Pakistan : l’appel des montagnes
L’extrême nord du Pakistan abrite certains des sommets les plus hauts du monde et une forte identité culturelle. Pourtant, les touristes s’y font rare. Une randonnée guidée explore ce coin spectaculaire d’un pays méconnu.

La chaîne de montagnes du Karakoram, dans la région du Baltistan. Malgré ses 6 096 mètres d’altitude, le pic Laila ne compte pas parmi les 100 sommets les plus hauts de la chaîne.
Les prières du vendredi sont terminées et les rues de Rawalpindi sont chaudes, bruyantes et bondées. Les cyclomoteurs rugissent en se frayant un chemin parmi la foule. Dans la masse, des détails attirent le regard. Des barbes teintes au henné et des hijabs colorés. Un affûteur de couteau noyant les pavés sous les étincelles. Et quatre passagers accompagnés d’une chèvre tassés dans un pousse-pousse. Dans une allée, des garçons jouent au cricket sous un enchevêtrement de lignes électriques. L’air est lourd. Les freins grincent, la sueur perle sur les visages.
« La saison des mangues commence », dit la guide touristique locale Aneeqa Ali en jouant des coudes à travers la foule. Elle pointe du doigt un étal au bord de la route, au milieu de la marée humaine, sur lequel les fruits jaunes s’entassent. Au-dessus de nous, le Soleil tape sur les hauts bâtiments couleur sable. « J’adore cette période de l’année. Le mois de juin, c’est la saison idéale pour randonner », confie-t-elle dans un sourire. « Ici, il fait chaud, mais il fait frais dans le Karakoram. Vous verrez quand vous serez dans les montagnes. »
Aneeqa a lâché ses cheveux et porte un shalwar kameez à motif cachemire (une tunique et un pantalon large). Elle travaillait auparavant dans le monde de la finance, mais après avoir découvert l'incroyable potentiel de son pays en tant que destination d’aventures, elle a décidé de se reconvertir dans le tourisme. « Internet est un véritable trou noir quand on cherche des informations pour voyager au Pakistan », explique-t-elle. Elle doit élever la voix alors que nous nous faufilons entre des charrettes pleines à craquer de gingembre et d’amandes. « Même trouver des restaurants ou des billets de train n’est pas facile. Mais il ne faut pas que les gens se découragent pour autant. »
C’est un bon conseil. Je suis au Pakistan dans le cadre d’un nouveau voyage guidé organisé par l’agence de voyage Intrepid Travel et, depuis que les roues de mon avion ont touché le tarmac, tous les doutes que j’avais se sont évaporés. Un sentiment d’insécurité ? Pas vraiment, sauf si on compte les locaux qui me saluent tandis que j'essaye d'esquiver les cyclomoteurs. Des attentions non-désirées ? Juste de timides demandes de selfies de la part de jeunes, curieux de rencontrer un touriste étranger. Une paperasserie interminable ? Les autorités ont récemment supprimé les frais de visas pour les touristes en provenance de 126 pays, dont mon Royaume-Uni natal, ce n’était donc pas un problème.

Le musée Lok Virsa à Islamabad met la culture pakistanaise à l’honneur, on peut aussi y observer des performances musicales.
Le Pakistan est un pays jeune à l’histoire ancienne. Fondé après la partition des Indes selon les frontières religieuses en 1947, ses terres ont abrité des civilisations anciennes et son passé est jalonné par les différents colons. Durant ce voyage, nous découvrons certains de ses nombreux visages. Au nord, la ville animée de Rawalpindi, à l’architecture pré-partition et abritant les ruines d’un ancien temple hindou, n’est qu’à une heure de route d’Islamabad, où se situe notre quartier général. C'est dans la capitale, bâtie à partir de rien dans les années 1960, que nous passons les deux premières nuits.
Mais ce voyage se passera principalement dans la région du Baltistan, à l’extrême nord du pays, berceau de la deuxième plus haute chaîne de montagnes du monde : le royal Karakoram, couronné de neige éternelle. Au Népal, pays voisin, plus d’un million d’aventuriers se rendent chaque année dans l’Himalaya. En comparaison, la chaîne du Karakoram n’attire que 15 000 voyageurs par an.
C’est à douze que nous allons explorer l’une des parties les moins connues des montages. Le point culminant de notre voyage est une randonnée jusqu’au camp de base d’Amin Brakk, à 4 300 mètres d’altitude. « Personne ne raconte l’histoire du Pakistan », me confie Aneeqa. « Les vallées les plus reculées sont d’une beauté extraordinaire. » Cela, comme je le découvrirai bientôt, était un euphémisme aux proportions alpines.

