Quelles sont les origines du football ? L'archéologie au service du sport

« L'idée même d'une équipe sportive a été inventée en Mésoamérique. »

De Erin Blakemore
PHOTOGRAPHIE DE Luis Acosta, AFP, Getty Images

Le football est de loin le sport le plus populaire au monde, et la coupe du monde 2018 devrait être suivie par au moins 265 millions de personnes. La popularité de ce sport collectif tient sans doute au fait qu'il est facile d'en comprendre les règles, qu'un simple ballon suffit à lancer une partie dans une cour ou sur un terrain vague.

Mais quelles sont les premières formes historiques de ce sport si rassembleur ? Les archéologues se sont penchés sur la question.

Les Chinois étaient sans doute les premiers à taper dans un ballon en équipe au 3e siècle avant Jésus-Christ, et les contours du jeu connu sous le nom de football ont été définis en Angleterre au 19e siècle. Mais l'ancêtre de la plupart des jeux de ballons que nous connaissons était pratiqué dans les Amériques.

« L'idée même d'une équipe sportive a été inventée en Mésoamérique, » explique Mary Miller, professeur de l'histoire des arts à l'université de Yale, qui a étudié les premières formes de sport dans l'Histoire.

 

UN SAUT DANS LE TEMPS

En Mésoamérique, la vaste région historique s'étendant du Mexique au Costa Rica, les civilisations ont prospéré bien avant que Christophe Colomb ne les « découvre », et nombre d'entre elles pratiquaient un sport impliquant une grosse boule faite d'une substance dérivée de résine d'arbre.

On ne sait pas exactement où le jeu a été inventé, mais il avait une place de choix dans les cultures mésoaméricaines, notamment chez les Teotihuacanos, les Aztèques et les Mayas, il y a environ 3 000 ans. Son nom variait - ullamaliztli en aztèque, pok-ta-pok ou pitz en maya - tout comme ses règles, qui incluaient des mouvements tels que garder la balle en la faisant rebondir sur différentes parties du corps ou en utilisant des raquettes ou des battes.

Ces civilisations anciennes ont perfectionné le processus de fabrication des boules de caoutchouc des millénaires avant la fabrication du caoutchouc moderne.

« Les gens fabriquaient probablement des balles de caoutchouc par milliers », indique Miller. Les balles étaient creuses, ajoute-t-elle, mais elles pesaient jusqu'à 7.25 kg chacune.

Les balles semblent avoir été presque omniprésentes dans les cultures qui les ont valorisées, et beaucoup sont encore présentes dans les archives archéologiques. Autres preuves de l'existence du jeu  en Mésoamérique : la mise au jour de plus de 1300 terrains de pierre répartis dans toute la région, chacun pouvant accueillir de nombreux spectateurs.

D'autres preuves ont été retrouvées sous la forme d'écrits de l'époque coloniale rédigés par Diego Durán, un prêtre dominicain et témoin oculaire de la vie aztèque dont les récits comprennent une description du jeu de balle tel qu'il était pratiqué en 1585.

Les joueurs aztèques faisaient rebondir la balle d'avant en arrière en utilisant seulement leurs hanches et leurs fesses (les pieds ou les mains étaient interdits). Le but était de faire rebondir la balle sur une ligne médiane afin que celle-ci rebondisse sur le mur de l'adversaire. La lourdeur de la balle entraînait souvent de graves blessures, surtout lorsque la balle rencontrait la tête d'un des adversaires.

Si un joueur parvenait à atteindre la partie haute du mur de l'adversaire, il assurait automatiquement la victoire à son équipe. L'homme qui signait la victoire était, selon Durán, « honoré comme s'il avait gagné une grande bataille ».

 

VICTIMES DE SACRIFICES

Bien qu'il ait été pratiqué comme un sport du quotidien, ce jeu de balle tenait également une place sacrée dans l'organisation de la religion et de la guerre pour les cultures mésoaméricaines. Les rois aztèques auraient organisé des parties comme un substitut à la guerre, laissant intrigues diplomatiques et jeux de pouvoirs au hasard du jeu.

Dans les cultures Maya et Veracruz, les enjeux étaient encore plus élevés : les perdants de certains jeux étaient sacrifiés.

Les détails ne sont pas clairs, mais certains tribunaux sont décorés de panneaux illustrant le sacrifice sanglant des joueurs ayant perdu la partie. Sacrifice et sport sont étroitement liés dans un mythe de la création maya. Il montre des jumeaux jouant à la balle en battant les seigneurs des enfers sur le terrain. Ils seraient ainsi devenus le soleil et la lune incarnés.

Les Mayas « affrontaient quotidiennement les divinités sur le terrain », dit Miller. « Il y a un élément central de conflit entre les Hommes et les dieux. »

Malgré la preuve que les perdants ont parfois perdu la vie après avoir essuyé une défaite, certains archéologues du 20e siècle ont refusé de croire que quiconque sauf les gagnants aient pu être tués. 

« Ils ne pouvaient pas croire que les Mayas aient commis des sacrifices humains », explique l'historienne. Dans la mythologie maya, le perdant du jeu de balle est décapité, et les érudits acceptent aujourd'hui largement que les perdants, pas les gagnants, aient pu être mis à mort.

Des questions subsistent sur la façon dont le jeu a été joué s'est peu à peu défini au fil du temps, et comment le rite sacrificiel qui attendait certains des perdants a été mis en place. Mais son esprit, que Miller appelle une « réflexion d'équipe complexe », est bien vivant dans les incarnations modernes du jeu de balle et chez les millions de joueurs qui se faufilent chaque jour sur un terrain de football, qu'il soit officiel ou improvisé.

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