Le mystérieux trésor découvert dans le massif du Mont-Blanc vient d'être partagé
En 2013, un alpiniste a découvert des pierres précieuses dans une boîte rouillée sur les hauteurs de Chamonix. En décembre 2021, la ville et le découvreur ont partagé les précieuses trouvailles, chargées d’un passé dramatique.
LE MASSIF DU MONT-BLANC : EN RAQUETTES OU EN CORDÉE. Les domaines skiables du massif du Mont-Blanc, qui comptent les pistes les plus hautes de France, peuvent être praticables jusqu’à début mai selon les années et les conditions d’enneigement. Pour ceux qui préfèrent la marche à la glisse, les options ne manquent pas pour découvrir les célèbres montagnes. Le pays du Mont-Blanc compte 65 itinéraires en raquettes, qui couvrent 320 km sur 14 communes, adaptés à tous les niveaux. À Chamonix, les débutants pourront faire entre autres la boucle des Tines, un circuit d’un peu plus d’une heure avec vue sur les Drus et la mer de Glace, deux des paysages les plus emblématiques du massif. Les randonneurs un peu plus aguerris opteront pour la boucle du glacier des Bossons, une majestueuse cascade de glace qui descend du sommet du Mont-Blanc. Pour une aventure associant effort sportif et découverte approfondie du milieu, partez avec un membre de la compagnie des guides de Chamonix. La mythique institution, qui fête son bicentenaire cette année, propose un large éventail de circuits de randonnées et d’alpinisme.
Janvier 1966. Un Boeing 707 affrété par Air India décolle de Bombay en direction de New-York. Il doit survoler Genève, puis Londres. Mais le vol ne se passe pas comme prévu. L’engin percute le sommet du Mont Blanc et s’y écrase, emportant dans sa chute les 117 passagers à bord.
Près de 50 ans plus tard, un alpiniste français a découvert un trésor sur le glacier des Bossons, zone où a eu lieu le crash.
« C’était une boite métallique qui a été évidemment tordue et rouillée avec le temps mais qui a conservé ce qui était à l’intérieur. Les pierres étaient elles-mêmes dans des petits sachets, ceux qui sont utilisés par les joailliers et les bijoutiers. Il y avait un nombre important d’émeraudes et de saphirs, des pierres caractéristiques de la joaillerie indienne de cette époque » témoigne le maire de la ville de Chamonix, Éric Fournier. « Il y a huit ans, la personne s’est rendue directement en gendarmerie, pour faire part de sa découverte. […] Ensuite, c’est la gendarmerie qui a pris contact avec nous, pour que nous les mettions pendant ces huit années dans un coffre que l’on a loué dans une banque de Chamonix. Le dépôt s’est fait en présence des gendarmes ».
Après la découverte de ce mystérieux trésor, huit années sont passées. Huit ans de recherches et d’enquête pour comprendre et retrouver l’origine et l’héritier ou héritière de ces pierres. Les autorités en chargent des recherches ont entendu les témoignages de nombreuses personnes, prétendant être l’héritier.ère du trésor, selon les dires du maire de la ville. « Certaines réclamations sont arrivées en mairie. Des personnes qui disaient que c’était leur grand-père ou l’oncle de je-ne-sais-qui, qui lui aurait confié les pierres. Nous, on envoyait cela aux responsables en charge des investigations, au niveau de l’État. Ils tranchaient ensuite de leur côté. Il est très probable que le propriétaire des pierres était un Indien ou une personne férue de pierres précieuses, comme […] les pierres découvertes et les emballages en témoignent ».
Récemment, la mairie de Chamonix et le découvreur initial du trésor ont été avertis qu’aucun témoignage cohérent n’avait été retenu. Ainsi, les autorités de justice ont tranché pour un partage égal entre l’alpiniste de 28 ans et le propriétaire du sol sur lesquels les pierres ont été découvertes.
« Nous sommes retournés chercher les pierres avec deux experts en gemmologie reconnus, qui avaient été nommés par le découvreur et nous-mêmes, pour les sortir du coffre. Les experts les ont examinées, ils les ont réévaluées et ont fait deux lots de tailles identiques. Il y a ensuite eu un tirage au sort pour déterminer qui prendrait quel lot » raconte Eric Fournier à National Geographic.
UN BUTIN DE 300 000 EUROS
Les experts ont évalué ces pierres selon différents critères afin d’estimer leur valeur et de les distribuer aux désignés nouveaux propriétaires. Éric Fournier indique que les joyaux retrouvés dans cette boîte métallique n’étaient pas « des pierres d’une qualité exceptionnelle, en témoigne le montant global de l’évaluation. Parfois, une seule d’entre elles peut valoir beaucoup plus que ça ». Chaque partie a reçu un lot de pierres estimé à 150 000 €. Deux experts ont effectué une expertise contradictoire et sont arrivés aux mêmes conclusions.
Aurélien Delaunay, directeur du Laboratoire français de gemmologie (LFG), qui n’a pas eu l’occasion d’observer les pierres trouvées à Chamonix de près, indique que « le prix est fixé à un instant T, en fonction de l’offre et de la demande. Effectivement, il y a des pierres plus rares que d’autres, ce qui va jouer sur la valeur d’une pierre. Ses dimensions, la couleur, bien entendu, jouent un rôle important ».
Selon lui, une « très belle couleur » est toujours plus recherchée qu’une pierre pâle, peu pigmentée. « Il y a des pierres qui contiennent des impuretés, des inclusions, celles-ci vont être moins cotées que des pierres qui sont pures ». La taille aussi joue un rôle dans l’estimation. Il faut également prendre en compte le traitement éventuel de l’humain sur la pierre : est-elle naturelle ou taillée ? « La pierre peut avoir été traitée, améliorée par un quelconque processus de l’Homme, par un chauffage, un traitement thermique ou bien du remplissage des fissures avec de l’huile ou de la résine. C’est notamment le cas des émeraudes ».
Dans la boîte retrouvée par l’alpiniste se trouvaient des émeraudes et des saphirs. Comme l’ont déclaré les scientifiques et experts, le trésor de Chamonix provenait d’Inde. Aurélien Delaunay confirme la présence d'un marché important dans cette zone géographique. « L’Inde est un pays effectivement réputé pour le marché des pierres de Jaipur pour ne citer que celui-là […] et maintenant pour sa place importante sur le marché du négoce des pierres, surtout à Bangkok ».
De manière plus générale, les émeraudes proviennent essentiellement de Colombie, du Brésil, de la Zambie et d’Afghanistan. En ce qui concerne la production principale de saphirs, on peut citer Madagascar, le Sri Lanka, la Thaïlande, la Birmanie, l’Australie, les États-Unis aussi.
Dans la vallée de Chamonix, les pierres précieuses du mystérieux trésor seront observables à partir du dimanche 19 décembre 2021, au musée des cristaux du mont Blanc. « On souhaite faire une vitrine spéciale avec une notice pour expliquer le caractère dramatique de l’accident qui les a conduites à se retrouver là » conclut le Maire de Chamonix.