Syndrome des ovaires polykystiques, première cause d’anomalie de l’ovulation au monde

Il ne s’agit pas de kystes, mais bien d’une multitude de follicules qui s’accumulent dans les ovaires. Le tableau clinique répertorie l’infertilité, l’hyperandrogénie et le syndrome métabolique.

De Margot Hinry
Publication 14 mars 2022, 11:28 CET
Illustration montrant un ovaire gauche hypertrophié avec des kystes.

Illustration montrant un ovaire gauche hypertrophié avec des kystes.

PHOTOGRAPHIE DE KATERYNA KON/SCIENCE PHOTO LIBRARY

Selon l'Inserm, 1 femme sur 10 serait atteinte du syndrome des ovaires polykystiques (SOPK), et environ la moitié d’entre elles seraient infertiles. Liée à un dérèglement hormonal, cette pathologie provoque une surproduction d’androgènes, entraînant une élévation du taux de testostérone dans le sang des patientes.

Cycles irréguliers, acné, hyperpilosité, fatigue, migraines, surpoids, dysovulation, aménorrhée, chute de cheveux, « ce sont des symptômes que l’on pourrait qualifier de "communs", qui pourraient ne pas avoir d’importance pour la majeure partie des personnes concernées, qui peuvent passer inaperçus » témoigne Caroline Bernard, présidente de l’association Asso’SOPK. Pourtant, lorsque ces symptômes deviennent trop importants, le diagnostic tombe. Bien qu’encore méconnu du grand public, le syndrome des ovaires polykystiques est la pathologie hormonale la plus fréquente chez les femmes en âge de procréer.

« On ne connaît pas vraiment le point de départ. On n’est pas certains qu’il soit ovarien. C’est peut-être un point de départ de la glande hypophysaire, la glande qui est le chef d’orchestre, qui va contrôler les ovaires et d’autres glandes dans le corps. Il y a probablement une relation avec l’insuline, qui est une hormone sécrétée par le pancréas. […] C’est un enchaînement, le cercle infernal qui fait qu’il y a des anomalies » explique la gynécologue Justine Hugon-Rodin, qui travaille au sein du groupe hospitalier de Paris Saint-Joseph.

Caroline Bernard a été diagnostiquée d’un SOPK à l’adolescence, quand les hormones ont commencé à travailler et que les premiers symptômes se sont fait ressentir. « On naît SOPK » affirme la présidente de l’association, « mais ça se développe à la puberté ». Comme le confirme l’INSERM, cette pathologie est différente pour chaque personne. Tout comme l’endométriose, il n’y a pas un SOPK, mais des SOPK. La pathologie peut être légère et ne pas empêcher la grossesse, comme elle peut être handicapante et rendre infertile.

Le diagnostic ne peut être posé qu’après les premières règles. Trois symptômes principaux sont retenus par les scientifiques du Consensus de Rotterdam. « Les nouvelles recommandations approuvent les critères diagnostiques de Rotterdam chez l'adulte, à savoir la présence de deux critères parmi oligo ou anovulation, hyperandrogénie clinique et/ou biochimique, ovaires polykystiques à l'échographie, après avoir écarté d'éventuels autres troubles. Si les deux premiers critères sont présents, une échographie est inutile pour poser le diagnostic ». Mais selon Caroline Bernard, « même si avoir 2 des 3 critères suffit, une échographie doit être faite ! ».

Le SOPK est la première cause d’anomalie de l’ovulation au monde. « Dans l’infertilité, il y a plusieurs problèmes qui font que l’on peut rencontrer des difficultés à concevoir. […] L’ovule va mal sortir de cet ovaire surchargé. Ça ne rend pas stérile, c’est même plutôt fréquent qu’une femme arrive à tomber enceinte, mais l’infertilité fait partie de cette pathologie, bien qu’elle ne soit pas du tout [systématique] » précise la gynécologue. L’anovulation se traduit par un bouleversement total des cycles menstruels, « soit moins de 35 jours, soit un cycle supérieur à 35 jours » explique Caroline Bernard, soit une absence totale de règles.

L’hyperandrogénie clinique se caractérise par une hyperpilosité pour 70 % des femmes atteintes d’un SOPK, d’une forte acné et d’une éventuelle alopécie ou chute de cheveux précoce. « C’est l’observation d’une pilosité de type masculine. Des poils que l’on observe sur la poitrine, le dos, le ventre, entre les cuisses » énonce la présidente d’Asso’SOPK.

