Xi’an, l'autre grande muraille de Chine

La muraille de Xi’an, de 14 kilomètres de long, est considérée comme la muraille la mieux préservée de Chine, et pourrait bientôt être inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO.

De Charukesi Ramadurai
Publication 12 mars 2025, 15:06 CET
La muraille de Xi’an, de 14 kilomètres de long, est considérée comme la muraille la mieux préservée ...

La muraille de Xi’an, de 14 kilomètres de long, est considérée comme la muraille la mieux préservée de Chine, et pourrait bientôt être inscrite au Patrimoine mondial de l’UNESCO.

PHOTOGRAPHIE DE Mariusz Kluzniak, Getty

C’est le week-end de la fête de la mi-automne à Xi’an et toutes les routes mènent à la porte sud des remparts de la ville. Dans la province centrale chinoise de Shaanxi, Xi’an est surtout connue pour le musée qui accueille les guerriers en terre cuite, commandé par le premier empereur de Chine pour le protéger après sa mort. En ce samedi soir cependant, tous les regards sont braqués sur la muraille.

Des familles s’offrent une petite balade du soir, les enfants rient et jouent, on passe devant des marchands et des musiciens de rue, des touristes à vélo, des stands de nourriture et des magasins de souvenirs. Des couples vêtus de somptueuses robes rouges se pavanent sous des spots pour leurs photos de mariage. Pendant ce temps, d’autres photographes capturent des dizaines de clichés de jeunes femmes habillées dans des hanfu à motifs floraux, ces costumes traditionnels de la dynastie Tang qui connaissent un regain de popularité auprès de la jeunesse chinoise.

Des dizaines de tours de garde, parapets et pavillons sont répartis sur la longueur de la muraille. Alors que le crépuscule s’installe, les lanternes rouges et les lumières s’allument, donnant à la scène une atmosphère féérique.

 

LES MURAILLES DE CHINE

Quand on associe « muraille » et « Chine » dans la même phrase, on pense généralement à cette structure titanesque qu’est la grande muraille de Chine. Mais, à travers le pays, il existe des dizaines, si ce n’est des centaines, de remparts qui encerclent des villes. Entre autres à Beijing (Pékin), Nankin, Fenghuang, Pingyao et Xi’an. « En chinois, le mot pour dire ville, cheng / 城, signifie ville fortifiée », explique Kenneth Swope, professeur d’histoire à l’Université du Sud du Mississippi, expert en histoire militaire impériale chinoise.

Yinong Cheng, professeur à l’École d’histoire et d’études des archives de l’Université de Yunnan ajoute que les fortifications autour des villes remplissaient trois fonctions principales : la défense, la protection contre les inondations et la démonstration de puissance impériale.

Plusieurs de ces remparts, datant des dynasties Ming et Qing, figurent parmi les candidats au Patrimoine mondial de l’UNESCO. La muraille de Xi’an, érigée durant la dynastie Tang (618-907) et plus tard étendue sous la dynastie Ming (à partir de 1370), est considérée comme la plus complète et la mieux préservée. Elle mesure 13,7 kilomètres de long et 12 mètres de haut, et 15 mètres de large. Aux quatre points cardinaux s’ouvrent quatre portes principales. La muraille compte quatorze portes mineures et est entourée de douves.

Kenneth Swope souligne que plus un dirigeant était puissant, plus les murs étaient hauts et impressionnants. Pour Xi’an, anciennement Chang’an, une cité importante au temps de l’empire, cela n’est pas surprenant. La ville a servi de capitale aux dynasties Han, Sui et Tang. Elle était aussi le point de départ du réseau de routes commerciales, la route de la Soie. C’était une ville bien urbanisée, construite selon un quadrillage parfait, la muraille l’entourait et formait un rectangle complet. Il est encore aujourd’hui possible de parcourir l’ensemble des remparts sans s’arrêter.

