Tourisme durable : voici comment protéger activement la Grande barrière de corail

Le long de la Grande Barrière de Corail, les touristes peuvent prendre part à un projet innovant de restauration des coraux et aider les scientifiques à en mesurer le succès.

De Justin Meneguzzi
Publication 24 oct. 2024, 12:23 CEST
Great Barrier Reef

Les récifs Hardy et Hook, sur la Grande Barrière de Corail, sont séparés par un profond chenal de marée.

PHOTOGRAPHIE DE Francesco Riccardo Iacomino, Getty Images

Tel un jardinier cultivant son potager, Alan Wallish m'explique que les choux marins prospèrent à nouveau : « Ils sont devenus si denses. Nous avons vraiment besoin qu'un cyclone passe et les brise pour que de nouvelles choses puissent pousser entre eux ». Il me fait signe de le suivre jusqu'à la parcelle suivante.

Au lieu d'une salopette, Alan a enfilé une combinaison de plongée, un tuba et des palmes pour me faire visiter Hastings Reef, une étendue en forme de fer à cheval de la partie extérieure de la Grande Barrière de Corail, à une cinquantaine de kilomètres au large de Cairns. Co-fondateur de l'organisation écotouristique Passions of Paradise, Alan a passé des décennies à montrer le récif aux visiteurs, mais après avoir délégué la plupart des tâches opérationnelles à son équipe, il préfère désormais passer son temps à planter et à cultiver le corail.

« C'est comme s'occuper d'un bonsaï », explique-t-il alors que nous nageons au-dessus de coraux-champignons, de concombres de mer et de coraux choux-fleurs, ainsi nommés en raison de leurs branches recourbées. « Vous êtes sans cesse en train de planifier, de tailler, de gérer, de nettoyer. C'est très méditatif. En scrutant les profondeurs claires, j'aperçois un requin à pointe blanche qui se faufile gracieusement entre les coraux, tandis que des poissons-clowns l'observent à l'abri d'anémones ondulantes. Des poissons-perroquets aux couleurs néons se nourrissent joyeusement sur les coraux, sans se laisser impressionner par l'énorme napoléon qui vient dans leur direction.

La hausse des températures et l'acidification des océans sont des menaces persistantes, car les coraux en détresse peuvent expulser les algues qui vivent à l'intérieur et blanchir. Ce problème est au cœur des préoccupations d'Alan et d'autres défenseurs des récifs depuis le dernier épisode de blanchiment massif de la Grande Barrière de Corail en début d'année.

C'est une formation exigeante, mais je m'y suis engagé de tout cœur après avoir rejoint l'Eco Reef Tour de Passions of Paradise. Alors que des excursions de plongée et de snorkeling sont proposées à partir de leurs catamarans à voile, l'Eco Tour va plus loin et vous permet de vous prendre pour un biologiste marin le temps d'une journée, en vous associant à un guide pour collecter des données précieuses sur la mer et sa faune dans le cadre d'un projet scientifique citoyen appelé Eye on the Reef (Un œil sur le récif en français, ndlr). Vous pouvez également parcourir les jardins de coraux et découvrir les efforts plus proactifs déployés par Passions of Paradise pour permettre au récif corallien de se rétablir.

À la suite d'un épisode de blanchiment massif en 2017, le gouvernement australien s'est associé à l'Université de technologie de Sydney et à une poignée d'opérateurs touristiques pour mettre au point le programme Coral Nurture. Dans le cadre de ce programme, des bénévoles plongent pour récupérer des fragments de coraux vivants dans les fonds marins et les attachent à des pépinières flottantes spécialement conçues à cet effet. Lorsqu'ils sont suffisamment grands, les fragments sont replantés sur le substrat pour permettre à une nouvelle colonie de s'épanouir. À terme, ces coraux feront partie du récif qui offre un abri essentiel à des milliers d'espèces marines qui s'y nourrissent, s'y reproduisent et y nourrissent leurs petits.

Dans le cadre du programme d'entretien des coraux à l'échelle du récif, Passions of Paradise a installé sa première pépinière en août 2019, mais la fermeture totale de l'industrie touristique australienne pendant la pandémie de COVID-19 a fait passer le programme à la vitesse supérieure. En l'absence de touristes, les exploitants ont reçu des fonds pour financer leurs projets et restaurer le récif. Il existe aujourd'hui dix-neuf pépinières réparties sur trois sites différents. Les estimations varient, mais Alan estime que 20 000 nouveaux coraux seront plantés à Hastings Reef avant la fin de l'année, et que la plupart d'entre eux survivront après avoir été replantés.

L'eau pétille autour de nous alors que nous nous éloignons du bateau en apnée, dans le sillage d'Alan qui se dirige vers le prochain ensemble de coraux. Je nage au-dessus de touffes d'herbes marines et de coraux ramifiés d'un bleu saisissant. Près de 15 mètres plus bas, des plongeurs explorent les fonds marins, des bulles d'air me chatouillant le visage lorsqu'ils s'élancent vers le ciel.

Nous finissons par évoluer dans des eaux moins profondes à la lisière du récif, où nous trouvons les nurseries - des structures métalliques suspendues qui ressemblent à des villes de science-fiction flottant dans les profondeurs. Alan est comme un parent fier lorsque nous plongeons en apnée à quelques mètres de profondeur pour aller voir de plus près, des bulles s'échappant de sa bouche lorsqu'il souligne la croissance du corail et arrache les membres malades avant qu'ils ne se propagent. « Maintenant que le corail s'est installé, ces nurseries sont devenues un petit écosystème à part entière », explique-t-il, alors que nous remontons à la surface entre deux plongées.

De retour au bateau, le changement de temps commence à agiter les eaux calmes. Je demande à Alan quel est l'avenir de ces jardins à l'heure du changement climatique. Le ton de sa voix change lorsqu'il explique à quel point le corail est résistant et comment il se remet des épisodes de blanchiment plus rapidement que les chercheurs ne l'avaient prévu. À l'heure où les mauvaises nouvelles environnementales dominent, Alan estime qu'il est important de donner de l'espoir aux gens : « Les gens doivent venir ici et voir qu'il y a encore quelque chose de beau qui vaut la peine d'être protégé. Je sais que ces pépinières ne sont pas la panacée, mais tout ce que je peux faire, c'est cultiver mon jardin. »

Cet article a initialement paru dans le magazine National Geographic Traveller (UK) en langue anglaise.

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