Une hache vieille de 1.4 million d’années découverte en Éthiopie
Une équipe de chercheurs a mis au jour une hache fabriquée à partir d’un os d’hippopotame dans la formation de Konso, dans le sud de l’Éthiopie. Cette découverte exceptionnelle nous donne à voir le quotidien de nos ancêtres.
La hache mesurant 13 centimètres de long a été déterrée de la formation de Konso, dans le sud de l'Éthiopie
« À ma connaissance, seules les formations d’Olduvai et de Konso ont livré des outils de cette période en Afrique de l’Est, et leur nombre ne s’élève qu’à 37 » affirme Raphaël Hanon, docteur du Muséum National d’histoire naturelle en archéozoologie de Paris.
C’est une découverte rare que des paléoanthropologues révèlent dans un article publié dans le journal Proceedings of the National Academy of Sciences of the United States of America : une hache fabriquée à partir d’un fémur d’hippopotame. Cet outil lithique extrêmement bien conservé, découvert dans la formation de Konso au sud de l’Éthiopie par le paléoanthropologue de l'Université de Tokyo Gen Suwa et ses collaborateurs japonais, éthiopiens et hongkongais, porte la trace d’au moins 44 traces de cicatrices en écailles, preuve d’un écaillage délibéré et sophistiqué.
Cette hache en os apporte la preuve qu'à Konso, non seulement en technologie lithique, mais aussi en modification osseuse, les individus présents étaient suffisamment qualifiés pour fabriquer et utiliser un objet tranchant durable. « La hache est fabriquée avec sophistication, comme en témoigne, par exemple, le grand nombre de petits extractions latérales corticales bien contrôlées pour former la forme d'une hache » expliquent les chercheurs dans leur publication.
Cet outil serait vieux d’au moins 1.4 million d'années mais il est difficile en revanche d’attribuer la production et l’utilisation de cet outil en os à Homo erectus car une autre espèce, Paranthropus boisei, vivait dans la même région à la même période. « Le débat reste ouvert quant aux auteurs probables de ces outils » affirme Raphaël Hanon.
De fait, la technique d’écaillage sophistiqué utilisée sur cet outil est très rarement observée sur des os au profit de la pierre. Comment les chercheurs ont déterminé de quel os il s’agissait ? Les possibilités : humérus, fémur, tibia et métapodiens provenant de grands mammifères herbivores comme des bovidés, des éléphants, des girafes ou des hippopotames.
« En comparant la structure interne de l’os spongieux, l’épaisseur de l’os cortical, en estimant le diamètre originel de l’os et en observant la présence de caractères anatomiques spécifiques ils ont pu être en mesure d’attribuer l’os à la partie proximal d’un fémur d’hippopotame » explique Raphaël Hanon. Les chercheurs ont également utilisé une technique nommée tomographie à rayon X, technique permettant une reconstitution tridimensionnelle d’une partie à identifier.
La tomographie à rayon X utilisée par les chercheurs permet de réaliser une reconstitution 3D d'une partie du corps que l'on souhaite observer.
Les chercheurs rencontrent des difficultés quant à l’interprétation des fonctions de cet outil ; les auteurs de la publication, eux, émettent l’hypothèse que ce biface a pu être utilisé pour découper de la viande.
Quant à son utilisation pour la chasse « compte tenu de la morphologie générale de la pièce, il est difficile d’envisager qu’il s’agissait d’une arme pour la chasse. Nous ne pouvons en revanche pas exclure que les outils avaient plusieurs fonctions, à l’image d’un '' couteau suisse préhistorique'', et qu’ils étaient utilisés pour la découpe de carcasses animales ainsi que pour la découpe de végétaux » conclut le docteur Hanon.