Quatre choses que vous ignorez (sans doute) sur Thanksgiving
Le quatrième jeudi de novembre, les États-Unis fêtent Thanksgiving, célébrant les Pères pèlerins et le repas qu'ils auraient partagé en 1621 avec les Wampanoag. Point historique sur un repas qui relève en grande partie du mythe.
Cette gravure représente les pèlerins débarquant du Mayflower à Plymouth Rock, en 1620. En réalité, la première mention écrite de Plymouth Rock remonte à 1835.
Lorsque les pèlerins descendus du Mayflower et les Wampanoag se réunirent pour le premier Thanksgiving en 1621, ce n'était pas vraiment un événement. Sans doute tout au plus la traditionnelle célébration anglaise paysanne durant laquelle on remerciait le ciel pour les bienfaits que l’on avait pu recevoir pendant l’année. Le traité de paix que les parties avaient conclu sept mois plus tôt, et qui fut observé cinquante ans durant, est lui plus important - et pourtant on s'en souvient moins.
« Il y a en fait très peu de documents historiques sur le premier Thanksgiving, c'est pourquoi Thanksgiving n'a pas été vraiment célébré comme un jour férié jusqu'au 19e siècle », indique Charles C. Mann, auteur de 1491: Nouvelles révélations sur les Amériques avant Christophe Colomb. « Pour les historiens, il est ironique que la réunion soit maintenant plus importante que le traité lui-même. »
Le président Abraham Lincoln fit de Thanksgiving une fête nationale pendant la guerre de Sécession, et depuis, c'est une tradition américaine très observée. Pourtant, l'histoire des Wampanoag et des pèlerins rompant le pain pour la première fois n'est pas connue.
Retour historique sur un repas qui relève en grande partie du mythe.
1. CE N'ÉTAIT PAS VRAIMENT UN « THANKSGIVING »
En 1841, l'éditeur Alexander Young fit imprimer un livre contenant une lettre du pèlerin Edward Winslow, qui décrivait ainsi la fête :
« [Notre] moisson étant entamée, notre gouverneur a envoyé quatre hommes chercher des volailles, afin que nous puissions, d'une manière plus festive, nous réjouir ensemble... [Il y avait] beaucoup d'Indiens qui venaient nous rejoindre, dont leur plus grand chef Massasoit, avec quelque quatre-vingt-dix hommes, que nous avons divertis et avec qui nous avons festoyé pendant trois jours. »
Chez les pèlerins du XVIIe siècle, « Thanksgiving » était en fait une période de jeûne et de prière, et Winslow n'utilisa le mot nulle part dans sa lettre. Mais quand Young publia la lettre, il l'appela le « premier Thanksgiving » dans une note de bas de page, et le nom est resté.
Le pèlerin Edward Winslow rend visite à Massasoit, le Sachem des Wampanoag.
2. UN AN AVANT LE PREMIER THANKSGIVING, LES PÈLERINS AVAIENT PROFANÉ DES TOMBES AMÉRINDIENNES
Lorsque les pèlerins sont arrivés à Cape Cod, ils étaient incroyablement mal préparés. « Ils étaient convaincus que la Nouvelle-Angleterre étant au sud des Pays-Bas et de l'Angleterre, il y ferait plus chaud », explique Mann. « Mais ils sont arrivés six semaines avant l'hiver avec très peu de vivres. »
Désespérés, les pèlerins volèrent le maïs entreposé dans les tombes et réserves amérindiennes peu après leur arrivée. Cela ne suffit pas, leur manque général de préparation causa leur perte : la moitié d'entre eux moururent l'année suivante. Pour apprendre à cultiver de manière durable, ils eurent besoin de l'aide de Tisquantum, un Amérindien anglophone qui vivait avec les Wampanoag.
3. LES PÈLERINS N'ONT PU S'INSTALLER À PLYMOUTH QUE PARCE QUE DES MILLIERS D'AMÉRINDIENS ONT ÉTÉ DÉCIMÉS PAR DES ÉPIDÉMIES
Si les pèlerins étaient arrivés à Cape Cod trois ans plus tôt, ils n'auraient peut-être pas trouvé ces tombes et ces entrepôts abandonnés… en fait, ils n'auraient peut-être pas trouvé assez de terres pour s'installer.
Les Européens qui naviguèrent vers la Nouvelle-Angleterre du début au milieu des années 1610 rencontrèrent de nombreuses communautés le long de la côte et n'eurent que peu de place pour installer leurs campements. Pourtant en 1620, lorsque le Mayflower jeta l'ancre, la zone semblait abandonnée.
« Quelques années auparavant, il y avait eu une épidémie qui avait anéanti la majeure partie de la population côtière de la Nouvelle-Angleterre, et Plymouth était au sommet d'un village qui avait été décimé par la maladie », dit Mann. « Les pèlerins ne le savaient pas, mais ils ont emmenagé dans un cimetière », ajoute-t-il.
4. LE TRAITÉ QUI A CONDUIT AU PREMIER THANKSGIVING AVAIT POUR BASES LE COMMERCE ET LES RIVALITÉS TRIBALES
Avant que les Wampanoag ne soient décimés par la maladie, ils avaient chassés des Européens comme John Smith. Selon Charles C Mann, « les Wampanoag [étaient] très affaiblis par la maladie, et beaucoup plus faibles que leurs ennemis, les Narragansett.
Ann McMullen, conservatrice au National Museum of the American Indian, institution américaine consacrée à l'histoire, la culture et les arts des Indiens nord-américains, indique que les Wampanoag ne cherchaient pas nécessairement à faire des alliances contre les Narragansett, mais « parce que les Wampanoag étaient dans une position de faiblesse », ils réalisèrent qu'une alliance avec les pèlerins « pourrait les mettre en position de force. »
Les Européens étaient de précieux partenaires commerciaux pour les Wampanoag et d'autres Amérindiens de la région, car ils échangeaient des couteaux et des haches en acier contre des peaux de castors - que les Wampanoag, dans la Nouvelle-Angleterre qui abritait beaucoup de castors, considéraient comme sans valeur.
« C'est un peu comme si quelqu'un venait à votre porte et disait "Je vous donnerai de l'or si vous me donnez une pierre" », dit Mann. De plus, « les Wampanoag pensaient : si nous nous lions à ces hommes, tout le monde hésitera à nous attaquer. »
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.