Un Français sur 10 pense que la Terre est plate
Selon une nouvelle étude Ifop, plus de 9 % des Français croient "possible que la Terre soit plate et non pas ronde comme on nous le dit depuis l'école".
Une étude menée par l’Ifop pour l’institut Jean Jaurès et l’observatoire Conspiracy Watch révèle que 79 % des Français adhèrent à au moins une des grandes théories du complot. Parmi celles-ci, l’étude montre que 9 % des français croient « possible que la Terre soit plate et non pas ronde comme on nous le dit depuis l'école ». Cette théorie n’est pas nouvelle et est très souvent le corolaire de la remise en cause de la conquête spatiale.
LES « FLAT EARTHERS », OU LA CONQUÊTE D’UNE AUTRE VÉRITÉ
La platitude de la Terre est très sérieusement théorisée par une grande communauté de « truthers » qui se veulent chercheurs d’une vérité que la société et ses représentants nous cacheraient. Parmi eux, beaucoup étudient la possibilité d’une Terre plate. La Flat Earth Society, organisation américaine fondée en 1956, structure cette idée et l’argumente en contrant bons nombres de faits établis par la NASA et les autres organismes de recherche en astronomie et aérospatial. Cette communauté rassemble des millions de personnes à travers le monde, surnommées les « flat earthers » (adeptes de la théorie de la Terre plate). Aux États-Unis, ils seraient environ 12 millions à adhérer à cette théorie.
Carte de la Terre plate par Wilbur Voliva
Bien au-delà d’un débat purement idéologique, la théorie est soutenue par un grand nombre d’arguments scientifiques qui contreviendraient aux explications dites officielles. Dans un premier temps, les flat earthers soulèvent la question de la platitude de l’horizon en exprimant une contradiction entre la possibilité d’une Terre sphérique et d’un horizon que l’œil humain voit plat et droit, sans courbure.
Autre élément essentiel de cette théorie : la Terre tourne-t-elle vraiment sur son axe ? Il apparaîtrait en effet que lorsque nous pouvons observer la Lune, notre satellite nous présente toujours la même face. Les théoriciens qualifient ce phénomène d' « heureux hasard ». Tout comme la perception du Soleil et de la Lune à taille égale, ce que nous pouvons observer lors des éclipses solaires. Ils jugent qu’il est un peu facile pour les scientifiques d’expliquer cette similitude par le fait que la Lune serait 400 fois plus petite que le Soleil et le Soleil 400 fois plus éloigné de notre planète que notre satellite.
Autre phénomène, celui de parallaxe. La parallaxe correspond à l’effet visuel créé par le déplacement d’un observateur sur la perception de l’objet observé. En astronomie, la parallaxe est l’angle d’observation d’un astre à partir d’une longueur de référence. Le dilemme que génère la règle de la parallaxe est que les étoiles étant à des distances différentes, nous devrions observer une différence de rapidité de leurs déplacements. Or, d’après les flat earthers, nous n’observons qu’un mouvement uniforme, ce qui signifierait qu’elles sont toutes sur un même plan. Cela s’ajoute à de nombreuses remises en cause de la nature-même des étoiles, les observations astronomiques de ces organisations donnant des résultats très différents des clichés présentés par la NASA.
Afin de corroborer ces théories, des résultats de mesures au laser sur des plans d’eau, qui ne montreraient aucune courbure sur notre bonne vielle Terre.
De nombreuses personnalités n’hésitent pas à afficher publiquement leur adhésion à la théorie de la Terre plate. Plusieurs membres de la NBA comme Shaquille O’Neal ont déjà relayé cette idée sur les réseaux sociaux. Le flat earther le plus célèbre reste le rappeur B.o.B qui a même lancé une campagne de crowdfunding pour récolter de l’argent et ainsi envoyer un satellite dans l’espace pour prendre ses propres photos de la Terre.