Des artistes dans des ateliers d’Islamabad fabriquent à la maison des stickers pour les pick-ups colorés du Pakistan.
Avant cette excursion cependant, nous passons un moment à Islamabad. La ville a remplacé Karachi, une ville de la côte, en tant que capitale en 1967 et c’est aujourd’hui plus d’1,2 million de personnes qui y vivent. La capitale est aussi structurée qu’elle est désorganisée. Les allées bordées de figuiers et les bâtiments municipaux aux façades vierges se mêlent aux berlines, aux cyclomoteurs à trois passagers et aux pick-ups colorés, tandis que des chameaux se reposent au bord d’un chantier.
Pour notre première soirée, nous nous rendons au sous-sol d’un restaurant, le Khola Khola, où les margaritas sans alcool apaisent le goût prononcé des samosas au chaat (un mélange épicé de pois chiche). Au mur, des photos encadrées des Beatles et de Frida Kahlo côtoient des célébrités culte pakistanaises. Une peinture murale représente le visage de l’ancien premier ministre, Imran Khan, sur le corps du Rambo de Sylvester Stallone. Et, dans ma chambre d’hôtel, les chaînes de télévision alternent entre cricket et politique.
Ce n’est pas Aneeqa qui nous accompagnera dans notre périple à l’extrême nord, mais Muneer Alam, un de ses collègues guides, une force de la nature au regard amical et au sourire pour lequel on gravit des montagnes. Dans un pays aux multiples ethnicités à la population avoisinant le quart de milliard, Muneer est né dans la région du Baltistan et il s'est habitué à la quiétude magnifique du Karakoram. « Je suis un homme des montagnes », me dit-il en guise de présentation, à Islamabad.
Il nous emmène à la mosquée Faisal, celle de la capitale, le veille du départ de notre avion pour un voyage d’une heure vers le nord. Dressée sur les collines vallonnées en périphérie de la ville, il s’agit de la plus grande mosquée d’Asie du Sud et la cinquième plus grande du monde. Autour de son centre pyramidal, quatre minarets s’élèvent vers le ciel.
« Il faut enlever vos chaussures ici », déclare Muneer alors que nous approchons de la vaste cour. Le bleu du ciel commence à s’assombrir, c’est une chaude soirée et le chant des étourneaux se mêle aux discussions des centaines de personnes qui attendent l’appel à la prière. Sous mes pieds, je sens la chaleur des pierres de la cour. La mosquée est monumentale.
Je remarque le regard de Muneer, dirigé vers le croissant fin de la Lune, qui brille au-dessus des collines. « C’est comme le drapeau du Pakistan », remarque-t-il. Il se frotte ensuite les mains et ses pensées se tournent vers le Karakoram, à 300 kilomètres de là. « Je pense que c’est de bon augure pour notre aventure. »
VALLÉES ET VILLAGES
Le Pakistan abrite cinq montagnes qui culminent à plus de 8 000 mètres d’altitude et Sadiq Sadpara a fait l’ascension de chacune d’elles. Je le rencontre sur les rues creusées par le passage des véhicules, au milieu des cages des poulets de l’ancien bazar de Skardu. Après une jeunesse passée à faire les guides de montagne, il gère à présent un étal de marché spécialisé dans le matériel de randonnée. Il porte un chapeau traditionnel en laine, arbore une épaisse moustache et compte sur ses doigts à mesure qu’il se remémore les ascensions dont il est le plus fier. « Six fois le G2, deux fois le G1 », énumère-t-il doucement. « Et, bien sûr, le K2. »
Lorsque l’explorateur britannique Thomas Montgomerie a baptisé les plus hauts pics du Karakoram en 1856, il est allé au plus simple. Leur nom vient de l’ordre selon lequel il les a gravis. Le K, c’est pour Karakoram, tandis que le G désigne le Gasherbrum, un massif de la même chaîne. Aux montagnes les plus extraordinaires de la Terre, il a assigné des noms qui trouveraient plus leur place au sein d’une salle de classe.
C’est un miracle qu’il n’ait pas laissé place à plus de fantaisie. K2 est, après tout, le deuxième plus haut pic du monde, invisible à nos yeux seulement à cause de la multitude de sommets qui l’entourent. Dès le moment où nous avons foulé le sol de Skardu, une petite ville de la région du Baltistan, une vision frappante nous a accueillis. L’horizon n’est qu’une ligne de crêtes qui jaillissent du sol telles des pointes de flèches, et qui dominent des gorges aux profondeurs gargantuesques. Des vallées battues par les vents s’étendent à travers la région, chevauchées par de distants glaciers qui se détachent par leur éclatante blancheur de l’horizon argentée de la roche.

