Tout comme l'Homme, ce dinosaure a commencé sa vie à quatre pattes

Des fossiles suggèrent que les dinosaures comme ce « lézard souris » font partie des quelques animaux qui ont opéré ce changement de motricité en vieillissant.

De Jason Bittel
Publication 20 mai 2019, 17:11 CEST
Dans son jeune âge, le dinosaure Mussaurus patagonicus marchait à quatre pattes. Mais en grandissant, son ...
Dans son jeune âge, le dinosaure Mussaurus patagonicus marchait à quatre pattes. Mais en grandissant, son centre de gravité s'est déplacé et il est passé à une position debout, sur deux pattes.
PHOTOGRAPHIE DE Illustration by González

Les premiers pas d'un bébé sont un moment singulier, surtout lorsque l'on sait à quel point la transition vers une posture debout se faire rare dans le règne animal. On observe en effet ce phénomène chez une poignée d'espèces en dehors de l'Homme à mesure qu'elles grandissent, et ce sont toutes des dinosaures.

Une équipe de scientifiques vient d'ajouter de nouvelles preuves convaincantes sur un membre de cette liste : un sauropode nommé Mussaurus patagonicus. (À lire : Découverte d'empreintes de dinosaures géants en Écosse.)

Un Mussaurus patagonicus  bébé était suffisamment petit pour tenir dans des mains humaines.
Un Mussaurus patagonicus bébé était suffisamment petit pour tenir dans des mains humaines.
PHOTOGRAPHIE DE J. Bonaparte

À sa naissance, Mussaurus était si petit qu'il aurait pu tenir aisément dans une main, c'est d'ailleurs pour cette raison que son genre signifie en latin « lézard souris ». Mais au bout de huit ans passés à se goinfrer de fougères et d'autres plantes, cette créature aurait dépassé la tonne.

Des scientifiques ont récemment publié un article dans le journal Scientific Reports dans lequel ils avancent que cette croissance impressionnante, tant par la taille du corps que par sa forme, aurait modifié la façon dont se déplaçait l'animal.

À l'aide de plusieurs fossiles presque complets représentant l'animal à différentes périodes clés de sa vie, les scientifiques ont pu concevoir des modèles en trois dimensions de ce dinosaure du Jurassique inférieur et déterminer la position de son centre de gravité à mesure qu'il vieillissait. Jeune, l'imposante tête de l'animal et sa nuque auraient fait pencher son corps vers l'avant, soutenu par des avant-bras solidement développés. Mais à mesure que sa queue s'allongeait, le centre de gravité se serait translaté vers le pelvis, tirant l'animal vers le haut dans une position qui lui aurait permis de se dresser et de marcher sur deux pattes.

« Nous ne savons pas si cette tendance est valable pour tous les sauropodes, » précise l'auteur principal de l'étude Alejandro Otero, paléontologue au musée La Plata en Argentine. « Mais le fait que ce groupe d'animaux ait modifié sa démarche comme le fait l'Homme est fascinant. »

 

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    APERÇUS DE LA PRÉHISTOIRE

    L'une des difficultés de l'étude des animaux disparus réside dans l'impossibilité pour les scientifiques d'avoir une vue d'ensemble de la vie de l'animal en question. Bien souvent, cette petite fenêtre sur la préhistoire n'inclut pas la jeunesse ou les premiers jours du dinosaure, une période à laquelle sa petite taille diminue ses chances de se fossiliser.

    « Il n'y a que très peu de dinosaures pour lesquels nous disposons d'une chronologie suffisante, de l'œuf à l'âge adulte, et Mussaurus est devenu l'un d'entre eux, ce qui ouvre la voie à de nouvelles questions très intéressantes auxquelles on ne pouvait pas répondre il y a 20 ans, » déclare le coauteur de l'étude John Hutchinson, professeur de biomécanique de l'évolution au Royal Veterinary College de l'université de Londres.

    À titre d'exemple, il aura fallu plus de cinquante ans pour rassembler tous les fossiles qui ont servi pour l'étude. Les scientifiques appellent cela une série ontogénique, l'ontogénie étant l'étude du développement progressif d'un organisme depuis sa naissance jusqu'à un âge avancé, et elles sont très prisées.

    « Généralement, nous percevons chaque espèce de dinosaure comme une seule entité monolithique, mais comme tous les autres animaux, ils connaissent une phase de croissance que nous n'avons tout simplement pas la chance d'observer, à cause de la rareté des fossiles de dinosaures, » explique Shaena Montanari, paléontologue et membre de l'Association américaine pour l'avancement des sciences, non impliquée dans l'étude.

     

    LES DINOSAURES D'ABORD

    Le genre Mussaurus n'est qu'une branche de l'arbre généalogique des dinosaures qui pourrait avoir modifié son mode de déplacement avec l'âge.

    « Plusieurs dinosaures sont concernés par cette hypothèse, dont MaiasauraIguanodonPsittacosaurusDryosaurus et Massospondylus, » nous informe Kimi Chapelle, doctorante à l'université de Witwatersrand en Afrique du Sud dont les travaux portent sur le changement de motricité chez les dinosaures.

    Les paléontologues sont en possession d'une série ontogénique pour Mussaurus patagonicus, c'est à dire qu'elle se ...
    Les paléontologues sont en possession d'une série ontogénique pour Mussaurus patagonicus, c'est à dire qu'elle se compose d'un ensemble de fossiles quasi-complets qui dépeignent trois périodes de la vie du dinosaure, notamment son crâne à la naissance, sur la photographie ci-dessus.
    PHOTOGRAPHIE DE A. Otero.

    De plus, certaines espèces ont connu un changement dans le sens inverse en passant d'une démarche à deux pattes à une position sur quatre pattes, indique Chapelle, qui n'a pas pris part à la nouvelle étude. Cette propension au changement se retrouve même dans l'évolution des dinosaures.

    « Les dinosaures les plus anciens sont bipèdes, mais la quadrupédie a évolué de façon indépendante à travers deux lignées principales, » nous apprend-elle. Notamment avec la branche Ornithischia qui a vu naître de nombreux quadrupèdes célèbres comme le Triceratops, le Stegosaurus et l'Ankylosaurus. (À lire : Découverte d'une nouvelle espèce de dinosaure, lointain cousin du T. Rex.)

    Malgré la fréquence de ce type de changement chez les dinosaures, les scientifiques ont eu beaucoup de mal à trouver des exemples d'un tel comportement chez les animaux vivants.

    « En fin de compte, l'Homme en est probablement le meilleur exemple et celui que l'on connaît le mieux, » déclare le coauteur de l'étude Andrew Cuff, chercheur postdoctoral au Royal Veterinary College de l'université de Londres. « C'est vraiment très rare d'observer un tel comportement, c'est pourquoi il est si fascinant de le constater dans la chronique de fossiles de cette espèce. »

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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