D’autres théories, plus mystiques, sont également très populaires sur Internet. La principale repose sur l’idée selon laquelle la planète bleue serait un disque juché sur le dos de quatre éléphants, piliers de la Terre, eux-mêmes transportés sur le dos d’une immense tortue qui transporterait notre planète à travers l’univers. La théorie du disque-monde avait été évoquée et rendue célèbre dans l’œuvre « Discworld » de l’écrivain britannique Terry Pratchett. En 1983, l’auteur décrivait un monde imaginaire où la Terre serait plate et circulaire, complétée à chaque bord par une grande chute d’eau. Ce disque reposait sur le dos quatre éléphants sacrés soutenus par la carapace de la Grande A’Tuin, une tortue gigantesque.
SPHÈRE UN JOUR, SPHÈRE TOUJOURS
Face à la propagation des théories des flat earthers et aux accusations de désinformation, plusieurs scientifiques ripostent. Aussi, lorsque B.o.B dénonce une version officielle mensongère sur Twitter, les réactions ne se font pas attendre. Terry Virts (plus de 200 jours dans l’espace), Scott Kelly (520 jours dans l’espace) et même Buzz Aldrin n’hésitent pas à répliquer et à le renvoyer aux photos qu’ils ont eux-mêmes pris de la Terre depuis l'espace.
Si la Terre est bien ronde, elle n’est cependant pas parfaitement courbée. La répartition des masses, en surface comme en profondeur, n’est pas complètement uniforme. La forme de la Terre évolue en réaction à la gravité. Les grands épisodes glaciers de l’histoire de la Terre ont contribué à son irrégularité en formant des bosses et des creux au gré des millénaires. Ce phénomène n’est cependant pas observable à l’œil humain et n'a pas d'effet direct pas sur la forme globalement ronde de notre planète.
Pour les plus sceptiques, bien des faits constatables par tout un chacun viennent confirmer la rondeur de la Terre. En premier lieu, tous ceux qui ont observé une éclipse lunaire auront constaté que lorsque la Terre vient se positionner entre la Lune et le Soleil, l’ombre formée par celle-ci sur la Lune est complètement sphérique. L’observation astronomique va également en ce sens puisque, en fonction de l’endroit où nous nous trouvons sur la planète, nous pouvons observer certaines constellations quand d'autres ne nous sont pas visibles. Or, si la Terre était plate, nous pourrions tous observer les mêmes astres. À des distances différentes, certes, mais aucun ne serait obstrué.
Le Soleil est aussi un élément révélateur du caractère sphérique de notre planète. Avec une Terre plate, le Soleil resterait observable même lorsque que nous ne sommes pas sous ses rayons de lumière ; la nuit noire et complète n'existerait tout simplement pas. La course du Soleil et la rotation de la Terre sur son axe sont très simplement observables avec la modification de l’ombre sur nos cadrans solaires.
Autre élément propre à notre globe : la répartition de la gravité. Selon la définition d’Isaac Newton, la loi de l’attraction universelle correspond à l'attraction entre des corps ayant une masse gravitationnelle. C’est ainsi que le centre de la Terre représente une masse gravitationnelle assez forte pour que nous gardions les pieds sur Terre. Aux quatre coins du globe, tous les Hommes peuvent évoluer au sol de la même façon car la gravité est la même pour tous, chaque partie de la surface de la Terre étant à égale distance de son centre. Ce phénomène n’est rendu possible que par une forme sphérique ; une Terre plate ne correspondrait pas à une attraction vers le sol mais sur les côtés afin de faire converger toutes les masses vers le même centre gravitationnel.
L’un des phénomènes les plus triviaux permettant de confirmer le caractère sphérique de la Terre sont les fuseaux horaires. Si notre planète n’était pas ronde et ne tournait pas sur elle-même, il serait impossible d’expliquer les différentes expositions au soleil au mêmes heures de la journée dans différentes régions du monde ainsi que le simple phénomène de nuit en l’absence d’éclipse.
Bien d’autres arguments sont avancés par les flat earthers, y compris ceux dénonçant la manipulation de masse par l'image. Si l’existence de cette croyance est déjà alarmante, c’est l’ampleur de l’adhésion qu’elle génère qui préoccupe les scientifiques ; car elle malmène la science au profit des théories du complot.
L'étude Ifop a été réalisée les 19 et 20 décembre 2017 auprès d'un échantillon de 1.000 personnes représentatif de la population française adulte, constitué selon la méthode des quotas et complété par un second échantillon de 252 personnes de moins de 35 ans (dont les résultats ont ramenés à leur poids réel).