Qu’est-ce que le syndrome du vomissement cyclique ?

Le trouble, caractérisé par d’intenses nausées et vomissements, est plus répandu que ce que l'on pensait, surtout chez les enfants et les jeunes adultes.

De Stacey Colino
Publication 3 août 2024, 10:37 CEST
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Le syndrome du vomissement cyclique est souvent non diagnostiqué, et donc non traité.

PHOTOGRAPHIE DE Kinga Krzeminska, Getty Images

Lorsqu'une personne est soudainement prise de nausées intenses, de vomissements, de douleurs à l'estomac qui durent un jour ou deux, voire plus, elle peut soupçonner une intoxication alimentaire ou un virus gastro-intestinal. Mais si cela se produit plusieurs fois par an, cela pourrait être un signe de syndrome du vomissement cyclique, un trouble méconnu qui toucherait approximativement 0,04 % à 1,9 % de la population française.

En juillet, en partie parce que le trouble reste sous diagnostiqué et insuffisamment traité, l'American Gastroenterological Association a publié de nouvelles orientations cliniques pour aider les médecins et leurs patients à reconnaître les signes et les symptômes du syndrome du vomissement cyclique, aussi appelé SVC. En quelques mots, le SVC est une maladie chronique liée à une interaction entre l'intestin et le cerveau et caractérisée par des épisodes récurrents de nausées, de vomissements et de haut-le-cœur, séparés par des périodes sans symptômes.

« On reconnaît de plus en plus que ce trouble est plus répandu qu'on ne le pensait », déclare David Levinthal, gastro-entérologue et neuroscientifique, directeur du Neurogastroenterology and Motility Center du Centre médical de l'Université de Pittsburgh. « Ce n'est pas une maladie à laquelle pensent beaucoup de gastro-entérologues. Il existe de nombreux patients qui souffrent et ne sont ni diagnostiqués ni traités. »

C'est certainement en partie parce que, tout comme les autres maladies causées par l'interaction entre le cerveau et l'intestin, c'est une maladie qui n'est pas prioritaire dans l'enseignement médical, explique Christopher Vélez, gastro-entérologue et directeur associé du programme d'études avancées sur la motilité gastro-intestinale et les maladies fonctionnelles au Massachusetts General Hospital Center for Neurointestinal Health à Boston, aux États-Unis.

« C'est un peu comme une migraine abdominale, une série d'événements anormaux, incontrôlés et à médiation neurologique. Mais comme les diagnostics modernes ne permettent pas de mettre en lumière ce qui ne va pas, « on considère parfois que c'est psychologique. Et quelques fois, on blâme les patients pour leurs symptômes, même si leur qualité de vie en est fortement affectée. »

 

QUI EST SUSCEPTIBLE D'EN SOUFFRIR ?

Bien que ce syndrome puisse toucher n'importe qui, il est plus commun chez les enfants, les femmes et les jeunes adultes.

« Un pourcentage élevé d'enfants atteints de ce syndrome finissent par s'en débarrasser », déclare Anthony Lembo, gastro-entérologue et directeur de recherche au Digestive Disease Institute de la Cleveland Clinic, aux États-Unis. « Pour les adultes, ce n'est pas si simple. »

Parmi les adultes, l'anxiété, la dépression et/ou trouble panique coexistent souvent avec le syndrome du vomissement cyclique, tout comme les migraines. Et, comme les migraines, ce syndrome est parfois héréditaire. De plus, le trouble est légèrement plus fréquent parmi les personnes épileptiques. « Chaque personne a un déclencheur différent », relève David Levinthal, et il peut être difficile d'identifier les déclencheurs. Le stress est un déclencheur courant, tout comme le manque de sommeil, les fluctuations hormonales liées au cycle menstruel, les voyages, le mal des transports, les périodes d'exercice intense et les sources physiologiques de stress telles qu'une maladie ou une intervention chirurgicale.

« Si vous avez toujours eu un système digestif sensible, vous êtes prédisposé·e à ce syndrome », déclare Christopher Vélez. « Cela rend plus sensible aux déclencheurs psychosociaux. »

Marissa Cohen a commencé à avoir des poussées régulières du syndrome du vomissement cyclique à l'âge de deux ans. Parfois, les vomissements étaient si abondants qu'elle n'avait plus rien dans l'estomac et que la bile remontait. Après des années d'errance médicale, un diagnostic a été posé à l'âge de huit ans.

« C'était frustrant pour mes parents et moi parce qu'on savait que quelque chose n'allait pas, mais on ne pouvait pas faire grand-chose sans un diagnostic officiel », révèle Marissa.

Souvent, elle se retrouvait aux urgences d'un hôpital où elle recevait des fluides par intraveineuse et des médicaments pour arrêter les vomissements. Les médicaments l'endormaient généralement et elle « se réveillait comme si rien ne s'était passé, c'était tellement fou », se souvient celle qui est aujourd'hui âgée de vingt-et-un ans.

La majorité des personnes atteintes de ce syndrome ont souvent deux à quatre crises par an. « Il existe des symptômes plus ou moins graves » précise David Levinthal.

