Alimentation consciente ou intuitive : laquelle privilégier ?

Ces approches de l’alimentation se concentrent sur l’écoute des signaux physiques qu’envoie votre corps. Des preuves de plus en plus nombreuses montrent que celles-ci peuvent améliorer votre relation à la nourriture et à la santé.

De Stacey Colino
Publication 10 oct. 2024, 12:18 CEST
Que choisir entre alimentation consciente et alimentation intuitive ? Si ces deux approches comportent des différences cruciales, ...

Que choisir entre alimentation consciente et alimentation intuitive ? Si ces deux approches comportent des différences cruciales, des études montrent qu’elles présentent chacune un éventail de bienfaits pour le corps et pour l’esprit.

PHOTOGRAPHIE DE Lemis Lee, Alamy

Alimentation intuitive. Alimentation consciente. Les dernières tendances en matière d’alimentation saine ont davantage à voir avec votre esprit qu’avec la nourriture qui se trouve sur la table.

Plutôt que de se focaliser sur le maintien de sa ligne, l’objectif de ces habitudes alimentaires « axées sur la santé » est de promouvoir la confiance dans vos choix alimentaires et dans les signaux de faim et de satiété qu’envoie votre corps. De plus en plus de recherches montrent que ces habitudes comportent tout un éventail de bienfaits à la fois pour le corps et pour la tête.

Dans une étude publiée au mois d’août dans la revue Appetite, des chercheurs montrent que l’alimentation intuitive et l’alimentation consciente sont associées à un indice de masse corporelle plus faible, à des régimes de meilleure qualité et à une plus grande activité physique. Ces deux approches étaient également associées à de plus faibles taux de troubles alimentaires et de symptômes dépressifs et à une amélioration de l’image de soi et à une plus grande auto-compassion ; l’alimentation intuitive était quant à elle associée, en outre, à une consommation accrue de fruits et de légumes.

Mais que sont exactement ces habitudes alimentaires ? Bien qu’elles aient beaucoup en commun, des différences cruciales les distinguent. L’alimentation intuitive concerne principalement le fait de faire confiance aux signaux de faim et de satiété du corps pour décider de ce que l’on va manger, quand et comment. L’alimentation consciente invite à prendre son temps et à se concentrer pleinement sur l’acte de manger, d’utiliser tous ses sens. Les deux pratiques peuvent vous aider à apprendre à manger de manière compétente, chose qui, selon la diététicienne de renommée mondiale Ellyn Satter, nécessite d’être positif, à l’aise et flexible vis-à-vis de l’ingestion d’une quantité suffisante d’aliments plaisants et nourrissants, ce afin d’avoir de l’énergie et de l’endurance.

Manger de cette façon « peut constituer une étape cruciale dans l’abandon de la mentalité de régime omniprésente dans notre culture et un pas vers un rapport plus sain et plus joyeux à l’alimentation », explique Danielle Keenan-Miller, psychologue clinicienne originaire de Los Angeles et autrice du livre The Binge Eating Prevention Workbook.

Nul besoin de se limiter à une seule approche, alimentations intuitive et consciente fonctionnent à merveille ensemble, mais voici ce qu’il faut savoir sur les bienfaits de chacune ainsi que quelques conseils pour commencer.

 

LES BIENFAITS DE L’ALIMENTATION INTUITIVE

« Alimentation intuitive » est un terme inventé par les diététiciennes Evelyn Tribole et Elyse Resch en 1995. Cette pratique consiste en dix principes qui encouragent les adeptes à ignorer les injonctions de la culture du régime (et celles d’autres personnes) et à écouter les signaux de faim et de satiété de leur corps. Ainsi vous pouvez manger les aliments qui vous plaisent jusqu’à satisfaction, sans toutefois vous rassasier, tout en vous sentant vis-à-vis de votre façon de vous alimenter. Ces principes soulignent également l’importance d’apprécier les sensations que vous procure votre corps quand vous bougez et de respecter ce dernier.

De manière intéressante, des recherches suggèrent une relation réciproque entre alimentation intuitive et image de soi positive chez les femmes, en particulier pour ce qui est d’apprécier son corps et le fonctionnement de celui-ci. Dit autrement, l’alimentation intuitive nourrit une image de soi positive et vice-versa.

Les bienfaits ne s’arrêtent pas là. Une étude publiée en 2022 dans la revue American Journal of Health Promotiona montré que les femmes affichant une meilleure performance pour ce qui est des indicateurs d’alimentation intuitive ont tendance à moins subir de détresse psychologique, à avoir un indice de masse corporelle (IMC) plus faible et à avoir moins de troubles alimentaires que les femmes ayant d’autres habitudes alimentaires. Selon une étude à laquelle ont participé 1 491 personnes suivies sur une période de huit ans, au fil du temps, l’alimentation intuitive favorise également un moindre risque de présenter des symptômes dépressifs ou d’avoir des problèmes d’estime ou d’image de soi.

« L’alimentation intuitive offre de la liberté par rapport aux effets yo-yo du régime et aux règles alimentaires », fait observer Rachel Marshall, psychologue clinicienne de Greenwich, dans le Connecticut, spécialiste de l’alimentation et du poids. « On est plus à l’écoute des signaux et besoins de notre corps, et ainsi l’on développe une confiance en soi et l’on accepte mieux son corps. Cette pratique permet de davantage apprécier la nourriture et d’être moins stressé et anxieux par rapport à l’alimentation. »

Un avantage supplémentaire de l’alimentation intuitive est qu’il semble exister un élément transmissible : une étude publiée en 2024 dans la revue Appetite révèle que les mères qui pratiquent l’alimentation intuitive ont de bonnes chances d’avoir des filles qui suivront leur exemple à l’âge adulte ; et il est probable que le bien-être des deux soit plus grand que celui des duos mère-fille qui font des régimes pour perdre du poids.

