Ces adolescents engagés dans une guerre qui les a précédés
Le long de la frontière arméno-azerbaïdjanaise, 150 000 personnes vivent dans un état de guerre permanent.
La vie le long de la frontière séparant l’Arménie et l’Azerbaïdjan a été synonyme d'enfer sur Terre pendant des décennies. Les relations entre les deux pays sont principalement marquées par des différends territoriaux qui concernent le Haut-Karabagh, objet d'une guerre jusqu'en 1994, ainsi que par l'enclave du Nakhitchevan. Il n'existe pas de relations diplomatiques formelles entre les deux États qui sont toujours techniquement en état de guerre, malgré la déclaration d'un cessez-le feu en 1996 qui a permis d'apaiser les tensions entre les deux pays.
Les tensions et les violences persistantes des deux côtés de la frontières ont cependant donné lieu à un nouveau conflit de quatre jours en avril 2016, pour région autoproclamée du Haut-Karabagh, qui fait officiellement partie de l'Azerbaïdjan mais qui est actuellement occupée par des rebelles arméniens.
Bloqués dans un conflit éternel, les 150 000 habitants du Haut-Karabagh vivent dans un no-man's land. Les tensions entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan , non sans rappeler celles du conflit israélo-palestinien, ont fini par faire partie du quotidien.
Au cours d'un reportage dans la région, le photographe Emanuele Amighetti a saisi la réalité du terrain juste après les quatre jours de conflits et les conséquences psychologiques de cette guerre infinie.
Le fait que la guerre puisse éclater à tout moment dans cette région impose l'existence d’un service militaire obligatoire ; les jeunes sont formés au combat dès l'âge de 13 ans. Après l’école et quelques fois même avant, ces jeunes gens s'entraînent au maniement des armes et aux marches de combat comme ils feraient leurs devoirs. « Je n'avais jamais vu un tel dévouement et un tel sérieux », raconte Emanuele Amighetti. « Je me sentais obligé d’humaniser ces jeunes garçons et ces jeunes filles. »
Cette préparation constante peut avoir des conséquences importantes sur l’économie du pays. Les jeunes, au lieu de suivre des études supérieures, ont tendance à se laisser porter par les élans militaires.
Dans les premières lignes de la province de Mantakert, Emanuele Ameghetti a rencontré un jeune soldat âgé de 18 ou 19 ans, qui avait quitté les bancs de l’école à Erevan, capitale arménienne, pour rejoindre l’académie militaire du Haut-Karabagh. Passionné de journalisme, le jeune homme a été surpris et touché que pour la première fois un photographe étranger s’intéresse à ce conflit méconnu ou ignoré par la presse internationale.
Malgré la menace d'une guerre imminente, les photos prises par le photographe ne dégagent aucun sentiment de colère ou de rancœur. Tandis que les deux fronts creusent de nouvelles tranchées et acquièrent de nouvelles armes, les rues de la région sont rythmées par une vie bien ordinaire, par les commerces et les restaurants.
L'un des avantages des conflits longs, c'est que les nouvelles générations oublient les raisons qui ont provoqué les premières hostilités. Un adolescent qui se prépare pour une guerre qui l'a précédé nourrit l'espoir de pouvoir un jour y mettre fin.
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