Découverte d'une épée de chevalier croisé vieille de 900 ans au large d'Israël
Fin octobre, alors qu’il nageait dans les profondeurs de la Côte du Carmel en Israël, un nageur a fait la découverte d’une épée d’un mètre de long, datant probablement de l’époque des Croisades, selon les premières analyses.
Au moment de la construction de la ville vers l'an 22 av. J.-C., le port judéen de Césarée, situé sur la côte méditerranéenne de l'actuel Israël, ne disposait d'aucune source d'eau douce. Le roi Hérode a fait bâtir cet aqueduc romain afin d'approvisionner la ville de l'eau des sources du mont Carmel, situé à environ 16 kilomètres.
Shlomi Katzin, résident de la municipalité d’Atlit se situant en bord de mer au pied du Mont Carmel, a détaillé aux autorités locales la manière dont il a découvert l’objet historique. Selon le média local Ha’Aretz, la Méditerranée souffre de la surpêche, de la pollution et du changement climatique et l'on y observerait que très peu de poissons.
C’est pourtant là-bas que Katzin a décidé d’aller plonger et qu’il a découvert l’épée au milieu d’autres artefacts, grâce à un mouvement d’eau qui a déplacé le sable. L'Autorité israélienne des antiquités (AIA) a confirmé la trouvaille sans spécifier exactement le lieu pour éviter le vol d’antiquités encore sous l’eau.
L’épée, dont le manche mesure trente centimètres, est recouverte de coquillages et de coraux et est dans un état de conservation remarquable. Le responsable de l’AIA exprime son engouement pour cette mise au jour, précisant qu’il s’agit là « d’une rare et magnifique découverte qui, selon toute évidence, appartenait à un chevalier croisé ».
UN LIEU DE PÈLERINAGE DEVENU SITE ARCHÉOLOGIQUE
Le site de mouillage était déjà connu des archéologues depuis le mois de juin. Selon Ha’Aretz, des ancres en pierre, en fer et autres artefacts y avaient été mis au jour, et datés de différentes époques, de l’âge de bronze à l’époque byzantine en passant par l’époque romaine. Le chef de l’unité d’archéologie marine de l’AIA explique que de nombreuses criques naturelles servaient autrefois de refuges aux marins pendant les tempêtes, tout au long de la Côte du Carmel.
« Le Mont carmel est un lieu de pèlerinage pour les chrétiens […]. Là-bas, on est près d’Acre. C’est le grand port commercial des croisés, des Latins, des communautés italiennes, génoises, vénitiennes qui s’y sont installées. C’est le grand port des chrétiens d’Orient » explique Martin Aurell, historien médiéviste.
Afin de mieux comprendre la période à laquelle cette épée a probablement été maniée, il faut différencier les croisés et les Latins. « Les croisés sont ceux qui partaient se battre pendant quelques années en Terre sainte. Eux avaient une chance sur trois de mourir et deux chances sur trois de revenir en Occident ». D’un autre côté, il y a le peuple latin, descendants de croisés vivant en Terre sainte depuis deux voire trois générations, ils sont surnommés péjorativement les « Poulains » indique Martin Aurell.
Image tirée d'une vidéo de l'épée découverte en Israël, diffusée par EuroNews.
UNE ORIGINE ENCORE FLOUE
Les avis divergent quant à la provenance de cette épée. Avant que des analyses par scanner soient faites, les chercheurs proposent déjà plusieurs interprétations. Les dimensions de l’épée seraient caractéristiques des armes de croisés.
Elle aurait pu appartenir aux forces musulmanes, mais ces dernières sont arrivées par la terre. Selon Kobi Sharvit, qui dirige l'unité d'archéologie marine de l'Autorité israélienne des antiquités, l’épée, pesant près d’un kilo, n’a pas pu être déposée par un guerrier musulman sur le rivage puis emportée sur 200 mètres dans l’eau.
« Une fois que l’on aura enlevé les scories, les coraux, le sable, la boue, les coquillages, on pourra voir plusieurs choses à l’intérieur. D’abord, j’ai lu que c’était une épée en fonte. La fonte implique que l’on ait des fourneaux qui puissent chauffer jusqu’à 1 300 °C. Or, avant les années 1320, c’est-à-dire après la conquête d’Acre par les musulmans et la fin de la présence croisée ou latine en Palestine, on ne sait pas faire la fonte » explique Martin Aurell. L’Occident n’était alors pas connu pour faire des armes dans des métaux de qualité, contrairement à l’Orient.
« Tout l’enjeu est d’obtenir une haute teneur en carbone dans les épées, ce qui permet de passer du fer à l’acier. Les lingots de Wootz provenant d’Inde, importés du côté de Damas surtout, sont bien supérieurs à ceux que l’on peut avoir en Occident. Il y a une fascination pour les épées orientales ».
Selon le chercheur, des inscriptions pourraient avoir été laissées dans la lame de l’épée. Si c’était le cas, cela fournirait des informations très précises sur sa provenance. « Si la langue de ces inscriptions est arabe ou latine, ça change tout ».
Certaines citations pourraient confirmer l’appartenance de l’épée à un croisé. « Il y a par exemple le verset du psaume 143 que les chrétiens aimaient beaucoup graver "Béni soit l'Eternel, mon rocher, qui exerce mes mains pour le combat, mes doigts pour la bataille." ».
Aujourd’hui dans les mains du département des trésors nationaux, l'épée sera analysée et nettoyée par les scientifiques, avant d'être exposée au public.