Canaries : La vibrante tradition des Lustrales
Les Lustrales sont célébrées une fois tous les cinq ans sur la deuxième plus petite île des Canaries. Un rare moment de communion empreint de traditions.
Les tambours résonnent, les cordes des guitares vibrent sous les doigts agiles, les voix s'élèvent avec félicité. Ce samedi 6 octobre 2018, c'est sur le parking du collège de San Sebastián de la Gomera que le cortège s’est donné rendez-vous. Classée par village et par bandas, l'assemblée entame sa marche vers le centre-ville. Le début d'un week-end festif.
Les Lustrales sont célébrées une fois tous les cinq ans sur la deuxième plus petite île des Canaries. Pendant plusieurs semaines, la Gomera, île de coutumes et de traditions, vibre au rythme des célébrations dédiées à la vierge de Guadeloupe.
En quelques heures, la place historique « Plaza de las Americas » se remplit. Les familles se rejoignent, s'installent sur les quelques tables installées par la municipalité. Tous ont revêtu un costume traditionnel, portant haut les couleurs de leur village ou de leur île. La journée rythmée au son des bandas est placée sous le signe de la communion. On partage, on se mélange. Le silbo, le langage sifflé des Gomeros, résonne dans le village. Il renforce le sentiment d'appartenance et provoque des réactions collectives enjouées. La célébration bat son plein.
Cette dernière fête avant l'arrivée de la vierge est pour les habitants une rare occasion de se retrouver. « Je ne rentre pas souvent aux Canaries. Mais tous les cinq ans, d'une manière ou d'une autre je reviens à la Gomera pour les Lustrales. C'est un moment de partage. Un moment primordial pour nous, les habitants l'île » explique Fernando qui travaille et vit sur le continent.
La fête se poursuit jusque tard dans la nuit, les bandas se relayant une à une dans les rues de la ville ou sur la Plaza de las Americas.
La vierge de Guadeloupe ne fait son apparition que deux jours plus tard, lundi 8 octobre. Fêtée tous les cinq ans depuis la moitié du XIXe siècle, elle est la gardienne de l'île et de ses habitants. Après une attente interminable sur la plage de San Sebastián où les fidèles jouent, crient, chantent, dansent, l'instant tant attendu arrive.
La vierge est embarquée sur un bateau qui rejoint la plage. À la vue de la vierge certains s'évanouissent, pleurent ou entrent dans un état de transe. La vierge provoque chez les plus fervents pratiquants un sentiment unique : « C'est un sentiment indescriptible... C'est de la joie, une journée unique. Voir la vierge de Guadeloupe provoque toujours le même sentiment, nous y sommes très attachés. Elle est la lumière que l'on doit suivre. Elle est notre guide à tous » commente Isabella, 56 ans, très émue au moment de l'arrivée de la vierge sur la plage.
La vierge est ensuite présentée aux habitants sur le perron de l'hôtel de ville par les officiels religieux et civils. Dans une dernière marche en direction de l'église, la vierge, précédée d'un cortège de danseurs et de musiciens, est célébrée par la foule. Installée sur l’autel par une foule extatique, la vierge repose désormais dans la « Iglesia de la asuncion » (église de l’ascension en français).
Le lendemain, une messe en son honneur est célébrée avant qu'une dernière procession à travers la ville ne consacre à nouveau la vierge de Guadeloupe. Les dernières notes de musiques en l'honneur de la protectrice de l'île emplissent l’air. Les derniers pas de danse annoncent la fin des festivités. L’instant présent est savouré par chacun. Ils savent que pour célébrer à nouveau cette « lumière » si singulière, ils devront patienter. Un lustre.