Une aurore boréale extrêmement rare a été observée en Norvège

Le phénomène, qui n'avait jamais été observé depuis la surface de la Terre, serait le résultat d'une pluie polaire d'électrons venus tout droit de la couronne solaire.

De Isabel Swafford
Publication 26 juin 2024, 16:13 CEST
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Les 25 et 26 décembre 2022, des chercheurs ont observé une rare aurore issue d'une pluie polaire à Longyearbyen, en Norvège, qui apparaît ci-dessus sous l'aurore boréale, un phénomène plus courant. Les aurores issues de pluies polaires se forment selon un mécanisme différent de celui des aurores classiques et sont extrêmement difficiles à observer.

PHOTOGRAPHIE DE Fredrik Meling, 500px, Getty Images

Aux premières heures d’un matin de Noël, dans l’archipel de Svalbard, en Norvège, un objectif fisheye était pointé vers un ciel nocturne éclairé d’un vert éclatant. Contrairement aux aurores boréales habituelles, qui décorent le ciel, tels de fins voiles lumineux serpentant sous les étoiles, cette aurore prenait la forme d’une vaste couverture de lumière verte, presque uniforme.

« Cette aurore [avait] une forme très lisse, et sa structure n’était qu’une tache diffuse de vert », décrit Keisuke Hosokawa, physicien spatial à l’Université d’électro-communication de Tokyo, au Japon, qui confie n’avoir jamais rien vu de tel.

Cette étrange aurore a recouvert le ciel du pôle Nord les 25 et 26 décembre 2022, et selon un article publié par Hosokawa et ses collègues dans Science Advances, ce phénomène rare porterait le nom de « polar rain aurora », une aurore issue d’une pluie polaire.

 

DES PLUIES D’ÉLECTRONS AU PÔLE NORD

Les aurores illuminent le ciel nocturne lorsque des électrons éjectés par le Soleil atteignent la Terre, et se retrouvent piégés puis accélérés par son champ magnétique. Ces électrons sont émis par la couronne solaire, la couche la plus externe de l’atmosphère de notre étoile, sous la forme d’un plasma connu sous le nom de vent solaire.

En raison de la grande variété de particules à haute énergie contenues dans le vent solaire, lorsqu’ils atteignent la Terre, les électrons transportés par ce dernier n’ont généralement pas suffisamment d’énergie pour engendrer la formation d’aurores visibles. Cependant, une fois piégés et excités par le champ magnétique de notre planète, les électrons se mettent à interagir avec les atomes présents dans notre atmosphère et produisent ainsi des aurores. Ces spectacles lumineux apparaissent autour des pôles, mais rarement au-dessus des calottes polaires elles-mêmes.

Une caméra all-sky installée à Longyearbyen, en Norvège, a capturé ces images d'une aurore issue d'une pluie polaire en train de recouvrir le ciel nocturne du pôle Nord de vert.

PHOTOGRAPHIE DE Keisuke Hosokawa, et al., 2024

Les aurores issues des pluies polaires, quant à elles, sont directement produites par ces électrons, dans les rares cas où le vent solaire est faible, voire inexistant. L’événement observé en 2022 « est un contre-exemple fascinant : ici, une calotte polaire semble être remplie d’électrons venus directement de la couronne solaire », révèle David Knudsen, physicien à l’Université de Calgary, au Canada, qui n’était pas impliqué dans la nouvelle étude. « Ce phénomène est extrêmement inhabituel. »

Ce type d’aurore polaire avait déjà été observé par des satellites par le passé, mais jamais par des caméras terrestres. C’est par hasard, après avoir décidé de prendre une pause dans sa routine hebdomadaire de vérification des caméras d’observation des aurores pour les fêtes de fin d’année, qu’Hosokawa a observé l’aurore de 2022.

« Lorsque j’ai vu cette étrange aurore, j’ai soudain réalisé que ce phénomène était spécial et que je devais agir. J’ai donc commencé à analyser les données satellitaires récoltées au même moment, et j’ai reconnu la signature des pluies polaires », se souvient Hosokawa.

 

28 HEURES SANS VENT SOLAIRE

En plus d’être le résultat de l’arrivée d’électrons relativement faibles en provenance directe de notre étoile, ce phénomène exceptionnel s’est également produit au beau milieu d’une période de 28 heures durant lesquelles presque aucun vent solaire n’a été enregistré, à l’exception de la pluie polaire d’électrons, ce qui est particulièrement rare.

En effet, la couronne de notre étoile émet des flux de vents solaires en permanence, c’est pourquoi il est très inhabituel de constater leur quasi-disparition. Selon Hosokawa, il s’agit là d’un phénomène auquel nous n’assistons « qu’une fois tous les vingt ans », la seule autre observation d’une telle aurore polaire, qui n’avait alors été observée que depuis l’espace, remontant à 2004.

Du fait de l’absence de vent solaire, l’aurore étudiée par Hosokawa était exceptionnellement lumineuse, et donc plus facile à observer depuis la surface de la Terre. La double observation de cette aurore, à la fois depuis le sol et depuis l’espace, est essentielle pour permettre aux spécialistes de comprendre aussi bien les petits détails que les grands modèles qui la composaient.

En outre, les électrons à l’origine de ces « aurores de pluie polaire » provenant directement du Soleil, ils agissent comme une ombre ou une empreinte de l’environnement dont ils sont issus. Hosokawa et ses collègues espèrent ainsi utiliser les données récoltées pour comprendre la relation entre les électrons qui arrivent sur Terre et leur lieu d’origine, dans l’atmosphère du Soleil.

« Ce qui est vraiment passionnant dans cet article, c’est qu’il montre que de nouvelles découvertes fondamentales attendent encore d’être réalisées », affirme Larry Paxton, coauteur de l’étude et astrophysicien au Laboratoire de physique appliquée de l’Université John-Hopkins, à Baltimore. « Nous disposons désormais d’un système de satellites et d’observatoires au sol qui nous permet d’étudier, pour la première fois, une nouvelle connexion reliant notre Soleil à la Terre. »

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    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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