Selon, l'AGA, si une personne présente moins de quatre crises par an, chacune durant moins de deux jours, elle est considérée comme souffrant d'un syndrome du vomissement cyclique léger. Si une personne présente quatre crises ou plus par an, chacune durant plus de deux jours et nécessitant une visite aux urgences ou une hospitalisation, elle est diagnostiquée comme souffrant d'un syndrome du vomissement cyclique modéré à sévère.

 

DIAGNOSTIC ET TRAITEMENT

Afin d'exclure des pathologies graves comme une obstruction, qui pourraient produire des symptômes similaires, une endoscopie et/ou des examens d'imagerie, tels qu'un scanner ou une échographie du tractus gastro-intestinal supérieur sont parfois demandés.

Les analyses de sang, y compris une numération globulaire complète et des tests pour mesurer les niveaux d'électrolytes, de glucose et d'enzymes hépatiques dans le sang, et les analyses d'urine font également partie du diagnostic. Mais le diagnostic repose avant tout sur un examen approfondi des antécédents médicaux.

« C'est la reconnaissance d'un schéma [symptomatique] qui constitue l'étape critique », déclare Levinthal. Bien que les poussées du SVC puissent survenir à tout moment, la plupart d'entre elles se produisent tôt le matin.

Les personnes à qui l'on a diagnostiqué un syndrome du vomissement cyclique modéré à sévère prennent souvent des médicaments préventifs, tels que des antidépresseurs tricycliques, comme l'amitriptyline ou la notriptyline, ou des médicaments contre les crises d'épilepsie, comme le topiramate, le Zonisamide ou le Lévétiracétam, sur une base quotidienne. Ces médicaments n'éliminent pas les poussées ; l'objectif est de les espacer et/ou d'en réduire la durée et la gravité.

« L'un des avantages du syndrome du vomissement cyclique est qu'il permet de choisir la situation que l'on accepte de vivre », explique Vélez, en faisant référence au fait que différents traitements peuvent être testés ou combinés.

De nombreuses personnes atteintes de cette maladie présentent des symptômes prodromiques, tels que des douleurs abdominales, des maux de tête, un brouillard mental, des tremblements ou de l'anxiété, une heure ou deux avant de commencer à vomir.

« Environ 70 % des patients peuvent anticiper l'arrivée d'une crise », déclare David Levinthal. « Si vous prenez un traitement au moment même où vous la sentez arriver, vous aurez de meilleures chances de l'éviter. »

Pour les personnes souffrant d'un syndrome du vomissement cyclique léger ou d'une forme modérée à sévère, des traitements tels que des triptans, utilisés pour les migraines, des antiémétiques, médicaments contre les nausées tels que l'ondansétron, la prométhazine ou la prochlorpérazine, ou des sédatifs, tels que l'alprazolam ou la diphénhydramine, sont prescrits pour tenter d'arrêter la crise dans son élan.

Puisqu'il peut être difficile d'avaler un médicament pendant une crise, il est possible de les prendre par d'autres voies : par voie sublinguale (sous la langue), par pulvérisation nasale ou par suppositoire.

De nombreuses personnes, comme Marissa Cohen, ont recours à deux médicaments ou plus pour traiter le SVC. Aujourd'hui, elle prend un antidépresseur tricyclique chaque jour pour essayer d'empêcher les crises et elle a à portée de main des médicaments de secours si elle se réveille avec des nausées, par exemple. Bien qu'elle se rende moins souvent aux urgences qu'auparavant, elle a toujours une à cinq poussées de syndrome du vomissement cyclique par an et doit faire attention à ses déplacements, au cas où elle aurait besoin d'une assistance médicale.

« Le plus difficile », dit-elle, « c'est que je ne sais pas vraiment ce qui va déclencher une crise. »

Si les personnes ne parviennent pas à maîtriser leurs symptômes ou si elles se déshydratent à domicile, elles doivent se rendre au service d'urgences de l'hôpital le plus proche pour recevoir des fluides et un traitement par voie intraveineuse.

Certaines personnes atteintes de ce syndrome utilisent du cannabis, soit à titre récréatif, soit pour soulager leurs symptômes. Le problème, c'est qu'il est parfois difficile de distinguer le syndrome d'hyperémèse cannabinoïde (SHC) du SVC. Dans le cas du SHC, la consommation chronique de cannabis - plus de quatre fois par semaine pendant plus d'un an - peut être associée à des nausées, des vomissements et des douleurs abdominales récurrentes.

C'est pourquoi certains gastro-entérologues recommandent aux consommateurs de cannabis atteints de SVC de s'abstenir pendant trois à six mois pour voir si cela fait une différence, explique Vélez. S'ils continuent à avoir des crises de nausées et de vomissements après cela, on peut exclure le SHC.

Pour soulager les symptômes, les personnes atteintes de SVC prennent souvent des bains ou des douches chaudes, parfois plusieurs fois par jour. Il leur est conseillé de dormir régulièrement, d'éviter les jeûnes prolongés et d'adopter des techniques de gestion du stress telles que la méditation, dont l'utilité a été démontrée.

« Il y a beaucoup de gens qui souffrent de cette maladie et il est possible de le traiter », souligne David Levinthal. « Il faut que les patients fassent entendre leur voix, car on peut leur venir en aide. »

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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