C'est officiel : le tombeau de Toutânkhamon ne cache pas de chambre secrète

La troisième étude radar du site funéraire montre de manière concluante que ces murs ne renferment pas d'autres mystères.

De Kristin Romey
Publication 7 mai 2018, 10:37 CEST

Les autorités égyptiennes ont annoncé hier, dimanche 6 mai, que la récente étude radar de la tombe de Toutânkhamon prouvait de manière concluante qu'il n'y avait pas de chambres ou de passages secrets derrière les murs de la chambre funéraire du célèbre pharaon, située dans la Vallée des Rois.

La déclaration a été faite au nom de Mostafa Waziri, Secrétaire général du Conseil suprême des antiquités, lors de la Quatrième Conférence internationale de Toutânkhamon, tenue au Grand Musée égyptien à Gizeh.

L'issue de cette enquête commencée il y a trois ans est quelque peu décevante. L'égyptologue et boursier National Geographic Nicholas Reeves menait cette investigation depuis plusieurs années, persuadé que la tombe de la légendaire reine Néfertiti était cachée derrière les murs du tombeau de Toutânkhamon, vieux de 3 300 ans.

Deux enquêtes antérieures, basées elles aussi sur le postulat de l'existence de chambres secrètes, avaient eu recours au radar à pénétration de sol (RPS) pour déceler la présence de chambres ou de passages secrets. Elles non plus n'avaient pas pas été concluantes.

La troisième et dernière enquête, menée plus tôt cette année avec le soutien de la National Geographic Society, est une mission scientifique placée sous la direction de l'université polytechnique de Turin. Cette nouvelle recherche est considérée comme la plus complète jamais menée à ce jour.

Le rapport scientifique présenté samedi par Porcelli à Waziri et Khaled El Enany, ministre égyptien des Antiquités, se termine par cette déclaration : « Nous concluons, avec un très haut niveau de confiance, que l'hypothèse concernant l'existence de chambres cachées adjacentes à [...] la tombe de Toutânkhamon n'est pas confirmée par les données RPS. »

 

VOIR L'INVISIBLE

Le radar à pénétration de sol, une technique de télédétection couramment utilisée pour la prospection de pétrole et de gaz naturels, est un outil de plus en plus essentiel aux recherches archéologiques. Il leur permet de détecter les vides artificiels dans la terre, tels que les tombes et les passages secrets, sans endommager inutilement les sites antiques particulièrement fragiles.

Depuis que l'archéologue Howard Carter a mis au jour le tombeau dans la Vallée des rois, à Louxor en 1922, les experts pensent que l'espace est étrangement petit pour la sépulture d'un pharaon. Diverses théories sur le tombeau ont été émises au cours des décennies suivantes, mais en 2015 l'égyptologue Nicholas Reeves a formulé une hypothèse étonnante : les murs nord et ouest pourraient cacher la momie et les fabuleuses possessions de la belle-mère de Toutânkhamon, la légendaire reine Néfertiti. 

Deux précédentes études du tombeau avec le radar à pénétration de sol ont été conduites en 2015 et 2016, avec des résultats divergents. Cette troisième étude des lieux avec le RPS a été commandée par le ministre des antiquités Khaled El Enany sur la recommandation des experts qui ont étudié les résultats des deux précédents scans. Cette nouvelle enquête avait pour but de clarifier ces résultats et vérifier s'il existait bien des espaces vides derrières ces murs.

 

VÉRIFIER TOUTES LES HYPOTHÈSES

Le rapport soumis aux autorités égyptiennes hier comprend les résultats de trois nouveaux scans RPS, menés en février 2018 par trois équipes indépendantes et utilisant chacune une fréquence différente : haute, moyenne et faible. Le radar à haute fréquence peut fournir des résultats détaillés jusqu'à des distances d'environ 2,13 mètres de profondeur ; les basses fréquences pénètrent quant à elles plus profondément le sol mais donnent des résultats plus grossiers.

Les équipes de recherche de l'Université Polytechnique de Turin en Italie, en partenariat avec l'Université de Turin et deux sociétés privées, Geostudi Astier et 3DGeoimaging, ont travaillé sept jours durant et ont recueilli des données équivalentes à 2,57 kilomètres de surface.

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    Après que les experts ont interprété leurs données radar séparément, ils se sont réunis pour comparer leurs résultats.

    « La découverte, c'est qu'il n'y a aucune preuve de portes ou d'espaces vides au-delà de la chambre funéraire, à environ quatre mètres », explique Porcelli à National Geographic.

    « C'est décevant, mais c'est le résultat de cette recherche, concluant de notre point de vue », ajoute-t-il.

     

    SIGNAUX FANTÔMES

    Porcelli émet l'hypothèse que les précédentes anomalies radar détectées dans la chambre funéraire de Toutânkhamon qui ont passionné les égyptologues, les laissant spéculer que la tombe de Néfertiti pouvait se trouver cachée derrière ces murs, étaient le résultat de « signaux fantômes » - des réflexions radar spontanées provenant des murs, et non d'une cavité cachée.

    Dans des conditions normales, une antenne RPS envoie des ondes radar directement à travers un mur et ils rebondissent tout droit vers le récepteur, fournissant un signal très clair. Mais il semble qu'à certains endroits de la chambre funéraire du célèbre pharaon, les ondes radar n'ont pas pénétré les murs, mais ont plutôt voyagé le long des murs avant de retourner au récepteur.

    Les chercheurs soupçonnent le plâtre peint couvrant la roche calcaire de la chambre funéraire d'avoir des propriétés lui permettant de conduire l'électricité.

    « La roche elle-même pourrait avoir des propriétés qui expliquent ce phénomène, » explique Porcelli.

    Les chercheurs ajoutent que d'autres signaux fantômes ont pu provenir du sarcophage de Toutânkhamon fait de quartzite, une roche siliceuse massive, constituée de cristaux de quartz soudés, qui occupe le centre de la chambre funéraire.

     

    UNE EFFICACITÉ PROUVÉE

    Si les résultats de cette nouvelle enquête ne confortent pas l'idée initiale d'une chambre funéraire cachée consacrée à Néfertiti, Porcelli tend à penser que ce projet a tout de même démontré l'efficacité du RPS. C'est un élément important quand on sait que beaucoup d'égyptologues considèrent encore cette technologie avec défiance et scepticisme, malgré les résultats remarquables obtenus sur de nombreux sites antiques partout dans le monde.

    « Cette technologie est sans doute plus efficace et moins invasive que les formes d'archéologies traditionnelles, » conclut-il.

    Fredik Hiebert, archéologue résident de la National Geographic Society, abonde lui aussi dans ce sens. « C'est le premier projet RPS concluant mené dans la Vallée des Rois. Cela confirme la technique utilisée ainsi que l'étendue du travail qui peut être mené en Égypte. »

    « C'est peut-être décevant, mais la science prime sur le rêve. »

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