Plages, bouillabaisse et art urbain : petit guide pour visiter Marseille
Ville méditerranéenne par excellence, Marseille est en pleine renaissance depuis une dizaine d’années.
Dans tout Marseille, une multitude de lieux permettent de se détendre et de décompresser après une journée à absorber les couleurs de la ville.
« Marseille a une forte personnalité », lance la guide touristique Alexandra Blanc Véa tandis que nous contemplons les œuvres du cours Julien, quartier recouvert de graffitis. Cette Parisienne de naissance habitant Marseille depuis plus de vingt ans me conduit à travers des rues où sont visibles des appels à la grève tagués à la hâte, puis me montre une fresque immense intitulée « Man vs Wild ». Cette œuvre écologiste de l’artiste marseillais Mahn Kloix couvre la façade latérale d’une maison et montre un homme en short jaune équipé de palmes qui va à la rencontre d’une tortue gigantesque.
« Ici, ou bien on s’y plaît, ou bien on ne s’y plaît pas, mais il n’y a pas d’entre-deux », assène Alexandra. Marseille a un passé fascinant et bénéficie de plus d’ensoleillement que n’importe quel autre endroit en France. Son port étincelle, les fruits de mer y sont sublimes et la beauté brute du Parc national des Calanques n’est jamais loin. Mais la ville, qui commence tout juste à se remettre d’un déclin amorcé au milieu du siècle dernier, compte quelques lambeaux de ruine, c’est indéniable. Si Marseille n’est sans aucun doute pas le premier grand port de commerce à mêler poussière et grandeur, son image rugueuse lui confère une place à part parmi les villes françaises.
Au moins, elle ne manque pas d’œuvres d’art urbain à aller admirer. Les rues colorées du cours Julien s’étirent depuis une place centrale longée de bistrots et de bars que des brins de causette rendent effervescents. Presque chaque centimètre carré de béton fait office de toile et accueille des dessins de personnes aux yeux exorbités, des motifs surréalistes et des messages politiques passionnés.
Ce quartier juché au sommet d’une colline est le cœur d’un Marseille jeune et moderne, mais le très cinématographique Vieux-Port, en contrebas, n’est pas en reste en matière d’animation avec ses bateaux touristiques qui appareillent, ses cafés et ses pêcheurs qui vendent leur prise du matin sur des stands de fortune. La bouillabaisse, ragoût de fruits de mer emblématique de la ville, aurait été inventée par des pêcheurs qui faisaient bouillir une partie de leur récolte dans de l’eau de mer lorsqu’ils étaient au large.
Marseille était l’une des villes portuaires les plus animées au 19e siècle.
Marseille est profondément ancrée dans son histoire maritime, ainsi qu’en témoignent les deux forts imposants qui flanquent l’entrée du port ainsi que la multitude d’îlots rocheux qui gisent dans la mer étincelante à quelques encablures à peine. Des Phocéens hellénophones fondèrent la ville il y a 2 600 ans, ce qui fait de Marseille la plus ancienne ville de France. Au 19e siècle, alors que la domination coloniale française gagnait le globe, l’emplacement stratégique de Marseille sur la Méditerranée transforma la ville en un lieu où confluèrent tous types de personnes, de biens et d’idées. Mais sa dure réputation à la fin du 20e siècle fit qu’elle ne reçut jamais la même attention que Cannes et Nice.
Les choses ont changé en 2013 quand Marseille est devenue Capitale européenne de la culture et que son front de mer s’est vu embellir de projets accrocheurs, au premier rang desquels figure un édifice audacieux de verre à la résille de béton noir : le Musée des civilisations de l’Europe et de la Méditerranée (Mucem), réalisé par l’architecte Rudy Riciotti, né en Algérie. Juste à côté, la Villa Méditerranée, anguleuse et en porte-à-faux, héberge une réplique de la grotte de Cosquer et de ses peintures rupestres préhistoriques, dont les originaux se trouvent dans une calanque inaccessible. Enfin, nichée au cœur du port se trouve l’Ombrière de Norman Foster, ingénieuse canopée réfléchissante imaginée par l’architecte britannique éponyme.
QUE FAIRE ET VOIR ?
Élément du renouveau marseillais entamé en 2013, il s’agit du premier musée entièrement dédié à la culture de la Méditerranée. Les expositions ont autant trait au commerce et à la guerre qu’à des questions intéressant la longévité que confèrerait le régime alimentaire méditerranéen. La résille de béton du musée, qui évoque une coquille, s’élève sur la rive nord du Vieux-Port et est reliée au fort Saint-Jean, bastion du 17e siècle offrant un panorama étourdissant sur le port, par une passerelle suspendue à près de 20 mètres au-dessus des vagues qui viennent longer l’édifice.
