Double drame : Jackie Kennedy était déjà en deuil avant de se rendre à Dallas
En 1963, Jackie Kennedy passa plusieurs mois loin des yeux du public après la mort de son fils, Patrick Bouvier Kennedy, deux jours seulement après sa naissance. Un drame en chassa bientôt un autre, en novembre de la même année.
Le Président John Fitzgerald Kennedy et la Première dame, Jackie Kennedy, arrivent à San Antonio dans le cadre d’une tournée de trois jours dans l’État du Texas. C’était la première fois depuis des mois, et depuis la mort de son fils quelques heures après sa naissance, que la Première dame faisait une apparition publique.
Le 7 août 1963, la Première dame des États-Unis, Jackie Kennedy, accompagna sa fille Caroline à une leçon d’équitation dans les environs de Cape Cod, dans le Massachussetts. D’après le témoignage de Paul Landis, agent du Secret Service, aussitôt arrivée, la Première dame a su que quelque chose n’allait pas. Elle lui aurait demandé de rentrer « immédiatement ».
Alors enceinte, Jackie Kennedy accoucha avec près de six semaines d’avance. Malgré les tentatives désespérées de sauver la vie de son fils, Patrick Bouvier Kennedy, celui-ci mourut deux jours après être né.
Les jours, les semaines et les mois qui suivirent furent douloureux pour Jackie Kennedy autant que pour John Kennedy, qui venaient de vivre à la fois la naissance et la mort de leur enfant. Tous deux ignoraient toutefois l’effet que les événements d’août 1963 allaient avoir sur leur relation. Ce drame a renforcé le lien qui les unissait. Mais quelques mois plus tard à peine, l’assassinat du Président les a séparé à jamais.
LA MORT DE PATRICK
La mort de Patrick ne fut pas la première à marquer la famille. En 1955, Jackie Kennedy a fait une fausse-couche et en 1956, elle a donné naissance à une fille mort-née, Arabella. Caroline et John Jr. virent quant à eux le jour en 1957 et 1960, respectivement.
Le 7 août 1963, alors que se manifestaient les signes d’un accouchement prématuré, la Première dame a été transportée par hélicoptère vers l’Otis Air Force Base. Puisqu’elle avait également donné naissance à leur fils John Jr. de manière prématurée, des mesures de précaution avaient été prises à Otis. En outre, sur demande expresse du Président, son obstétricien, John Walsh, et la médecin de la Maison-Blanche, Janet Travell, étaient présents à Cape Cod.
Alors que la Première dame recevait des soins médicaux, le Président fut informé à 11h30 que le travail venait de commencer. Peu après 13 heures, alors que le Président était encore en route, Patrick vint au monde après une césarienne d’urgence. Le bébé, qui pesait 2,1 kg, fut placé dans une couveuse car le personnel médical était préoccupé par sa respiration.
L'état de Patrick imposa un transfert au Children’s Hospital de Boston en compagnie du Président. La Première dame resta à Otis. Les tentatives de sauver Patrick furent vaines : il mourut à 4h44 le 9 août. Jackie Kennedy fut informée de son décès peu après, et le Président retourna au chevet de sa femme à Otis.
La Première dame n’assista pas aux funérailles de son fils, car elle était encore convalescente après l’intervention chirurgicale qu’elle avait subie. Après sa sortie de l’hôpital, la Première dame retourna au Kennedy Compound, le domaine familial, à Hyannis Port.
À la fin du mois d’août ou au début du mois de septembre, elle demanda à l’agent des services secrets Clint Hill s’il souhaitait l’accompagner en Grèce. Elle lui dit qu’elle s’y rendait avec sa sœur, Lee Radziwill, et le mari de celle-ci, le diplomate et prince polonais Stanislaw Albrecht Radziwill. Le groupe passerait quelques semaines sur le yacht d’Aristote Onassis et traverserait les îles grecques. Le Président approuva l’idée de ce voyage, malgré les inquiétudes de son équipe quant aux possibles répercussions politiques. La Première dame partit le 1er octobre 1963.
