Les récents tremblements de terre en Californie ont rendu le Big One plus probable

Les tremblements de terre qui ont frappé Ridgecrest en 2019 pourraient déclencher un tremblement de terre le long de la faille de San Andreas.

De Maya Wei-Haas
Publication 16 juil. 2020, 09:42 CEST
Une voiture traverse une fissure sur la route 178 au sud de Trona en Californie, après ...

Une voiture traverse une fissure sur la route 178 au sud de Trona en Californie, après qu’un séisme d’une magnitude de 6,4 sur l’échelle de Richter a frappé la région de Ridgecrest le 4 juillet 2019.

PHOTOGRAPHIE DE Fredric J. Brown, AFP, via Images Getty

Au sud de la Californie, de nombreuses craquelures sillonnent le paysage : une série de fissures sinueuses qui découlent des séismes qui ont secoué Ridgecrest en 2019, l’ancienne faille de Garlock qui s’étend à l’ouest et l’imposante faille de San Andreas.

Sur cette longue ligne de faille qui s’étend sur 1 300 kilomètres en Californie, les tremblements de terre sont une préoccupation permanente. Selon une nouvelle étude, la probabilité qu’un séisme de magnitude élevée se produise près de la ville animée de Los Angeles est trois à cinq fois plus importante que prévu. L’étude, publiée dans la revue scientifique Bulletin of the Seismological Society of America, montre que les séismes de Ridgecrest ont augmenté les chances de survenue d’un tremblement de terre le long de la faille de Garlock. Si tel est le cas, il pourrait également provoquer une rupture sismique de la faille de San Andreas qui, selon les chercheurs, a une chance sur 87 de se produire d’ici un an.

Cependant, la probabilité qu’un tel événement ait lieu demeure faible. L’équipe de recherche estime à 2,3 % la possibilité qu’un séisme de magnitude 7,7 touche la faille de Garlock et à 1,15 % le risque qu’un tremblement de terre similaire frappe San Andreas.

« Le ciel ne va pas nous tomber sur la tête », dit Ross Stein, co-auteur de l’étude et PDG de Tremblor, Inc – une société qui évalue les risques de survenue de catastrophes naturelles comme les séismes. « Nous pensons cependant que les prévisions sont nettement plus importantes depuis la survenue du tremblement de terre à Ridgecrest. »

Les risques de tremblements de terre sont difficiles à estimer. Les chercheurs ont pris conscience que les failles profondes qui en sont à l’origine sont des réseaux complexes de fissures et de gouffres. « Elles sont fractales et crasseuses. Elles flanchent et s’écroulent », explique Stein.

Les failles peuvent également interagir : quand l’une bouge, elle risque d’en réveiller une autre, provoquant ainsi une série de tremblements. « Une sorte d’effet domino », précise Alessandro Verdecchia, géologue à l’université McGill qui n’a pas pris part à l’étude. Le nouveau modèle est la dernière tentative d’évaluation de la probabilité de ce scénario potentiellement mortel.

 

EXPLIQUER L’EFFET DOMINO

La faille de San Andreas est à la jonction des plaques tectoniques pacifique et nord-américaine. Quand la plaque pacifique se déplace lentement vers le nord-ouest, les contraintes s’accumulent jusqu’à ce que la terre tremble.

Plusieurs séismes ont secoué la Californie au cours du siècle dernier mais le dernier qui a touché San Andreas remonte à 1906. Plus de 3 000 personnes ont trouvé la mort après qu’un tremblement de terre d’une magnitude de 7,9 a entraîné une zone de fracture de plus de 480 kilomètres et l’effondrement de nombre d’immeubles. Il s’agit du tremblement de terre le plus meurtrier de l’histoire américaine.

La nouvelle étude suggère que les tremblements de Ridgecrest ont augmenté les chances de survenue d’un autre grand séisme, cette fois-ci dans la partie sud de la Californie.

Ridgecrest a traversé une double épreuve en 2019 : un tremblement de terre d’une magnitude de 6,4 a ébranlé la région, suivi d’un autre plus puissant le lendemain (7,1 sur l’échelle de Richter). Le mouvement de la Terre a déformé le paysage environnant, déplaçant les contraintes vers les failles voisines comme celles de Garlock.

Pour évaluer les perturbations de contrainte, Stein et le co-auteur de l’étude, Shinji Toda, de l’université du Tohoku au Japon ont élaboré un modèle qui se base sur le mouvement le long des failles durant les tremblements de terre de Ridgecrest. Ils ont également inclus des données provenant d’une multitude de séismes survenus plus tôt pour pouvoir visualiser la faille comme une zone de fracture sinueuse, dit Stein.

Le modèle a estimé à 8 % la possibilité qu’un séisme d’une magnitude de 7,7 secoue Gatlock dans l’année qui a suivi le tremblement de terre de Ridgecrest. Bien que cela n’ait pas eu lieu, l’étude suggère qu’il existe un risque plus important que celui précédemment établi. Dans l’année à venir, la probabilité qu’un tel séisme survienne est de 2,3 %, multipliant par 100 les estimations des anciens modèles.

Selon les estimations des chercheurs, un tremblement de terre d’une magnitude de 7,5 ou plus le long de Garlock pourrait provoquer un séisme le long de San Andreas et s’étendre vers le sud en direction de Los Angeles.

« Les estimations nous motivent à accorder une attention particulière à la situation », indique John Vidale, géophysicien à l’université de Californie du Sud, qui n’a pas pris part à l’étude, en parlant de la possibilité qu’un séisme d’une magnitude élevée touche la région. Pourtant, de nombreuses zones d’ombre persistent, ajoute-t-il, puisque le plus grand risque de rupture tectonique de Garlock est déjà passé. Le nouveau modèle « ne signifie pas nécessairement que nous devions avoir plus peur qu’avant. »

La nouvelle étude est une leçon de prudence pour les habitants des régions sujettes aux séismes, explique Stein. Si un séisme important frappe la faille de Garlock, la faille de San Andreas pourra se réveiller des semaines voire des mois plus tard, si ce n’est plus. On ne sait pas à quel moment exactement mais ce qui est sûr c’est que les séismes dans la région seront, à l’avenir, inévitables.

 

UNE MULTITUDE DE SUPPOSITIONS

Tous les modèles, y compris le plus récent, formulent des hypothèses simplificatrices de notre planète incroyablement complexe. Par exemple, le nouveau modèle ne tient pas compte des complexités des interactions fluides, affirme Pablo Gonzalez, géophysicien à l’université de Liverpool en Angleterre et membre du Conseil national de la recherche scientifique en Espagne qui n’a pas pris part à l’étude.

Le modèle suppose également une uniformité de la composition du sol. Or le mouvement le long de la faille de Garlock pendant des millions d’années a eu pour effet que les roches au nord sont différentes de celles du sud par exemple, insiste Gonzalez.

Le défi principal que posent toutes les prévisions sismiques est que les chercheurs ne savent pas exactement à quel moment on atteindra le point de rupture de la faille, dit Chris Goldfinger, sismologue à l’université d’État de l’Oregon qui n’a pas pris part à l’étude.

« On peut faire une multitude de suppositions quand il s’agit de San Andreas », conclut Goldfinger. « Cela ne veut pas dire que je ne dormirai pas la tête tranquille ce soir à Los Angeles. »

 

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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