La vallée du fleuve Shyok, un tributaire de l’Indus.
En faisant route vers l’Est, à travers les montagnes, en direction du village de Kanday qui marque le début de notre randonnée, nous nous arrêtons au-dessus d’un large fleuve sur lequel se reflètent les rayons du Soleil. Deux personnes, des fourmis à nos yeux, se trouvent de l’autre côté de la rive. Les eaux sont tonitruantes et d’un gris presque laiteux. « L’Indus », nous présente Muneer. « Il prend sa source près du mont Kailash, au Tibet et se jette dans la mer d’Arabie en passant par le Pakistan. C’est la source de notre vie. »
Comme le fleuve, les habitants de la région, les Balti, sont originaires du Tibet, d’où ils sont arrivés il y a plus de 3 000 ans. Ils sont majoritairement chiites, tandis que le pays est à dominance sunnite, illustrant le patchwork multiculturel complexe du Pakistan. Leur langue natale, également appelée le balti, compte parmi les soixante-dix langues parlées dans toute la nation. Le Baltistan, d’une superficie de près de 72 000 kilomètres carré, est surnommé le Petit Tibet, bien que là-bas, rien ne soit petit.
La route jusqu’à Kanday s’est passée sur deux jours, notre petit 4WD serpentant à travers un royaume de roc et de rivière. Les villages, lorsque nous les rencontrions, étaient pareils à de vertes oasis. Nous nous sommes arrêtés dans l’un deux, Yugo. De la route, il n’avait l’air d’être qu’un amas d’abricotiers. Inayat Yugvi, l’un des habitants, nous guide hors de ce labyrinthe pour nous faire parvenir à un dédale de maisons en pierre que divisaient des avenues ombragées par les peupliers. Des papillons blancs volettent autour de nous. « Il y a ici 600 foyers, tous vivent de la ferme et du bétail », explique Inayat en nous menant à travers des chaînes d’irrigation creusées à la main qui nourrissent le sol d’eau des glaciers.
Les maisons sont principalement à trois étages, le rez-de-chaussée étant dédié aux poules et au bétail. Les jeunes hommes s’attèlent à la construction d’une mosquée, la quatrième selon Inayat, et les femmes rincent des vêtements de toutes les couleurs de l’arc-en-ciel dans un ruisseau de montagne. Nous longeons des plants de tomates et des champs de blé près à être fauchés. « J’espère attirer plus de touristes ici, leur montrer notre façon de vivre », continue Inayat, qui fait payer une petite participation pour les visites et partage l’argent avec la communauté. Il me tend des cerises fraîchement récoltées, bien mûres, juteuses à s’en tacher les lèvres. Au cours de l’année écoulée, près de 500 visiteurs sont passés par Yugo.
Le but d’Inayat, d’apporter des bénéfices à son village en immergeant les voyageurs dans une destination méconnue, ressemble à celui de notre voyage. Les touristes abondent vers certains endroits magnifiques du Baltistan, surtout pour visiter les lacs de la vallée de Hunza, à 20 kilomètres de là. Les zones dans lesquelles nous nous trouvons sont cependant beaucoup plus calmes.
C’est surtout vrai dans le cas de Kanday, le village qui marque le départ de notre randonnée. Nous l'atteignons après un arrêt à Khaplu pour passer la nuit, un village dominé par d’immenses montagnes blanchies par la neige. Son fort du 19e siècle lui confère des airs d’avant-poste. Plus isolé encore que Yugo, Kanday se trouve en bordure d’une rivière, à l’entrée d’une vallée coupée du monde. Notre expédition est un apport de revenus pour une vingtaine de locaux, porteurs et cuisiniers, qui nous accompagneront dans les hautes altitudes. L’accueil est chaleureux. « Bienvenue au Pakistan ! » s’écrie un jeune garçon d'à peine une dizaine d'années, tout sourire. Un festin de dahls et de currys vient compléter le tout et nous mangeons à même le sol.


Randonner au-dessus de la vallée, c’est marcher autour de la demi-douzaine de glaciers qui l’entoure.
Des panneaux à destination des touristes ont récemment été installés sur la piste de la vallée de Nangma.
