Découverte d'un étrange dinosaure qui avait des traits communs avec les paresseux

Comme T-rex et certains paresseux modernes, cet étrange dinosaure qui vivait il y a plus de 90 millions d’années n'avait que deux doigts sur chaque patte avant.

De Riley Black
Publication 28 mars 2025, 13:08 CET
Une illustration montre ce à quoi aurait ressemblé Duonychus tsogtbaatari. Contrairement aux thérizinosaures, ses semblables, cette ...

Une illustration montre ce à quoi aurait ressemblé Duonychus tsogtbaatari. Contrairement aux thérizinosaures, ses semblables, cette nouvelle espèce était dotée de deux griffes au lieu de trois.

ILLUSTRATION DE Masato Hattori

Les thérizinosaures faisaient partie des dinosaures les plus étranges de tous les temps. Ces reptiles préhistoriques herbivores - dont les ancêtres étaient carnivores - avaient des corps à plumes, de petites têtes, des dents en forme de patères, des estomacs bulbeux où leurs végétaux qu'ils consommaient fermentaient et des griffes impressionnantes sur chacune de leurs pattes. Leur morphologie et leurs griffes ont poussé les scientifiques à les comparer à des paresseux mais certains de ces reptiles dépassaient les quatre mètres de long et pesaient plus de cinq tonnes. Les paléontologues ont à présent découvert un thérizinosaure qui sort de l’ordinaire, même parmi les membres de sa propre espèce, à cause de sa griffe manquante.

Décrit en mars dans la revue scientifique iScience, le nouveau dinosaure a été découvert dans des roches vieilles de plus de 90 millions d’années dans le désert de Gobi. En 2012, des scientifiques de l’Académie des sciences de Mongolie avaient initialement déterré des fragments de colonne vertébrale, de côtes, de hanches et d’épaules, avant de finalement découvrir deux pattes complètes. Immédiatement, ils ont reconnu les fossiles comme appartenant à un thérizinosaure mais il fallut du temps avant de reconnaître son statut en tant que dinosaure jamais documenté.

Lorsque Yoshitsugu Kobayashi, paléontologue de l’université de Hokkaidō et auteur principal de l’étude, a vu les fossiles pour la première fois l’année suivante, il s’est tout de suite étonné que le dinosaure n’ait que deux doigts sur chaque patte. Avant cette découverte, tous les thérizinosaures connus en possédaient trois. « Au-delà de cela, un des doigts retrouvés avait une gaine en kératine préservée et je me suis dit “Waouh” », se rappelle Yoshitsugu Kobayashi.

Le paléontologue et ses collègues ont baptisé le nouveau thérizinosaure Duonychus tsogtbaatari. Cela signifie « double griffe », tandis que celui de l’espèce rend hommage au paléontologue mongolien Khishigjav Tsogtbaatar.

Les fossiles de Duonychus tsogtbaatari préservent la gaine en kératine qui recouvrait sa griffe d’os.

Les fossiles de Duonychus tsogtbaatari préservent la gaine en kératine qui recouvrait sa griffe d’os.

PHOTOGRAPHIE DE Kobayashi, et, al

Les griffes des dinosaures étaient des os recouverts d’une gaine en kératine, le même composant biologique que les ongles humains. Les pattes avant de Duonychus montraient que la partie kératineuse de ses serres était même plus longue et plus courbée lorsque l’animal était en vie. Les griffes pouvaient agripper des branches et d’autres végétaux d’un diamètre de dix centimètres, estiment les chercheurs, permettant au spécimen de récupérer des aliments essentiels pour maintenir son poids de forme. C’est la première fois qu’une gaine en kératine d’un théropode de cette taille est mise au jour, explique Yoshitsugu Kobayashi.

Il est également surprenant que deux sortes différentes de cette espèce de dinosaure existent, l’une à trois griffes et l’autre à deux griffes, comme c’est par exemple le cas chez les paresseux. « Je n’aurais jamais deviné que nous découvrions un thérizinosaure avec seulement deux doigts », s’étonne le paléontologue de l’université de Birmingham, Stephan Lautenschlager, qui n’a pas pris part à la récente recherche. Mais étant donné que plusieurs autres lignées de dinosaures théropodes ont perdu des doigts au cours de leur évolution, le fait qu'un thérizinosaure à deux doigts ait existé fait sens.

 

POURQUOI CERTAINS DINOSAURES AVAIENT-ILS SI PEU DE DOIGTS ?

