Réimaginer "Le Petit Prince" dans la cordillère des Andes

L'artiste visuel bolivien réinvente le Petit Prince, en le transposant dans les Andes, en le revisitant par le prisme de la culture et de l'identité andines.

De Sara A. Fajardo
Photographies de River Claure
Publication 8 oct. 2021, 11:00 CEST
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Dans cette revisite du Petit Prince, Warawar Wawa, un nom cosmique en langue aymara, grimpe dans la Vallée de la Lune en Bolivie, arborant un maillot de football du FC Barcelone. River Claure joue avec les symboles, locaux et plus généraux, pour donner à voir une identité andine nuancée.

PHOTOGRAPHIE DE River Claure

Un jour, sur un coup de tête, le photographe River Claure a cherché des images de la Bolivie sur Google. Cette recherche d'images a donné les tropes souvent associés à son pays : des lamas, des montagnes, des hommes et des femmes en costumes traditionnels. Les photographies sont souvent prises à travers un regard étranger comment autant de souvenirs exotiques rémanant d'un voyage, comme si les cultures andines étaient figées dans le temps. En réalité, les cultures évoluent et s'adaptent au monde moderne en perpétuel changement.

Ces images sont restées dans l'esprit de River Claure. Il a commencé à réfléchir à la façon dont elles avaient affecté sa vision de lui-même, de sa patrie – notamment en lisant la version anglaise du Petit Prince d'Antoine de Saint-ExupéryPuis il a commencé à se demander : et si l'un des livres pour enfants les plus lus de l'histoire se déroulait non pas dans le désert du Sahara mais dans la cordillère des Andes ? Et si le personnage principal de l'histoire, plutôt qu'un prince blond, était un enfant andin aux cheveux noirs ?

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Warawar Wawa se promène dans une roseraie métaphorique, où les bourgeons fleurissent des tresses des femmes indigènes andines connues, les cholitas. Comme la rose bien-aimée du petit prince sur l'astéroïde B-612, la rose de Warawar Wawa a beau être une rose parmi des centaines d'autres roses, elle est pour lui unique au monde.

PHOTOGRAPHIE DE River Claure

Le Petit Prince nous invite à voir le monde autrement. C'est une histoire qui célèbre l'enfance et le jeu ; et River Claure a joué avec l'histoire elle-même. Il s'est inspiré de la façon dont la sociologue bolivienne Silvia Rivera Cusicanqui encourage les gens à recadrer les identités culturelles mixtes en adoptant le ch'ixi. En aymara, une langue parlée à travers les Andes, ce ch'ixi désigne la couleur grise : les tisserands superposent des brins de fil noir et blanc pour créer l'illusion d'une troisième couleur, le gris. La mondialisation a créé « de nouvelles gradations identitaires », souligne Claure. Son lexique visuel juxtapose des symboles andins à des symboles mondiaux et demande aux spectateurs de voir au-delà des représentations folkloriques un peu clichées des Andes.

En aymara, il n'y a pas de traduction directe du mot « prince ». Claure transpose le titre de l'histoire ainsi : Warawar (star) Wawa (enfant), une interprétation artistique qui, selon lui, capture l'esprit du livre, incarne la spiritualité des Andes et laisse derrière lui les notions eurocentriques. À travers son objectif, Claure transforme le petit prince en enfant des étoiles.

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    Basée à Lima, au Pérou, Sara A. Fajardo est auteure de livres pour enfants et conteuse multimédia pour des organisations de recherche agricole. 

    Cette histoire apparaîtra dans le numéro de novembre 2021 du magazine National Geographic.

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