Enfin, le troisième critère de diagnostic est l’observation de « plus d’une vingtaine de follicules » sur les ovaires. « On ne peut prendre en compte la taille des ovaires que 8 ans après les premières règles. En moyenne, elles ont lieu autour de l'âge de 12 ans » ajoute Justine Hugon-Rodin. Les échographies sont faites « en théorie » autour de 20 ans, puisque « c’est courant chez une jeune femme de 16 ou 17 ans d’avoir de gros ovaires plein de follicules, alors il ne faut pas lui coller l’étiquette SOPK [tout de suite]. C’est normal les deux premières années après les règles d’avoir des cycles irréguliers. Il ne faut pas non plus sur-diagnostiquer ». 

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Des spermatozoïdes sont injectés dans un ovule au cours d'une fécondation in vitro. Alors que cette méthode est couramment utilisée comme traitement contre la stérilité, les hommes devenus stériles suite à un cancer lorsqu'ils étaient encore enfants n'ont à ce jour aucune solution de traitement à leur disposition.
PHOTOGRAPHIE DE M.I. Walker, Science Source

LES COMPLICATIONS À LONG TERME

« Certaines ont plus de chance que d’autres et sont diagnostiquées à 15, 16, 17 ans. Plus la prise en charge est faite tôt, moins il y a de risques pour le futur. Le syndrôme des ovaires polykystiques évolue avec l’âge et s’il n’y a pas de réduction de la testostérone, ni de régulation, si elle est produite en trop grande quantité dans le corps de la femme tout au long de sa vie, il va y avoir de l’hypertension, du diabète, un syndrome métabolique, et même des cancers » alerte la présidente de l’association.

Justine Hugon-Rodin relève que le bilan exhaustif spécialisé est primordial pour s’assurer que l’on ne passe pas à côté d’une autre pathologie. « Il faut surveiller les risques métaboliques pour celles qui vont soit être en surpoids, soit en résistance à l’insuline, ce que l’on observe grâce à une prise de sang. Elles vont être plus à risque de faire du diabète plus tard », il faudra également surveiller le risque de l’élévation de l’hypertension artérielle et de maladies cardiovasculaires, ainsi que le développement plus propice de certains cancers.

La prise de poids et le manque de suivi peuvent entraîner une aggravation du tableau clinique. « Il existe une corrélation entre l’indice de masse corporelle et l’infertilité associée à cette maladie ».

Malheureusement, il y aurait encore plus de 50 % des femmes atteintes de SOPK qui ne seraient pas diagnostiquées. Un suivi et la mise en place d’une hygiène de vie adaptée sont primordiaux pour la régulation des symptômes. « Il faut mettre en place une alimentation relative à l’insiluno-résistance. Tout ce qui est sucres n’est pas bon. Il faut diminuer, ne pas remplacer, en essayant d’éviter les sucres rapides. Cela nécessite parfois la consultation de diététiciens ou naturopathes, pour les personnes qui ne veulent pas ou ne peuvent pas prendre de pilule. Il faut également pratiquer régulièrement du sport » conseille Caroline Bernard.

Il n’existe aucun traitement curatif à ce jour pour le syndrome des ovaires polykystiques, ni de traitement systématiquement proposé après un diagnostic. Après un SOPK confirmé, plusieurs options de suivi sont possibles, à commencer par la proposition de la mise en place d’une pilule œstroprogestative pour réduire l’hyperandrogénie. La présidente de l’association Asso’SOPK insiste sur la nécessité d’avoir un suivi après diagnostic, « malheureusement, c’est souvent : "Vous avez un syndrome des ovaires polykystiques, je ne peux rien faire pour vous, au revoir" […] Il faut un suivi, demander un deuxième, troisième, quatrième avis. »

Finalement, la rareté ou l’absence d’ovulation est le symptôme « le mieux pris en charge » selon Caroline Bernard, grâce à la PMA ou aux stimulations ovariennes ou bien encore grâce au drilling ovarien. « C’est une opération qui permet de faire des trous dans les ovaires, pour évacuer les follicules en trop grand nombre, pour libérer les ovaires et essayer de rétablir un cycle et une ovulation de meilleure qualité. C’est temporaire, au fur et à mesure, les ovocytes reviennent stagner, mais c’est une solution. »

De nombreux travaux de recherche et d’études sont en cours, notamment sur les causes de cette pathologie. « Les perturbateurs endocriniens pourraient jouer au fur et à mesure des années, selon les générations. Des tests sont aussi faits sur l’épigénétique, la transmission de la mère à l’enfant, ou encore les causes environnementales » conclut Justine Hugon-Rodin.

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