 

L’HISTOIRE DE LA MURAILLE DE XI’AN

« La ville a toujours été un lieu important, tant pour les transactions commerciales que diplomatiques. Il ne fait aucun doute que Chang’an était déjà fortifiée dans les débuts de l’empire, vers les 3e ou 2e siècles avant Jésus Christ », affirme Hilde De Weert, professeure d’Histoire chinoise et moderne à l’Université catholique de Louvain en Belgique. « Alors, quand on dit que la muraille date du 14e siècle, il s’agit de la première rénovation [d’envergure] documentée. »

La raison derrière la grandeur de la muraille provient de l’importance stratégique de Chang’an, associée au besoin de projeter l’autorité de l’État au travers de tels monuments, qui régnait sous la dynastie Ming. « Je n’arrive pas à penser à une invasion qui aurait mis en danger cette [muraille], elle n’est même pas proche d’une frontière majeure », confie le docteur Lars Laaman, professeur assistant d’Histoire à l’Université SOAS de Londres. Selon Kenneth Swope, la dynastie Ming représentait le paroxysme de « l’architecture impériale », elle a offert des édifices majeurs comme la Cité interdite et le temple du Ciel à Beijing. Les dirigeants Ming, qui font suite aux Mongoles nomades, ont vu dans ces murailles l’occasion de reconstruire la fierté chinoise.

 

LA MURAILLE AUJOURD’HUI

Le but premier de ces murailles aurait été de contenir les cités et la population à l’intérieur d’un périmètre. Mais, au fil du temps, les villes ont grandi en-dehors des ces frontières, transformant les murailles en anachronismes. Du haut des remparts de Xi’an, on n’échappe pas aux vues et bruits de la vie moderne. Gratte-ciels, néons, klaxons de voiture et piétons qui se hâtent. Après l’armée en terre cuite, la muraille est maintenant l’une des attractions touristiques parmi les plus populaires. Des centaines de célébrités s’y sont rendu, comme Bill Clinton, Michelle Obama ou Mark Zuckerberg, qui a fait un footing sous la pluie sur son chemin de ronde.

La muraille a failli être détruite dans les années 1950, une conséquence de la politique du pays, le Grand Bond en avant. Yinong Cheng explique que, même si des démolitions de grande ampleur avaient déjà eu lieu bien avant, vers la fin de la dynastie Qing (autour de 1912), le mur est resté en grande partie intact, grâce au statut d’ancienne capitale historique de Xi’an. C’est plus tard qu’est arrivé le véritable défi.

« L’histoire de la conservation nous mène de la dynastie Ming à Mao Zedong », explique le docteur Lars Laaman, faisant référence au couple d’architectes de renoms Lin Huyin et Liang Sicheng. « C’était une lutte de pouvoir au sein du parti communiste, lorsqu’une faction souhaitait se débarrasser d’anciennes structures médiévales du pays car ils pensaient que, dans le monde moderne, il n’y avait pas de place pour de telles reliques du passé. » Lin et Liang se sont battus pour préserver les murailles à travers la Chine, ils ont perdu la bataille à Beijing mais pas à Xi’an.

Hilde De Weerdt ajoute que la lutte entre conservation et modernisation est universelle, prenant l’exemple du démantèlement de murailles médiévales en France et en Italie à la fin du 19e siècle et au début du 20e. « Une grande partie de ce que l’on voit aujourd’hui de la muraille de Xi’an est reconstruit avec des matériaux et un mode de pensée modernes », explique-t-elle. Cependant, cette version de la muraille intègre un angle socioculturel : les locaux, comme les touristes, ont la possibilité d’apprécier l’héritage de la ville, tout en l’utilisant comme un espace public.

 

SE DÉPLACER À XI'AN

Xi’an est connecté à toutes les grandes villes de Chine, les voyageurs peuvent donc s’y rendre en avion ou en train à grand vitesse. Vous pouvez également atterrir à l’aéroport international de Xi’an Xianyang depuis quelques villes d’Asie comme Hong Kong, Séoul, Kuala Lumpur et Beijing. Une fois à Xi’an, la cité est facile à explorer, à pied ou en métro.

Charukesi Ramadurai écrit sur les voyages, la culture, l’environnement et la durabilité pour plusieurs journaux à travers le monde. Suivez ses voyages sur son compte Instagram.

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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