À quelles heures devrions-nous prendre nos repas ? Ce qu'en dit la science

Devrions-nous manger plus le matin, ou le soir ? Pour notre santé, les moments de prises des repas sont tout aussi importants que les repas eux-mêmes, raison pour laquelle il est recommandé de passer outre certains des instincts hérités de nos ancêtres.

De Michael Crupain, Michael Croizen, Ted Spiker
Publication 22 déc. 2022, 19:58 CET
Nous avons souvent envie de grignoter à minuit, mais notre corps fonctionne mieux lorsque nous mangeons ...

Nous avons souvent envie de grignoter à minuit, mais notre corps fonctionne mieux lorsque nous mangeons plus tôt.

PHOTOGRAPHIE DE Jan Nevidal, Getty Images

À l’approche de la fin de l'année, c’est le moment de manger. Et pas qu’un peu. La nourriture peut cependant avoir différents effets sur notre corps selon le moment de la journée auquel nous l’ingérons. Analysons le fonctionnement de ce système biologique complexe.

Pour offrir un fonctionnement optimal à notre corps, il est essentiel de comprendre l’horloge biologique qui le contrôle. Toutes les sources d’énergie proviennent du soleil. Mais pour survivre aux périodes de faible luminosité, les plantes et les animaux ont dû évoluer et créer des moyens de stocker de l’énergie et de réduire leur consommation d’énergie.

L’horloge biologique est un système automatisé qui permet de conserver l’énergie dans le corps de manière optimale en influençant notre comportement au niveau cellulaire, ce qu’elle parvient à faire en envoyant des messages dans tout notre corps par le biais d’hormones. Ces signaux nous indiquent le meilleur moment pour dormir et manger, et ils le font de manière relativement constante jour après jour pour nous permettre de les suivre de manière efficace. Ce cycle, c’est ce que l’on appelle le rythme circadien.

La manière dont les aliments et les boissons affectent le corps humain diffère selon les moments de la journée.

PHOTOGRAPHIE DE Gilaxia, Getty Images

 

VIVRE EN DÉCALÉ

Certaines personnes ne suivent pas les instincts naturels de leur corps. Aux États-Unis, environ 15 millions de personnes travaillent la nuit et dorment le jour. Selon des études portant sur la santé de ces populations, elles présenteraient des taux accrus de troubles du sommeil et de l’obésité. Les personnes qui travaillent de nuit ont en effet tendance à prendre plus de poids que celles qui ont des horaires dits « normaux » (de 9 h à 17 h, par exemple).

Dans le cadre d’une étude menée auprès de personnels infirmiers, des scientifiques ont observé que, lorsque ces derniers passaient dans une équipe de nuit, ils brûlaient moins de calories que lorsqu’ils travaillaient de jour pour les mêmes activités. D’autres études ont également déterminé que les travailleurs postés présentaient un risque de maladies cardiovasculaires, de crises cardiaques, d’accidents vasculaires cérébraux et de battements cardiaques anormaux 40 % plus élevé que les personnes qui travaillent de jour.

Bien que nous n’en comprenions pas complètement la cause, ces perturbations sur la santé et le métabolisme des travailleurs postés seraient dues à leur lutte constante contre leur rythme circadien naturel – et à ce que leur indique leurs instincts physiques quant aux heures de prise des repas.

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    En matière d'alimentation, les travailleurs postés vont souvent à l'encontre de leur rythme circadien, mais ceux qui déjeunent plus tôt en bénéficient à long terme.

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    QUEL EST LE MEILLEUR MOMENT POUR MANGER ?

    Naturellement, notre horloge biologique et notre horloge alimentaire ne s’accordent pas toujours entre elles : nous avons envie de manger le soir, mais nous fonctionnons mieux lorsque nous mangeons plus tôt. Des recherches ont démontré que, même en l’absence de lumière et de repères temporels, l’heure à laquelle nous avons le plus faim se situe aux alentours de 20 heures, et le moins faim vers 8 heures du matin.

    Cet instinct de base, qui était un avantage au début de l’existence humaine, pourrait bien être néfaste dans notre mode de vie actuel. L’une des hormones les plus importantes de l’organisme dans la gestion de la nourriture est l’insuline, dont le rôle est de réguler la quantité de glucose dans le sang.

    Selon des études menées sur des animaux, la sécrétion d’insuline et la réponse de l’organisme à cette hormone suivent un rythme circadien. Les scientifiques ont examiné à quel moment de la journée les mammifères sont les plus sensibles et les plus résistants aux effets de l’insuline, et ont constaté que la sensibilité est la plus élevée pendant les phases actives (autrement dit, lorsqu’ils sont éveillés). Par exemple, quand une souris est active, ses muscles bougent et elle a donc besoin de plus d’énergie (sous forme de glucose) pour fonctionner de manière optimale. L’insuline aide à faire passer le glucose dans les cellules musculaires.