Le signal du départ est donné après le déjeuner. Notre destination finale, la vallée de Nangma, un bassin qui culmine à 3 900 mètres, est uniquement atteignable à pied. La première partie de la randonnée nous fait passer entre deux falaises de granit qui nous dominent du haut de leurs 900 mètres. En les traversant, on a l’impression de pénétrer sur une terre promise. Nous nous trouvons sur d’étroits sentiers de bergers, et le silence qui nous entoure ainsi que les proportions épiques des lieux nous transportent en quelques minutes.
Le chemin est escarpé. Je progresse lentement, prenant garde de ne pas m’essouffler. À mes pieds poussent des herbes aromatiques et au-dessus de moi me toisent des pentes vertigineuses. Nous atteignons le premier site de campement au bout de cinq heures, le lieu de pâturage estival de Mingulo Broq. En ôtant mon sac de mes épaules, je me rends compte que, tout autour de nous, se dressent des pics aiguisés, une véritable forteresse de pointes rocheuses. Les montagnes sont couvertes de glace, leurs sommets sont bruts et acérés.
Les tentes ont été dressées avant notre arrivée par un groupe de porteurs partis en éclaireurs. Je fais alors la seule chose qu'il reste à faire à ce moment-là et j’accepte leur invitation à une partie de cricket. Mon médiocre niveau de jeu n'est pas à la hauteur, mais jamais une batte en bois n’a tapé une balle dans un lieu aussi idyllique.
ATTEINDRE LES SOMMETS
Un appel de la nature me fait quitter ma tente autour de 3 h du matin. L’air de la nuit est froid et le ciel est constellé d'étoiles. La Voie lactée rayonne en un arc au-dessus de moi. En préparant mon voyage, j’ai étudié les cartes de cette région-là du Pakistan, et les pays voisins m’avaient paru proches, l’Inde, la Chine, l’Afghanistan. Mais à présent, le monde extérieur semble à des années-lumière de moi. Sur les plus hauts sommets, la neige éternelle reflète faiblement la lumière des étoiles.
« Chalain ! Allons-y ! » lance Muneer plus tard durant la matinée, après avoir petit-déjeuné tôt avec un pain plat chaud et un thé brûlant. Notre guide nous distribue des sachets de noix et de mûres séchées pour manger tout en marchant. Il nous reste encore 400 mètres d’altitude à gravir avant d’atteindre notre campement de la vallée de Nangma et Muneer aimerait les laisser derrière nous rapidement. Au bout d’une heure de marche, entourés par les yaks qui paissent alentour, une randonneuse en solo descend la piste, accompagnée de son guide. En trois jours, ce sont les seules personnes que nous avons croisées.
À mesure que le sentier continue de grimper, longeant des saules noueux, j’emboîte le pas de Liaqat Ali, le porteur en chef. Il avance avec l’allure d’un grimpeur né. « Des craves à bec rouge », me dit-il en désignant du doigt des oiseaux noirs qui filent le long d’une falaise. Peu après, il pointe vers un immense pic escarpé au loin. « On l’a grimpé pour la première fois en 2022, c’était un groupe de Hongrois. Le pic n’avait pas de nom, avant. Je menais l’expédition, alors ils lui ont donné le nom de mon fils : le mont Ananat », m’explique-t-il.
La vallée de Nangma arrive sans prévenir. C’est comme si une main céleste avait placé une dizaine de monts Blanc pour entourer le plus majestueux des amphithéâtres. Et il n’y a personne pour le voir. Au campement, à l’ombre du glacier colossal Shingu Charpa, l’herbe sous nos pieds est vert émeraude. Un ruisseau gargouille tout proche des tentes et, lorsque j’y plonge mes doigts, le froid les endort en quelques secondes.
Dans la tente qui nous sert de mess, éreintés par la montée, nous festoyons de soupe de nouille et de caris de poulet. Nous échangeons sur les raisons de notre voyage, et l’espoir que les communautés locales en bénéficieront tout autant que les voyageurs, que l’expérience aidera à changer les idées que l’on a sur un pays méconnu. « La région a besoin d’un tourisme durable et responsable », insiste Muneer.
Ses vues qui vous happent et vous donnent l’impression de rêver sont un formidable atout. S’il existe sur Terre un lieu plus majestueux encore que la vallée de Nangma où passer une nuit sous une tente, il doit être bien caché. Le sentiment de solitude qui nous envahit après le coucher du soleil, entourés par ces immenses montagnes, est à faire perdre la tête.