 

LES BIENFAITS DE L’ALIMENTATION CONSCIENTE

L’alimentation consciente implique quant à elle de prêter une attention pleine et entière à l’expérience de dégustation et aux qualités sensorielles de la nourriture. Pour y parvenir, il est important de manger sans distractions (pas devant la télé, ni devant son téléphone, ni pendant que l’on travaille). Cela implique une prise de conscience sans jugement des sensations physiques et émotionnelles qui accompagnent l’acte de manger.

Cette pratique comporte de nombreux bienfaits pour la santé. Une étude publiée en mars 2024 dans la revue Cureus montre que les personnes atteintes de diabète de type 2 qui pratiquent l’alimentation consciente ont un IMC plus faible et présentent de plus faibles taux d’hémoglobine A1C (hémoglobine glyquée), une mesure de la glycémie moyenne sur trois mois. Une étude publiée en 2022 dans la revue Eating and Weight Disorders montre que l’alimentation consciente est associée à une diminution de la consommation émotionnelle et des comportements alimentaires immodérés.

« En outre, il existe un petit corpus d’éléments probants qui suggèrent que ces pratiques peuvent être associées à des améliorations en ce qui concerne certains marqueurs de santé clés, comme les bilans lipidiques, la régulation du glucose et l’inflammation dans le corps, indique Danielle Keenan-Miller. Ces approches de l’alimentation ne comportent aucun inconvénient biologique. »

 

COMMENT CHANGER SA FAÇON DE MANGER

L’aspect autonome de ces méthodes peut ne pas convenir à tout un chacun : si vous avez un trouble alimentaire, il est préférable de travailler avec un psychothérapeute et / ou un diététicien pour obtenir des conseils vis-à-vis de la mise en œuvre de ces pratiques, ce sont les spécialistes qui le disent. Après tout, « une personne aux prises avec un trouble alimentaire ne sait pas ce qu’est la sensation de satiété », explique Rachel Goldman, psychologue spécialiste des comportement alimentaires et enseignante clinicienne en psychiatrie à la Faculté de médecine Grossman de l’Université de New York.

Mais pour d’autres, la première étape pour commencer à se nourrir de manière intuitive est de se défaire de l’idée que les aliments sont « bons » ou « mauvais » et de « se donner la permission inconditionnelle de manger tous les aliments sans culpabiliser », comme l’affirme Rachel Marshall. « Réfléchissez à la façon dont tel ou tel aliment vous fait vous sentir physiquement et choisissez des aliments qui satisfassent vos papilles et les besoins de votre corps. »

Quand vous mangez, écoutez les signaux de faim et de satiété qu’envoie votre corps et évaluez-les à l’aide d’une échelle de 1 (affamé) à 10 (saturé), conseille Susan Albers, psychologue clinicienne à la Cleveland Clinic et autrice. Quand vous parvenez à un point où vous vous sentez satisfait, et non rassasié, il est temps d’arrêter. L’idée ressemble à un concept du régime Okinawa, considéré comme le plus sain de la planète : hara hachi bu, une pratique qui encourage s’arrêter de manger lorsque l’on est rassasié à 80 %.

Il est également possible de cultiver l’alimentation consciente. « L’alimentation consciente a davantage à voir avec la façon dont vous mangez qu’avec ce que vous mangez », explique Susan Albers. À cet égard, il est important de manger doucement et de bien mâcher sa nourriture : pourquoi ne pas poser la fourchette entre deux bouchées ? « Faites attention au goût, à la texture, aux arômes et aux sons de vos aliments, cela contribue à la stimulation de votre plaisir, ajoute-t-elle. Sachez quand vous vous sentez physiquement et / ou émotionnellement satisfait » ; et servez-vous de cela comme d’un signal qui vous dit d’arrêter de manger.

La modification des habitudes alimentaires peut nécessiter temps, pratique et patience. « Je trouve qu’il est utile d’envisager cela comme une direction plutôt que comme un objectif, car ce sont des pratiques qui doivent durer », conseille Rachel Rodgers, directrice du Programme de psychologie appliquée de recherche sur l’alimentation et l’apparence (APPEAR) à l’Université Northeastern, à Boston.

D’après Rachel Marshall, de nombreuses personnes ont peur que l’alimentation consciente ou intuitive les fasse trop manger. « Il est intéressant de noter que la recherche montre que c’est l’inverse qui est vrai. Les restrictions alimentaires conduisent souvent à une absorption excessive d’aliments interdits. Quand les gens arrêtent de se priver, ils mangent des aliments [qu’ils aiment] jusqu’à ce qu’ils soient satisfaits, et l’envie de trop manger diminue. »

Autre pierre d’achoppement fréquente : la peur de gâcher de la nourriture. « On a appris à beaucoup de personnes à terminer leur assiette quand elles étaient enfants ; en conséquence, il leur arrive souvent de manger au-delà du point de satiété par obligation », explique Rachel Marshall. Pour surmonter cela, donnez vous la permission d’arrêter de manger quand vous êtes satisfait et gardez les restes pour plus tard. Ainsi vous pourrez profiter de ce repas plus d’une fois… en toute conscience.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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