    En revanche, c’est pendant leurs heures de sommeil habituelles que les animaux sont normalement les plus résistants à l’insuline. Et des études suggèrent que le même phénomène se produit chez l’être humain. L’heure de la prise des repas a un effet important sur l’évolution de la glycémie : ainsi, si vous prenez le même repas le matin et le soir, votre glycémie augmentera davantage le soir que le matin.

    Un même repas peut affecter différemment la glycémie s'il est mangé en début de journée, comme au petit-déjeuner, ou le soir.

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    Les cellules graisseuses semblent également être plus sensibles à l’insuline en début de journée, avec un pic à midi. Elles sont environ 50 % plus sensibles à midi qu’à minuit, ce qui signifie que le corps est prêt à manger à certains moments précis, et que le fait de manger au « mauvais » moment peut tout gâcher. Lors d’une étude menée sur des souris, celles qui avaient accès à la nourriture au « mauvais » moment (à une heure qui correspondait habituellement à leurs heures de sommeil) mangeaient davantage lorsqu’elles recevaient la nourriture – 10 % de calories de plus que pendant la journée. Elles prenaient donc plus de poids.

    La recherche commence à montrer les mêmes effets chez les humains. Une étude sur la perte de poids, qui a comparé les heures de repas des participants sur une période de vingt semaines, a révélé que ceux qui prenaient leur déjeuner plus tôt perdaient plus de poids que ceux qui le faisaient plus tard. Une étude connexe a révélé que ceux qui mangeaient plus tard brûlaient également moins d’énergie que ceux qui mangeaient plus tôt.

     

    UN ÉCOSYSTÈME DANS NOTRE CORPS

    Les intestins sont très liés à nos habitudes alimentaires, et pas uniquement au travers du rugissement de faim qui peut s’en dégager. L’appareil digestif est manipulé par un écosystème de bactéries, le microbiome, qui influence de très nombreux systèmes et parties de notre corps. Les espèces bactériennes qui peuplent notre microbiome peuvent changer, et c’est une bonne chose ; les personnes dont l’intestin est plus diversifié semblent être en meilleure santé.

    Il est possible d’influencer cette diversité, non seulement par ce que nous mangeons, mais aussi par le moment auquel nous le mangeons. Des études menées sur des souris ont révélé que les populations de nombreux types de bactéries intestinales fluctuaient tout au long de la journée en suivant un cycle rythmique. Dans une étude qui a analysé les excréments de souris, les chercheurs ont constaté que lorsque les petits animaux étaient actifs, ils présentaient davantage de signes d’activité cellulaire favorisant le métabolisme, la croissance cellulaire et la réparation. Lorsque les souris se reposaient, les chercheurs trouvaient davantage de gènes liés à des activités comme la détoxification.

    La santé de notre système digestif, et par association la santé de notre cerveau, est affectée par ce que l'on mange.

    PHOTOGRAPHIE DE Getty Images

     

    LE PLUS TÔT EST LE MIEUX

    Des recherches ont montré que le rythme naturel de notre corps nous pousse à vouloir manger plus tard, même si cela a un effet négatif sur notre santé globale. Mais pourquoi les envies de manger de notre corps ne suivent-elles pas notre rythme circadien ?

    À l’époque où nous ne savions pas quand nous allions prendre nos prochains repas, il n’est pas impossible que le corps humain ait développé la nécessité d’un mécanisme de stockage de la nourriture. Les humains ne vivaient pas assez longtemps pour subir les effets négatifs d’une alimentation tardive et, quoi qu’il en soit, le seul objectif du corps était de survivre non pas jusqu’à la décennie suivante, mais jusqu’au lendemain.

    Aujourd’hui, dans notre société, nous n’avons plus besoin de cette capacité de stockage importante, car la nourriture est abondante. Nous devons donc consciemment passer outre nos anciens instincts, et faire des choix intelligents quant aux moments auxquels nous choisissons de manger. Et cela implique de manger plus le matin, et moins le soir.

    Article adapté de l’ouvrage What to Eat When: A Strategic Plan to Improve Your Health and Life Through Food, publié en décembre 2018 par National Geographic Partners, LLC. Copyright © 2019 Michael F. Roizen et Michael Crupain. | Compilation copyright © 2021 National Geographic Partners, LLC. Tous droits réservés.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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