Les visites du cours Julien et de ses lieux recouverts d’œuvres d’art urbain proposées par Alexandra Blanc Véa apportent contexte et couleur à l’identité distincte de Marseille. Découvrez comment le hip-hop a influencé la culture marseillaise du graffiti, pourquoi de nouvelles œuvres sont peintes directement sur le bitume et le sens de nombreuses expressions typiques. Il y a également des chances que vous rencontriez dans leurs studios des artistes urbains du cru comme Mahn Kloix.
Situé au nord du Vieux-Port, ce quartier, qui est le plus vieux de Marseille, fut fondé par des Grecs dans l’Antiquité. De nos jours, avec ses paniers suspendus et ses volets vert pastel, celui-ci donne à voir une image d’Épinal de la rue méditerranéenne. Le street art et les cafés mouchetés de soleil qui se tiennent au coin des rues n’affadissent pas ces couleurs, bien au contraire. En contrebas se tient la cathédrale Sainte-Marie-Majeure de Marseille, dont les dômes sont de style byzantin.
La relation de Marseille aux graffiti et à l’art a été pleinement adoptée par ses habitants.
La plage en ville
Le littoral marseillais ne jouit peut-être pas du charme de celui de Saint-Tropez ou d’Antibes, mais ses vingt-et-une plages offrent tout de même un changement de rythme. Celles du Prado sont les plus grandes, tandis que la plage des Catalans est la plus proche du centre, à quinze minutes à pied seulement du Vieux-Port. Sa petite centaine de mètres de sable est très appréciée des habitants, qu’ils soient joueurs de volley-ball ou bien retraités en survêtement adeptes du yoga.
À trois kilomètres environ du Vieux-Port, ralliée fréquemment par des bateaux de touristes, se trouve cette forteresse rocheuse rendue célèbre par un de ses prisonniers fictifs, Edmond Dantès, le comte de Monte-Cristo. Achevé en 1531, le château principal est flanqué de trois tours en pierre, et ses imposants murs, cellules et remparts peuvent se visiter en toute autonomie.
À dix kilomètres environ au sud de la ville s’étire un littoral fait de falaises de roche calcaire que des millions d’années ont sculptées pour en faire des criques. Ce paysage tout en recoins isolés et en roche blanche, jonché d’une végétation éparse d’un vert éclatant, est une escapade incontournable à faire au départ de Marseille. Bien que la terre y soit absente, le parc abrite près de 9 000 espèces végétales ainsi que des oiseaux rares comme l’aigle de Bonelli (Aquila fasciata). Les visites du littoral en bateau sont particulièrement prisées, de même que les excursions en kayak ou en paddle. L’accès au parc par la route est restreint, mais des randonnées partant de l’intérieur des terres ouvrent sur ce paysage remarquable.
OÙ FAIRE DU SHOPPING ?
Avec une canopée en fer forgé au-dessus de l’entrée, avec ses arômes de café et de chocolat qui imprègnent l’air, ce café, qui est également une chocolaterie, est en activité depuis près d’un siècle, et son patrimoine séduit sitôt le pas de la porte franchi. Rentrez chez vous les mains pleines de pralines luisantes, de nougat spongieux et de bonbons multicolores. Des franchises existent dans toute la ville, mais le vaisseau amiral se trouve sur la Canebière.
Marseille fabrique du savon depuis plus de 600 ans en mélangeant eau de mer, huile d’olive et cendre alcaline obtenue à partir d’algues. Traditionnellement d’une teinte vert pistache, ce savon se présente désormais sous une multitude de couleurs. Mettez-vous en quête d’un bateau en bois peint exposé dans une vitrine de la rive sud du Vieux-Port avant de pénétrer dans un espace qu’emplissent des décorations maritimes rustiques ainsi qu’un alliage grisant de senteurs agréables.
Ce concept store artisanal du Panier met à l’honneur les tons chauds de la Méditerranée dans les vêtements, les bijoux, les décorations et les photographies qu’il propose. Des t-shirts conçus localement sont pendus aux côtés de Polaroïds de Marseille accrochés sur des fils à l’aide de pinces à linge miniatures, et des plantes en pot ajoutent un charme douillet à la pièce.
Le musée du savon propose des ateliers et des expositions sur l’histoire de la fabrication du savon dans la ville pour ceux qui cherchent à s’immerger davantage dans cet artisanat.
OÙ MANGER À MARSEILLE ?
Mi-café, mi-librairie, ce lieu excentrique du cours Julien maîtrise les incontournables du petit-déjeuner. Mais l’attrait principal du lieu réside dans ses étagères poussiéreuses garnies de romans classiques, dans le rock n’roll des années 1950 qui passe en fond et dans son méli-mélo de décorations rustiques.
Coiffé d’un chapeau de paille, Mustapha Kachetel est le quatrième propriétaire de cette institution marseillaise fondée par ses ancêtres. La gastronomie nord-africaine proposée rend hommage à sa famille berbère, originaire des montagnes de Kabylie, dans le nord de l’Algérie. Le couscous d’orge forme un lit accueillant pour les ragoûts d’agneau, de bœuf et de poulet qui l’accompagnent et qui peuvent être relevés avec quelques touches piquantes d’harissa.