Et il y a plus à venir encore. L’ascension finale de notre voyage est une boucle de randonnée jusqu’au camp de base d’Amin Brakk, qui trône à 4 300 mètres au-dessus du niveau de la mer. Nous montons lentement, sonnant le départ en fin de matinée, le long d’un sentier rocheux qui mène hors de la vallée. « La dernière fois que je suis venu, le mois dernier, explique Muneer, j’ai vu des excréments encore frais de léopards des neiges ». Je parcours des yeux le gris anthracite de la montagne à mesure que nous marchons, mais ne vois que de la glace et des traces de yak, ce qui ne m’empêche pas d’être sur un petit nuage. Se trouver ainsi au cœur de la nature a de quoi alimenter les sensations fortes à l’infini.


Noor un Nisa est l'une des rares femmes employées du secteur du tourisme.
Un accueil fait de mûres, cerises et pastèques attend les visiteurs du village de Yugo.
La température chute. Je garde les yeux baissés pour ne pas trébucher sur le chemin qui serpente le long de la montagne. Des fleurs sauvages rouges poussent entre les interstices rocheux du sol, et du lichen orange vif s’accroche sur les pierres qui bordent le sentier. Alors que nous montons plus encore, la neige commence à tomber. Cela fait maintenant trois heures que nous grimpons et nous atteignons un plateau, balisé par un cairn. Nous venons d’arriver au camp de base. Liaqat désigne un mur de granit, à l’ouest. « Amin Brakk », dit-il. Je lève les yeux et admire les pentes striées qui nous encerclent. Il y a de plus hauts sommets dans la chaîne du Karakoram mais, ici, au cœur des montagnes avec le vent qui souffle sur mon visage, je me sens déjà transporté.
Deux jours plus tard, je sirote mon café et le Soleil se lève sur le fort de Shigar, un hôtel historique de la vallée s’étendant juste au nord de la route qui nous ramène à Skardu. Le fort de pierre du 17e siècle domine une rivière à l’eau claire. Je bavarde avec Noor un Nisa, une jeune réceptionniste de l’hôtel qui a, en 2021, brisé les codes. Elle est devenue la première femme à être employée ici et, depuis, plusieurs autres ont suivi son exemple. Elle porte un hijab bordeaux et on lit la détermination dans son regard.
« J’étais déterminée à avoir ce travail », accentuant ses paroles en tapotant la table du doigt. « C’était un défi, mais je voulais faire partie de l’industrie du tourisme. » Autour de nous, la ligne d’horizon est déchirée par les pics des montagnes. Cette partie du Pakistan est le titan endormi des destinations touristiques et ses défenseurs parlent avec passion de son potentiel. « Pour moi », commence Noor en m’offrant sur un plateau le mot de la fin, « le tourisme c’est le futur ». Et dans une région où l’hospitalité se lit sur les visages jusqu’à en devenir un mode de vie, où les sentiers montagneux sont tout simplement transcendants, le tourisme mérite d’être le futur.
GUIDE DE VOYAGE
Interpid Travel propose un itinéraire de randonnée à travers les montagnes du Karakoram, de 10 jours, à partir de 3 000 €. Le logement, le transport terrestre, la plupart des repas, des activités et les services d’un guide local sont compris dans le prix. Les vols internationaux ne sont pas compris.
Comment s’y rendre et s’y déplacer
De l’aéroport Charles-de-Gaulle, on trouve des vols directs vers Islamabad par la compagnie Pakistan International Airlines.
Temps de vol moyen : 8 h
D’autres vols avec escale sont proposés par Qatar Airways et Turkish Airlines.
D’Islamabad à Skardu, des vols sont possibles via Pakistan International Airlines. Le voyage en avion prend environ une heure et seize heures en passant par les routes de montagne.
Quand y aller
La saison des randonnées dans la chaîne de Karakoram a lieu entre les mois d’avril et septembre, une fenêtre durant laquelle les températures moyennes à Skardu avoisinent les 15 °C. En hiver, les conditions sont beaucoup plus rudes et les températures tournent autour de -15 °C. À toute période de l’année, des médicaments contre le mal des montagnes sont recommandés si vous n’avez pas l’habitude de l’altitude. Vous pouvez vous en faire prescrire auprès de votre médecin traitant.
Où loger
Ramada Islamabad, à partir de 82 300 Roupies pakistanaises (268 €), petit-déjeuner inclus.
Khaplu Palace, Khaplu, à partir de 109 €, petit-déjeuner inclus.
Shigar Fort, Shigar, à partir de 100 €, petit-déjeuner inclus.
Cet article a été rédigé avec l’aide d’Intrepid Travel et a paru en avril 2025 dans le magazine National Geographic Traveller (UK) en langue anglaise.
