Cette étoile ne brille qu’une fois tous les 80 ans et il sera bientôt temps de l'observer

Pendant une semaine, d’ici le mois de septembre, T Coronae Borealis, nova dont l’apparition est périodique mais rare, brillera de mille feux, assez pour faire figure de nouvelle étoile dans le ciel nocturne.

De Adam Kovac
Publication 19 avr. 2024, 09:42 CEST
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Une géante rouge et une naine blanche sont en orbite l’une autour de l’autre sur cette animation représentant une nova tout à fait semblable à celle que les amoureux des étoiles peuvent s’attendre à apercevoir cette année. Quand la géante rouge passe derrière la naine blanche, une explosion se produit sur la naine blanche et remplit l’écran de lumière blanche. Après que la lumière s’est évanouie, une boule de matière issue de la nova apparaît en orange pâle. Un petit point blanc demeure après que le brouillard de matière s’est dissipé, ce qui indique que la naine blanche a survécu à l’explosion. Pour les observateurs terriens, l’événement ressemblera à la naissance d’une nouvelle étoile près de la constellation Corona Borealis.

ILLUSTRATION DE NASA Goddard

Une nouvelle étoile est en route pour venir peupler le ciel nocturne de l’hémisphère nord. Elle pourrait apparaître d’ici quelques jours, mais cela pourrait aussi bien prendre quelques mois ; les astronomes n’ont à ce sujet pas beaucoup de certitudes, bien qu’ils attendent le retour de sa lueur depuis quatre-vingts ans. Mais lorsqu’elle paraîtra enfin, elle brillera si intensément que l’on pourra la voir à l’œil nu une semaine durant.

Et ensuite, aussi abruptement qu’elle aura fait irruption dans le panorama céleste, elle s’en ira.

Derrière cette manifestation clinquante se cache T Coronae Borealis (ou T CrB), phénomène rare connu sous le nom de nova récurrente. Comme le suggère son nom, T CrB se situe dans une constellation en forme de fer à cheval nommée Corona Borealis (la Couronne Boréale), distante de 3 000 années-lumière environ.

À l’inverse des novas classiques qui sont créées lorsqu’une étoile explose à la fin de sa vie, les novas récurrentes, comme leur nom le suggère, percent dans le ciel bien plus fréquemment, mais elles sont également causées par des processus stellaires différents de ceux à l’origine des vraies novas. La dernière éruption de T Coronae Borealis s’est produite en 1946. Seules dix de ces novas sont répertoriées dans la Voie lactée.

 

QUELLE EST LA CAUSE DE L’ÉRUPTION DE CE CORPS CÉLESTE ?

La lumière de T Coronae Borealis n’est pas le produit de l’explosion d’un unique corps céleste mais plutôt d’une danse céleste entre deux étoiles orbitant l’une autour de l’autre. La plus grande des deux, une géante rouge dont la masse équivaut peu ou prou celle de notre système solaire tout entier, perd de sa matière, notamment de l’hydrogène et de l’hélium. Cet éjecta tombe en partie sur la naine blanche voisine qui, bien qu’elle fasse à peu près la taille de la Terre, contient près de 40 % de matière de plus que le Soleil, ce qui en fait un astre extraordinairement dense.

Alors que la naine blanche absorbe les rebuts de sa compagne de route, sa température ne cesse d’augmenter, et elle devient donc plus dense. Enfin, tous les quatre-vingts ans environ, elle atteint un point de bascule critique où des réactions de fusion nucléaire en série la font entrer en éruption.

« Nous la suivons dans le monde entier et elle a fait des choses amusantes », indique Sumner Starrfield, professeur de l’Université d’État d’Arizona qui a beaucoup étudié ce système solaire au cours de sa carrière. « Sa luminosité a augmenté pendant quelques années et aujourd’hui elle a diminué un peu. Il semble qu’elle fasse à peu près la même chose que juste avant d’exploser en 1946, raison pour laquelle nous faisons tout à coup preuve de beaucoup d’intérêt. »

 

QUAND SERA-T-ELLE VISIBLE ET COMMENT LA VOIR ?

On ne sait pas exactement quand l’éruption se produira. Selon la NASA, cela pourrait survenir à n’importe quel moment d’ici au mois de septembre. Mais Sumner Starrfield fait observer que ce n’est qu’une bonne estimation, et qu’il faudra peut-être attendre plusieurs années avant que nous ne puissions observer l’explosion dans le ciel. Toutefois, lorsqu’elle se produira, les astronomes amateurs n’auront pas le temps de cligner des yeux tant le phénomène est fugace.

COMPRENDRE : Les étoiles

« Le paroxysme sera atteint très rapidement », explique Bradley Schaefer, professeur émérite à l’Université d’État de Louisiane et l’un des plus grands spécialistes de T Coronae Borealis. « C’est bref, la luminosité maximale ne durera que quelques heures et elle commencera à faiblir vite. [Le phénomène] ne sera plus visible à l’œil nu après une semaine à peine. »

« Si vous êtes juste Monsieur ou Madame Tout-le-monde qui sort observer le ciel pour la voir, armé de rien d’autre que de vos simples yeux, vous n’avez qu’une ou deux nuits pour le faire », prévient-t-il.

Quand elle entrera effectivement en éruption, elle sera surveillée de près. L’équipe de Sumner Starrfield a réservé des créneaux sur le télescope spatial James-Webb (JWST) afin d’observer l’éruption et de déterminer exactement quelle quantité de masse est éjectée dans l’espace au cours du processus.

Mais certaines des observations les plus importantes de ce phénomène rare seront le fait d’un réseau d’astronomes amateurs qui utiliseront le télescope de leur jardin. Des membres de l’Association américaine des observateurs d’étoiles variables (AAVSO) et le site The Astronomer’s Telegram scrutent T CrB depuis un moment déjà. Au cours des années qui viennent de s’écouler, on a téléversé sur une plateforme centralisée un nouveau point de données toutes les dix minutes en moyenne, ce qui génère un flux constant de mises à jour sur la luminosité du système. Il ne fait aucun doute que l’un de ces amateurs s’arrogera le titre de premier à avoir aperçu l’éruption qui vient.

« La raison pour laquelle beaucoup de personnes l’observent est que les gens aiment ce qui fait boom », commente Brian Kloppenberg, directeur exécutif de l’AAVSO. Beaucoup d’astronomes amateurs ont une envie forte d’être la personne qui découvre quelque chose ou qui aperçoit une première manifestation. »

Mais Bradley Schaefer a son propre plan en place pour le moment où il recevra la nouvelle ; et il est bien déterminé à ne pas manquer l’événement. Non sans ironie, Leslie Peltier, l’astronome qui avait prédit l’éruption de 1946 avait manqué ce phénomène grandiose à cause d’un rhume inopportun. Au moment de l’éruption, T CrB devrait briller aussi intensément que l’Étoile polaire, point le plus brillant de la Petite Ourse.

« À n’en pas douter, je vais me ruer dehors dès qu’il fera nuit et que le ciel sera dégagé, car je souhaite que mes observations contribuent à la courbe de lumière, se réjouit d’ores et déjà Bradley Schaefer. Quand vous entendrez dire que T CrB se lève, vous n’aurez pas besoin de télescope, tout ce que vous avez à faire, c’est de sortir par une nuit claire et sans nuages et de lever les yeux au ciel. »

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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