Ces passionnés qui construisent leur propre télescope
Des milliers de personnes sont si passionnées par l'astronomie qu'elles décident de construire leurs propres télescopes. Mais pourquoi font-elles cela ?
Détail de la Lune photographiée avec un télescope Celestron. Chaque année en Afrique du Sud, la ville de Johannesburg accueillait le Scope X, le plus grand festival amateur de sciences et de de construction de télescope. Ici, une jeune fille observe le ciel avec un télescope. Après deux ans d'interruption, le festival devrait se tenir à nouveau le 10 septembre 2022.
Il est parfois facile d’oublier que nous vivons sous une canopée d’étoiles qui change sans cesse. Depuis des millénaires, le ciel étoilé inspire les rêves et la mythologie de l’humanité. Pourtant, il peut souvent paraître inaccessible ou incroyablement éloigné. Ce monde, c'est celui des télescopes spatiaux, des astronautes célèbres et des astronomes professionnels installés dans des observatoires situés au sommet des montagnes.
Toutefois, pour certaines personnes, il existe un moyen pour rapprocher les étoiles et prendre en main l’observation de ces dernières au sens littéral : construire des télescopes de A à Z. Pour mener à bien ce type de projet, il faut du courage, de l’entraînement, des outils et aimer le calcul. Des efforts qui finissent normalement par être récompensés : vous pourriez bien fabriquer un instrument capable de voir des centaines d’objets célestes et les nuages colorés qui enveloppent Jupiter en passant par les cratères lunaires bien nets ou encore les tâches sombres qui marquent le Soleil.
Si cela ressemble à un effort colossal, c’est parce que c’est parfois le cas. Le meulage et le polissage des miroirs qui reflètent et concentrent la lumière peuvent nécessiter des centaines d’heures de travail.
« Je ne pourrais pas le faire », a confié le photographe Robert Ormerod, qui a récemment réalisé un reportage photographique à l’occasion de deux rassemblements de fabricants amateurs de télescopes. « Mais je trouve vraiment incroyable l’engagement dont font preuve ces passionnés pour construire ces instruments. »
Johan Landman, technicien aéronautique, est l’un de ces fabricants amateurs. Il se décrit comme une personne manuelle qui aime bricoler et fabriquer des objets et qui a toujours été fasciné par tout ce qui touche à l’astronomie.
« Enfant, je faisais collection de toutes sortes d’optiques, qu’il s’agisse de verres de lunettes, de lentilles de jumelles ou d’appareils photo », confie Johan Landman, qui vit à Johannesburg en Afrique du Sud. « Je m’amusais à tous les orienter dans diverses directions et parfois, j’arrivais à voir quelque chose. En faisant cela, j’ai appris sans le vouloir toutes les bases de la fabrication d’un télescope et cela a encore plus piqué ma curiosité. »
Johan a étudié la conception de télescope et a fini par apprendre comment les fabriquer de A à Z. Aujourd’hui, il partage sa longue passion avec sa fille Leané, adolescente. Ensemble, ils observent les étoiles, reconstruisent et modifient de vieux télescopes et emmènent leurs créations avec eux sur la route.
« Leané m’aide à l’atelier depuis qu’elle sait marcher », explique Johan Landman. « Elle a commencé à s’intéresser à l’astronomie vers six ans et à neuf ans, nous lui avons offert un petit télescope pour Noël. »
La jeune fille trouve très gratifiant d’utiliser un objet qu’elle a aidé à concevoir et à construire pour observer le ciel. En plus, cela lui permet de développer des compétences plutôt rares et impressionnantes.
Des festivals dédiés aux fabricants amateurs de télescopes, comme Johan et Leané, ont lieu partout dans le monde : des milliers de curieux se rassemblent pour admirer le ciel avec ces instruments locaux faits à la main.
« Ce qui m’intéressait le plus, c’était de découvrir ce que la construction de ces télescopes et leur utilisation pour observer le ciel la nuit apportent à ceux qui les fabriquent », indique le photographe.
Pendant des années, Robert Ormerod a photographié les nombreux terriens qui ressentent un lien très spécial avec l’espace, que ce soit en fabriquant des télescopes, en chassant les aurores boréales, en participant à des simulations de missions sur Mars ou en construisant des fusées. Selon lui, cet attrait s’explique par le souci de se rapprocher de l’univers.
« Je suppose que cela concerne la façon dont vous vous sentez en regardant les étoiles », explique Robert Ormerod. « Vous vous sentez petit, mais en même temps, vous admirez quelque chose de merveilleux qui est là depuis toujours. »
En 2018, le photographe s’est rendu en Afrique du Sud pour réaliser un reportage photographique lors du Scope X, le plus grand rassemblement amateur scientifique et de fabricants de télescopes du continent. C’est là-bas qu’il a rencontré Johan Landman et sa fille et où il a vu Saturne pour la première fois à travers un télescope.
« C’était vraiment génial », se souvient-il. « Jamais je n’avais vu une de ces planètes d’aussi près. »
Après le festival Scope X, Robert Ormerod s’est rendu à Sutherland, une ville située dans le sud-ouest de l’Afrique du Sud. Là-bas, il a attendu pendant deux jours que le ciel se dégage et que les étoiles apparaissent. Une fois les nuages dissipés et la Lune bien brillante dans le ciel, il s’est aventuré dans la pénombre et a été immédiatement subjugué par le ciel, tellement parsemé d’étoiles qu’il semblait presque s’affaisser sur lui.
« Le nombre d’étoiles dans le ciel était juste incroyable. Presque chaque recoin du ciel en était parsemé », se souvient-il.
Robert Ormerod et Johan Landman espèrent transmettre cette passion de l’astronomie à la prochaine génération d’astronomes et de fabricants de télescopes en herbe.
« Je pense qu’il est très important d’insuffler aux jeunes une curiosité et un intérêt pour l’astronomie », explique Johan Landman. « Aujourd’hui, la plupart des enfants ont le regard rivé sur leur portable, leur tablette ou le tout dernier jeu électronique au lieu de lever les yeux vers le ciel et d’admirer les merveilles de notre univers, comme Galilée et d’autres de nos ancêtres ont pu le faire par le passé. »
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.