.

Une fois que l’équipe disposait d’une taille d’échantillon d’étoiles de type solaire comportant des planètes rocheuses et tempérées, elle a été capable d’estimer combien de ces planètes existaient dans la galaxie toute entière. D’après elle, entre 37 et 60 % des étoiles de type solaire de la Voie lactée abriteraient une planète de taille terrestre tempérée. Toutefois, en effectuant un calcul plus progressiste relatif à l’énergie nécessaire pour qu’une planète soit tempérée, les scientifiques ont découvert que 58 à 88 % des étoiles de type solaire compteraient une planète de ce type.

Bien évidemment, le fait qu’une planète se trouve dans la zone habitable réellement propice à la vie est déterminé par de nombreux facteurs. Les caractéristiques des planètes, comme les champs magnétiques, les atmosphères, la teneur en eau et la tectonique des plaques jouent un rôle, mais restent difficiles à observer sur des mondes lointains et de petite taille.

Pour autant, « cette étude creuse vraiment la question du nombre de sites abritant la vie », confie Jason Wright. « Les auteurs ont calculé la distance la plus probable jusqu’à la planète la plus proche répondant à ces caractéristiques et ils l’ont trouvée dans notre jardin céleste ». Cette planète serait située à maximum 20 années-lumière, tandis que quatre autres évolueraient à maximum 33 années-lumière.

 

HABITABILITÉ ET CIVILISATION

Maintenant que les astronomes maîtrisent bien la question du nombre de planètes semblables à la Terre dispersées dans la galaxie, ils peuvent poursuivre leur examen des variables de l’équation de Drake. Bon nombre des facteurs restants seront difficiles à déterminer, notamment les questions cruciales portant sur la fréquence à laquelle les extraterrestres développent des technologies que nous pourrions détecter et la durée pendant laquelle de telles civilisations sont détectables.

Une autre question en suspens porte sur l’inclusion ou non des étoiles qui ne sont pas de type solaire par les scientifiques, étant donné que plusieurs planètes de taille terrestre ont été découvertes autour d’étoiles plus petites et plus froides. En outre, d’autres mondes que les planètes devraient peut-être aussi être pris en compte, car même si la plupart de ceux détectés par Kepler sont de grande taille et gazeux, « ils pourraient abriter des lunes forestières comme Endor » dans Star Wars, déclare Jason Wright. « Ou je suppose comme Pandora dans Avatar ».

Les astronomes sont à deux doigts de déterminer le facteur suivant de l’équation, à savoir la part des planètes habitables sur lesquelles la vie évolue. Alors que l’exploration de notre système solaire se poursuit, nous constatons que la liste des mondes habitables est longue et diverse. À titre d’exemple, Mars ou Europe, la lune glacée de Jupiter, pourraient abriter la présence d’une vie microbiologique. Même les nuages toxiques flottant au-dessus de Vénus pourraient potentiellement receler des formes de vie.

« Si cela s’est produit plus d’une fois dans le système solaire, vous obtiendrez cette estimation assez rapidement », confie Jason Wright.

Trouver ne serait-ce qu’un seul exemple de présence de vie hors de la Terre prouverait que la biologie n’est pas le résultat d’un extraordinaire coup de chance cosmique, mais plutôt un résultat probable si les ingrédients nécessaires sont réunis. Pour de nombreux astronomes, au vu du nombre de planètes habitables dans l’univers, la présence de vie est quasiment inévitable.

Cependant, comme le dit si bien mon père, les dernières variables de l’équation de Drake, celles qui nous diront si seule la Terre abrite des organismes adeptes des technologies dans la galaxie, resteront un mystère tant que nous n’entendrons pas les murmures des mondes extraterrestres.

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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