La mort de Napoléon, la fin d’une époque tumultueuse
Après avoir soigneusement étudié la période d’exil de Napoléon, le peintre Charles de Steuben a représenté le lit de mort de l’empereur et les témoins de son dernier souffle en mai 1821.
Mort de Napoléon, 1828 de Charles de Steuben. Napoleonmuseum, château d’Arenenberg, Suisse
Napoléon Bonaparte s’éteignit le 5 mai 1821 sur l’île de Sainte-Hélène, située dans l’Atlantique Sud. Il était considéré comme un despote aux yeux de la coalition britannique, hollandaise et prussienne, qui l’avait exilé là-bas en 1815. Pour les Français, il restait un fervent défenseur des Lumières.
Au cours de la décennie qui suivit son décès, l’image de Napoléon en France évolua. La monarchie fut rétablie, mais vers la fin des années 1820, la popularité de ce régime était à nouveau en berne. Le roi Charles X était considéré comme une menace aux libertés civiles établies lors de l’ère napoléonienne. Cette défiance raviva l’enthousiasme pour l’empereur et lui conféra une image plus héroïque.
Charles de Steuben, un peintre d’origine allemande résidant à Paris, était fasciné par la mort du célèbre dirigeant français. C’est ce qui le poussa à immortaliser cet instant. Son tableau représente le décès de Napoléon et cherche à traduire le sentiment d’effroi qui régnait lors de la veillée funèbre.
Napoléon s’auto-proclama Premier consul de la République en 1799 puis devint empereur des Français en 1804. Au cours de la décennie qui suivit, il conduisit la France à affronter de nombreuses coalitions européennes, désormais appelées guerres napoléoniennes. Il étendit son empire sur une grande partie de l’Europe continentale avant sa défaite en 1814. Il fut envoyé en exil sur l’île d’Elbe dans la Méditerranée mais réussit à s’échapper. Il reprit brièvement le contrôle avant son ultime défaite écrasante lors de la bataille de Waterloo en 1815.
La Longwood House sur l’île de Sainte-Hélène a été la dernière résidence de Napoléon, de 1815 jusqu’à sa mort le 5 mai 1821.
Les prouesses militaires de Napoléon lui valurent la crainte de ses ennemis mais ses réformes civiles en France lui garantirent le respect de son peuple. Le Code napoléonien, aujourd’hui le Code civil, fut introduit en 1804. Il remplaçait l’ensemble confus de lois déjà existantes par un système national uniformisé basé sur les principes des Lumières. Il garantissait le suffrage universel masculin, les droits de propriété, l’égalité masculine et la liberté de religion.
Même au cours de son exil à Sainte-Hélène, Napoléon semblait dégager une puissance magnétique. Les passagers des navires à quai pour se réapprovisionner se pressaient pour rencontrer l’empereur. Il réussit à nouer des liens forts avec la coterie qui l’avait accompagné lors de son exil. Bien que certaines rumeurs parlent d’un assassinat, la plupart des historiens s’accordent à dire que la mort de Napoléon, survenue en 1821 alors qu’il avait 51 ans, est due à un cancer de l’estomac.
UN DEUIL ÉTOUFFÉ
Charles de Steuben naquit en 1788 d’un père officier dans l’armée. Il grandit et développa son éducation artistique de concert avec l'arrivée au pouvoir de Napoléon. Ses œuvres les plus célèbres représentent certains des moments-clés de l’impressionnante carrière militaire de l’empereur.
Grâce à ses contacts haut placés au sein du cercle proche de Napoléon, le peintre interrogea et illustra la plupart des personnes présentes autour du lit de mort dans la Longwood House à Sainte-Hélène. Après avoir minutieusement étudié le mobilier de la pièce ainsi que sa disposition, il composa avec soin la scène de deuil étouffé qui prenait place dans la chambre. Parmi les personnages figurait notamment le général Henri-Gatien Bertrand. Il suivit avec loyauté Napoléon lors de son exil, accompagné de sa femme Fanny et ses enfants, pour qui Napoléon avait une grande affection.
La version la plus célèbre de la Mort de Napoléon fut achevée en 1828. Stendhal considérait le tableau comme un « chef-d’œuvre d’expression ». En 1830, l’établissement d’une monarchie plus libérale dans le pays renforça l’admiration pour Napoléon. Il devint une figure populaire du théâtre, des arts et de la musique. Cet engouement entraîna la diffusion de la représentation de son lit de mort par Charles de Steuben dans toute l’Europe.
L’écrivain François-René de Chateaubriand écrivit que Napoléon possédait « le souffle de vie le plus puissant qui jamais anima l’argile humaine », vision majestueuse reflétée dans le chef-d’œuvre de reconstruction historique de Steuben. Aujourd’hui, il repose au Napoleonmuseum, au sein du château Arenenberg en Suisse. Il s’agit de la demeure qui fut autrefois celle d’Hortense, la belle-fille de l’empereur.
Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.