Cette découverte vieillit l'arrivée des hommes en Australie de 18 000 ans
Selon de nouvelles analyses réalisées sur des outils antiques, les hommes auraient quitté l'Afrique bien plus tôt qu'on ne le pensait.
Nous savons depuis longtemps que l'homme moderne, ou Homo sapiens, existait d'ores et déjà en Afrique il y a 200 000 ans. Jusqu'ici, nous pensions que les premiers hommes en Australie y avaient posé pied il y a 47 000 ans, en faisant l'un des derniers arrêts du périple des migrations humaines qui aurait nécessité des traversées maritimes considérables.
D'après une nouvelle découverte récemment publiée dans la revue Nature, l'arrivée des hommes en Australie remonterait à 65 000 ans. Les sociétés aborigènes australiennes auraient donc vu le jour 18 000 ans plus tôt qu'on ne le pensait.
Une équipe d'archéologues de l'université du Queensland est arrivée à cette conclusion suite à l'excavation d'un abri rocheux dans le Majedbebe, une région du nord de l'Australie, lors de fouilles menées en 2012 et 2015. Des outils de pierre et des hachettes figurent parmi les artefacts découverts dans la région, suggérant des compétences développées pour la fabrication d'armes. Selon les auteurs de l'étude, aucune hache de ce type n'apparaissait dans une autre culture pendant 20 000 autres années.
« Les haches étaient en parfait état de conservation, enfouies sous la paroi arrière de l'abri et nous avons dû creusé profondément », a déclaré Chris Clarkson, l'un des auteurs de l'étude, au groupe australien Fairfax Media.
Les méthodes de datation des artefacts reposaient jusqu'ici sur une technique appelée datation par carbone 14. Or, cette technique ne permet de déterminer des dates avec précision que si elles ne remontent pas à plus de 45 000 ans.
Dans le cadre de cette étude, les chercheurs ont eu recours à une technique supplémentaire appelée luminescence stimulée optiquement (dite OSL). Ce procédé est appliqué à des grains minéraux et détermine la date à laquelle ils ont été exposés à la lumière pour la dernière fois. Elle indique ainsi aux chercheurs depuis combien de temps un artefact a été enterré.
Les artefacts découverts à l'origine par l'équipe d'archéologues n'étaient vieux que de 10 000 ans. En creusant plus profondément dans le refuge, ils ont mis la main sur des outils remontant à 35 000, 40 000 et jusqu'à 65 000 ans.
Afin d'atteindre les côtes australiennes, les peuples aborigènes d'Australie avaient certainement entrepris un périple de près de 100 kilomètres depuis les régions voisines. Dans un entretien accordé au Sydney Morning Herald, Chris Clarkson a émis l'hypothèse que ces premiers Australiens aient marché vers les régions du nord du continent depuis la Papouasie-Nouvelle-Guinée lorsque le niveau de la mer était beaucoup plus bas.
Selon Chris Stringer, auteur du livre The Origin of Our Species (« L'origine de notre espèce ») et chercheur au muséum d'histoire naturelle de Londres, l'arrivée des hommes en Australie marque un tournant dans notre évolution.
Dans un e-mail à National Geographic, il écrit que le voyage nécessaire pour atteindre l'Australie « illustre clairement les capacités des premières personnes à l'avoir accompli ».
D'après l'auteur, le recul de la période de migration des hommes suggère que les pionniers n'auraient pas été en conflit direct avec d'autres hominidés et animaux au point que l'on imaginait. Selon des études précédentes, cette arrivée aurait coïncidé avec l'extinction de nombreuses espèces. La migration des hommes a également été attribuée au déclin de l'Homme de Neandertal.
Afin de remettre dans son contexte l'importance de ce délai de 18 000 ans dans la compréhension de l'histoire des communautés autochtones de l'Australie, le Sydney Morning Herald a eu recours à une comparaison : si la culture aborigène datait de 24 heures, les Blancs ne seraient présents sur le continent que depuis cinq minutes.
L'équipe d'archéologues de l'université du Queensland a obtenu l'autorisation de mener des fouilles dans la région par l'association à but non lucratif Gundjeihmi Aboriginal Corporation. Les peuples aborigènes Mirrar conservent toutefois un droit de supervision sur l'ensemble des travaux effectués sur leurs terres ainsi qu'un droit de veto.