"Petit âge glaciaire" : l’éruption volcanique méga-colossale qui a frappé le Moyen-Âge

Le 13e siècle a été marqué par une éruption volcanique sans précédent. Des chercheurs du monde entier ont alors tenté de retrouver l’auteur de l’explosion.

De Guillaume Marchand
L'éruption dévastatrice du volcan islandais Eyjafjallajokull à la mi-avril 2010 a provoqué une perturbation massive du ...
L'éruption dévastatrice du volcan islandais Eyjafjallajokull à la mi-avril a provoqué une perturbation massive du ciel au-dessus de l'Europe, en fermant l'espace aérien européen et en bloquant des centaines de milliers de passagers aériens dans le monde.
PHOTOGRAPHIE DE NATIONAL GEOGRAPHIC TV

La période millénaire du Moyen-Âge a été témoin de l’une des éruptions volcaniques les plus puissantes de ces 10 000 dernières années. Daté entre 1257 et 1258, ce phénomène éruptif d’une rare violence plonge les 13e et 14e siècles dans une période de refroidissement climatique aujourd’hui appelée « Petit Âge glaciaire ». Il provoque à l’époque des avancées de glaciers notamment dans les Alpes ou encore de nombreuses précipitations et inondations. À l’origine de nombreuses famines, ce fait extraordinaire est très présent dans différentes chroniques médiévales faisant état d’une année sans été.

Le « Petit Âge glaciaire » est longtemps resté une énigme pour les scientifiques. Un mystère pourtant révélé au milieu des années 70 au Groenland puis en Antarctique. Ils ont, en effet, retrouvé son origine volcanique dans la glace de ces territoires diamétralement opposés. Dans les carottes de glace, des dépôts d’aérosols sulfatés présentaient alors un pic de concentration autour de 1258/1259.

L’analyse géochimique des cendres présentes dans les dépôts révèle que leur composition est constituée à 70 % de silice, une teneur moléculaire caractéristique d’une éruption explosive. Ce type de volcanisme se distingue du volcanisme effusif par l'émission simultanée dans l’atmosphère de gaz et de fragments de magma. Mais ce qui retient l’attention des chercheurs c’est bien la force titanesque de l’explosion volcanique. Celle-ci aurait eu, selon des estimations, un indice d’explosivité volcanique de 7 sur une échelle de 8 autrement dit méga-colossal. À titre de comparaison, l’éruption du Vésuve de 79 av J.-C. n’a qu’un indice de 5.

Suite à une découverte aussi incroyable, une seule idée germe dans l’esprit des volcanologues : trouver le responsable d’un tel événement. Les spécialistes confrontent donc leur piste autour de plusieurs volcans susceptibles de remplir toutes les conditions. Parmi elles, la présence de cendres au niveau des deux pôles prouve que l’auteur de l’éruption provient d’une région intertropicale. Outre cette ségrégation régionale, des candidats tels que El Chichón (Mexique) ou encore le Mont Tarawera (Nouvelle-Zélande) sont écartés au fur et à mesure de l’enquête du fait des différences de compositions entre leurs laves avec celle de l’énigmatique cracheur de magma.

Cependant l’enquête piétine lorsque l’équipe du géographe Franck Lavigne décide de relancer la traque. Bien déterminé à lever le voile sur ce mystère de trente ans, lui et ses collègues tentent d’imaginer l’état actuel du volcan. En se basant sur des prédictions de l’éruption vieille de 800 ans, il en déduit que le cratère doit s’être effondré sur lui-même juste après avoir vidé sa chambre magmatique. Ainsi le paysage de cet ancien géant devrait ressembler à une immense caldeira - cratère géant d’origine volcanique - dont les flancs sont recouverts d’une importante couche de pierres ponces.

La caldeira du volcan Samalas, responsable l'éruption de 1257, se trouve sur l'île de Lombok (Indonésie)
La caldeira du volcan Samalas, responsable l'éruption de 1257, se trouve sur l'île de Lombok (Indonésie)
PHOTOGRAPHIE DE Wikipidea

Fort de cette information, le nombre de volcans potentiellement capables de produire de telles explosions s'est considérablement réduit, le continent africain n’abritant pas de volcans explosifs et le continent sud-américain n'en possédant aucun d'assez puissant. Les recherches se recentrent alors autour de l’Indonésie où les scientifiques observent certaines caldeiras susceptibles d’appartenir au volcan en question.

En 2013, son nom est dévoilé par Frank Lavigne et son équipe dans un article scientifique publié dans la revue PNAS. Il s’agit du Samalas, un volcan indonésien situé sur l'île de Lombok proche du mont Rinjani. Sa caldeira mesure 6 km sur 8,5 avec une profondeur de 800 m. Les premiers éléments de preuves ont été retrouvés dans les Chroniques de Lombok, un ancien manuscrit médiéval sur ôles. Il y est inscrit que le Samalas serait entré en éruption à la fin du 13e siècle. La catastrophe fut si importante que plusieurs villes de la région dont la capitale de l’île, Pamatan furent ensevelies suite à des nuées ardentes.

À l’instar de Pompéi, la ville gît sans doute, encore de nos jours, sous terre. Il ne reste plus qu’à la retrouver afin de percer les derniers secrets de cette éruption volcanique hors norme.

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