Jackie Kennedy se rendit en Grèce et au Maroc puis revint à Washington le 17 octobre 1963. Encore endeuillée, la Première dame mit un point d’honneur à souligner que son époux était « particulièrement gentil et compréhensif » lors d’un dîner entre amis organisé à son retour. Le Président la taquina en disant : « Peut-être que maintenant tu voudras bien venir avec nous au Texas le mois prochain ». À la suite de cet épisode, elle écrivit dans son agenda qu’elle prendrait effectivement part au voyage.
LE VOYAGE VERS DALLAS
Durant les semaines qui précédèrent la visite au Texas, la Première dame consacra le plus clair de son temps à la nouvelle résidence familiale, Wexford, construite près de Middleburg, en Virginie. Elle remplit également des fonctions de représentation dans la capitale et le 13 novembre, elle fit sa première apparition publique depuis un certain temps à l’occasion d’un événement organisé à la Maison-Blanche.
Lors d’une conversation téléphonique avec son amie Letitia Badlridge qui eut lieu autour de cette date, la Première dame lui dit : « Je vais en campagne au Texas avec Jack la semaine prochaine, et j’y vais parce que tel est mon bon plaisir. » Letitia Baldrige décela un « ton d’authentique bonheur » dans la voix de Jackie, et elle déclara que c’est ainsi qu’elle « sut instantanément que son mariage allait bien ».
D’autres personnes de l’entourage de Mrs. Kennedy et du Président affirmèrent que leur relation était au beau fixe. Clint Hill indiqua que la mort de Patrick « avait tout changé » et que « les autres agents et moi-même avons remarqué que leur relation était nettement plus soudée et ouvertement exprimée ». Pierre Salinger, porte-parole de la Maison-Blanche, témoigna de cela : « La Maison-Blanche a resserré les liens qu’il y a entre eux, a donné lieu à une compréhension mutuelle plus vaste. La mort de leur bébé les a encore plus rapprochés. »
Lors des préparatifs pour son voyage au Texas en novembre 1963, Jackie Kennedy dressa une liste d’objets à emporter sur laquelle figuraient notamment ses bijoux et sacs à main favoris. Ce voyage s’annonçait comme une sorte de renouveau pour la Première dame, qui n’avait pas effectué de déplacement depuis la mort de son fils quelques mois auparavant. Il s’agissait d’une sortie tout aussi importante pour John Kennedy, qui briguait un second mandat présidentiel.
Selon Clint Hill, si la Première dame n’était pas férue de politique, elle était toutefois déterminée à « faire tout son possible » pour aider son mari à être réélu. Le Texas était une halte cruciale dans la campagne, car le Président n’avait remporté l’État que par une faible marge en 1960. Il était convaincu qu’avoir la Première dame à ses côtés lui permettrait de s’attirer des électeurs potentiels.
Le dévouement de Jackie Kennedy envers son mari n’était pas nouveau, mais leurs rapports avaient changé depuis la mort de Patrick. La grossesse semblait même avoir donné un nouveau souffle à leur relation. Quand le Président et la Première dame s’envolèrent pour le Texas le 21 novembre 1963, leur relation était empreinte d’optimisme. Cet optimisme vis-à-vis de leur mariage n’était pas sans rappeler l’espoir général suscité dans le monde entier par l’avenir politique de John Kennedy.
On ne saura toutefois jamais combien de temps et dans quelle mesure cette proximité entre les époux Kennedy se serait maintenue. Peu après midi, le lendemain, John Kennedy fut assassiné alors qu’il traversait le centre-ville de Dallas au sein d’un cortège motorisé. Malgré le traumatisme lié au décès de son mari, Jackie Kennedy se montra digne et fit preuve d’une élégance qui aida la nation à faire son deuil. Elle devint un symbole des occasions manquées mais également un exemple de persévérance.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.