L’interprétation raffinée de la bouillabaisse que propose le chef Christian Buffa est une leçon de présentation originale mais aussi de fidélité à la recette originale de ce plat typiquement marseillais. Des serveurs impeccablement mis aux souliers reluisants glissent entre les tables et agrémentent la traditionnelle soupe de poisson, un bouillon provençal riche en saveurs composé de saint-pierre, de baudroie, d’anguille et de pommes de terre, d’un trait de pastis qui ne fait pas de mal. Les poissons désossés sont servis séparément.
Les influences nord-africaines du Fémina se reflètent jusque dans son intérieur.
VIVEZ COMME DES MARSEILLAIS
Port coupé du monde
À trente minutes à pied du Vieux-Port, en direction du sud, en partie bordé par la route escarpée de la corniche, se trouve le Vallon des Auffes, un minuscule port de pêche clos ceint de bars à vin et de bistrots charmants. Les falaises abruptes des environs et le pont de pierre enjambant l’entrée du port en font un décor de carte postale. Toutefois, pour profiter pleinement de ce languide piège à soleil durant l’après-midi, mieux vaut avoir un verre frais à la main.
Si la bouillabaisse est le plat qu’on associe le plus facilement à Marseille, la cité phocéenne nourrit également une affection profonde à l’égard des pizzas. À la Bonne Mère, restaurant de vingt-cinq couverts niché sur une petite place du montueux quartier Vauban, les plats au feu de bois sont sublimes. Ne passez pas à côté de la pizza aux anchois épicés garnie d’une simple base de tomate et parsemée d’olives.
Scènes de marché
Des marchés de toutes sortes s’installent chaque matin dans les rues de ce port de commerce traditionnel. Le marché des Capucins, dans le quartier désuet de Noailles, propose une variété de puissants arômes épicés d’Afrique du Nord, tandis que sur le marché de la Plaine on vend à la criée une multitude de choses, des piments rouges forts autant que des doudounes hautes en couleurs.
Marseille, ville aux mille couleurs.
OÙ DORMIR À MARSEILLE ?
La Cité Radieuse, œuvre emblématique de l’architecte franco-suisse Le Corbusier, est un immeuble moderniste d’habitation classé au Patrimoine mondial de l’UNESCO qui abrite également vingt-et-une chambres d’hôtel. Les lambris en bois et les touches de couleur de ses chambres minimalistes dégagent une élégance décontractée. Il se situe à trois kilomètres du centre-ville, près du stade qui accueillera des rencontres de rugby. Le toit privé offre des vues splendides.
Des chambres de style moderniste scandinave sont réparties sur deux maisons de ville converties datant des 18e et 19e siècle dans un quartier relativement calme à quelques minutes à pied au sud du Vieux-Port. Le jardin de bambou constitue un espace vert isolé mais bienvenu dans cette partie de la ville. C’est aussi l’un des endroits les plus raffinés pour prendre un petit-déjeuner à Marseille.
Dans cet hôtel perché au sommet d’une colline, les chambres offrent parmi les meilleures vues sur les eaux scintillantes du port, sur les mâts qui dansent et sur l’amas distant de toits. Attendez-vous à un service exceptionnel et à des chambres à la taille généreuse, et n’oubliez pas d’aller déguster un cocktail sur le toit inondé de soleil de l’hôtel.
SORTIR LE SOIR
Des rythmes entraînants retentissent derrière les murs de cette salle de concert rock en activité depuis plus de trente ans et située dans une rue en pente près du cours Julien. Malgré l’accent qui y est mis sur le rock, les soirées à thème sont œcuméniques, on y passe du hip-hop comme de la soul. C’est un lieu discret et assez intimiste qui attire un public éclectique.
Ce bar décontracté situé près des contreforts du fort Saint-Nicolas, au sud de l’embouchure du port, est le seul de Marseille à produire l’ensemble du vin qu’il propose sur place ; les cuves en métal où le jus de raisin est vinifié sont visibles derrière le comptoir. Un tableau noir régulièrement mis à jour annonce les mets qui seront accordés avec les vins : sashimi de thon, œufs mimosas, etc.
Serré entre un magasin de cigares et un restaurant tunisien près du Vieux-Port, ce lieu animé est plus spacieux à l’intérieur qu’il n’y paraît et propose à la pression vingt-cinq bières différentes dont les détails sont donnés sur un grand écran au-dessus du bar. Il n’est pas rare que la stéréo crache du grunge des années 1990 pendant que les clients se délectent d’une vaste gamme de sours, de stouts et d’IPA font le plaisir des clients.
Le goût des sardines en chocolat vendues à la Torréfaction Noailles.
Cet article a été réalisé avec l’aide d’Atout France UK et de Marseille Tourisme et a initialement paru dans le magazine National Geographic Traveler en langue anglaise.