Les théropodes comptent parmi leurs rangs des dinosaures carnivores célèbres, comme T-rex, des herbivores, comme les thérizinosaures, ainsi que des oiseaux. Tous étaient bipèdes et la plupart étaient dotés d’une sorte de plumage. Le nombre de doigts était apparemment variable. Les exemples les plus connus étant, bien sûr, les grands tyrannosaures comme T-rex lui-même, qui avaient deux doigts au bout de petits bras râblés.

Il existe cependant d’autres exemples de doigts perdus ou gagnés. Le dinosaure carnivore Galichuo n’avait que deux doigts sur chaque bras, comme T-rex, même s’il n’était pas un de ses cousins. Le petit et étrange dinosaure Limusaurus était techniquement doté de quatre doigts, mais deux d’entre eux étaient de petites bosses, inutilisables.

Les dinosaures supposés insectivores sont passés maîtres dans ce domaine. Les mystérieux Alvarezsaurus avaient des bras courts qui se terminaient en une unique griffe et plusieurs petits doigts. Stephan Lautenschlager fait même remarquer que les ailes des oiseaux démontrent des larges changements qu’ont vécu les doigts et les bras des théropodes.

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    PHOTOGRAPHIE DE Yoshi Kobayashi Hokkaido

    Le fait que plusieurs dinosaures et d’autres animaux, comme les chevaux, aient, au fil du temps, perdu des orteils ou des doigts se voit immédiatement en consultant les données fossiles. « Comprendre les raisons de cette évolution demande toutefois un travail plus détaillé » explique Zichuan Qin, paléontologue de l’université de Birmingham, qui n’a pas pris part à la récente étude. Chaque cas est unique et est la conséquences de différentes pressions évolutives.

    La bipédie a offert aux théropodes différentes opportunités évolutives pour leurs mains et leurs bras, remarque Yoshitsugu Kobayashi. Les grands tyrannosaures attrapaient et dévoraient leurs proies grâce à leurs mâchoires puissantes et immenses. La réduction de la taille de leurs bras et du nombre de leurs doigts correspond donc à leur manière de se nourrir. Certains d'entre eux, comme les alvarezsaurus ont vu leurs bras se raccourcir avec une seule grande griffe pour fouiller le sol et probablement perturber les nids d’anciennes termites et d’autres insectes sociaux.

     

    POURQUOI DUONYCHUS A-T-IL PERDU UN DOIGT ?

    Dans le cas de Duonychus, la perte d’un troisième doigt pourrait être un hasard de l’évolution, sans particularité réelle. Les poignets du dinosaure étaient souples, et non raides, ce qui favorisait la préhension. « C’est là que ça m’a frappé », confie Kobayashi, « la clé, c’était la gaine en kératine ».

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    La gaine préservée sur la griffe de Duonychus ressemble à la griffe non-rétractable d’un chat. Additionné à la souplesse du poignet, il semblerait que Dunonychus se servait de ses griffes pour agripper les plantes ou les branches des arbres afin de les rapprocher et atteindre plus facilement sa nourriture. Les paresseux d’Hoffmann modernes ont recours à la même méthode avec leurs deux griffes pour approcher feuilles et branches. Une fois avalées, les feuilles et autres végétaux descendaient dans l’estomac du dinosaure, niché entre deux larges hanches, au sein de côtes évasées, ressemblant à ce que l’on voit sur les squelettes fossiles de mégathériums.

    D’anciennes études menées sur les thérizinosaures avaient prédit que ces animaux utilisaient leurs griffes de cette manière. « Elles fonctionnaient un peu comme des grappins, et plus la griffe était courbée, mieux c’était », explique Stephan Lautenschlager. La gaine en kératine préservée, remarque-t-il, montre à quel point les griffes pouvaient être recourbées, ce qui fournissait un avantage certain pour un dinosaure qui tirait les branches des arbres à lui pour se nourrir. Le paléontologue précise également que la kératine pouvait repousser si le bout se brisait, ce qui aurait été impossible si les griffes avaient été constituées uniquement d’os.

    Les griffes devaient être des armes formidables, tant de défense que d’attaque lors des conflits entre Duonychus. « Des griffes comme celles-ci devaient être de bons outils de préhension et je ne serais pas surpris si elles étaient également d’excellentes armes lors de conflits au sein de l'espèce », confie Zichuan Qin.

    Plusieurs parties du corps des animaux remplissent de multiples fonctions, notamment les griffes. Ainsi, les doigts recourbés qui aidaient Duonychus à se nourrir auraient également pu l’aider à se défendre contre des prédateurs ou décourager d’autres membres de son espèce de s’approcher trop près. Ce n’est pas parce que Duonychus était un herbivore et ressemblait à un paresseux géant au ventre rebondi qu’il ne savait pas se défendre.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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