Le Japon reprend la pêche commerciale à la baleine

À compter du 1er juilet 2019, le Japon reprend son activité de pêche commerciale à la baleine, après plus de trente ans d'interdiction.

De Rachel Fobar
Les baleines de Minke, comme celle ci-dessus déchargée dans un port japonais, ont été ciblées par ...

Les baleines de Minke, comme celle ci-dessus déchargée dans un port japonais, ont été ciblées par le programme de « pêche à la baleine à visée scientifique » du pays. À compter du 1er juilet 2019, le Japon a repris son activité de pêche commerciale à la baleine, après plus de trente ans d'interdiction.

PHOTOGRAPHIE DE Kyodo News, Getty

Mise à jour : cet article a initialement été publié le 3 janvier 2019. Il a été mis à jour le 1er juillet 2019.

Comme l’a rapporté Kyodo News le 20 décembre, le Japon a décidé de se retirer de la Commission baleinière internationale (CBI), qui interdit la pêche commerciale à la baleine depuis 1986, afin de reprendre cette activité dans ses eaux côtières. La commission, composée de 89 gouvernements membres, a été créée en 1946 pour protéger les baleines et gérer la pêche de ses mammifères dans le monde entier.

Le Japon est le principal marché de viande de baleine ; toutefois, la consommation de cette dernière y est limitée. Selon un rapport réalisé conjointement par l’organisation à but non lucratif Animal Welfare Institute, qui cherche à réduire la souffrance animale, et Environmental Investigation Agency, qui surveille la criminalité internationale liée aux espèces sauvages, les Japonais consomment environ 28 g de viande de baleine par personne et par an, soit entre 4 000 et 5 000 tonnes chaque année pour l’ensemble du pays.

Astrid Fuchs, directrice du programme de la pêche à la baleine pour l’ONG britannique Whale and Dolphin Conservation, estime que le retrait du Japon est principalement une décision politique, prise pour montrer que le pays peut utiliser les océans comme bon lui semble. (Découvrez comment la communauté internationale a récemment agi pour mettre un terme à la pêche de rorquals boréals au Japon).

Comme le Japon est le chef de file des pays en faveur de la pêche à la baleine, son retrait pourrait inspirer d’autres pays, tels que la Corée du Sud et la Russie, à faire de même, a-t-elle ajouté.

La pêche à la baleine à visée scientifique n’est pas concernée par l’interdiction et les biologistes peuvent donc étudier le statut reproductif, le contenu de l’estomac et les effets des changements environnementaux sur ces mammifères. Le Japon est accusé depuis longtemps de cacher ses activités derrière cette exemption : en effet, les pêcheurs à la baleine fournissent aux chercheurs quelques parties du corps des mammifères et vendent la viande pour la consommation humaine.

« Ils se moquent du moratoire et de la volonté des citoyens internationaux depuis longtemps », confie Kitty Block, présidente de Humane Society International.

L'été dernier, lors de la réunion annuelle de la commission, les membres ont voté au sujet de la proposition du Japon d’autoriser la pêche commerciale à la baleine. Celle-ci a été rejetée.

« Ils ont investi beaucoup d’argent dans cela », explique Astrid Fuchs. « Une partie du gouvernement pensait vraiment qu’ils seraient capables de faire changer d’avis quelques pays lors de la réunion. »

Après la réunion, des représentants tels que Masaaki Taniai, vice-ministre des Pêches, et Joji Morishita, commissaire du Japon à la CBI, ont déclaré qu’ils envisageaient de se retirer de la commission, une menace que le pays avait déjà formulé par le passé. Seulement cette fois, la menace a été mise à exécution.

Le Japon désormais retiré de la commission, le pays ne pourra plus bénéficier de l’exemption de la CBI relative à la pêche à la baleine à visée scientifique dans les eaux internationales et devrait donc cesser de pêcher en haute mer. La raison ? La Convention des Nations unies sur le droit de la mer, qui requiert de ses signataires, dont fait partie le Japon, de travailler à la conservation des mammifères marins par le biais « d’organisations internationales appropriées ». Pour les juristes, cela fait référence à la CBI, même si un pays n’en est pas membre. En se retirant de la commission baleinière internationale, le Japon profitera d’un seul avantage : celui de certainement reprendre la pêche à la baleine dans ses eaux territoriales sans aucun contrôle extérieur.

Ceci pourrait constituer une bonne nouvelle pour les baleines qui vivent dans l’Antarctique, où le Japon a tué plus de 300 spécimens en 2016 dont plus de 200 femelles en gestation, mais pas pour les espèces présentes dans les eaux japonaises.

Il subsiste une inquiétude toute particulière quant au statut des baleines de Minke, désignées par le terme « J-stock », qui vivent au large du Japon et sont fréquemment pêchées. Celles-ci sont victimes de la pêche car elles sont assez abondantes : elles n’ont pas été décimées lorsque la pêche commerciale à la baleine était à son paroxysme dans les années 1970.

Même si le Japon s'est retiré de la commission, il ne sera affecté par aucune conséquence formelle ; toutefois, d’autres pays pourraient prendre les choses en main et imposer des sanctions, comme par exemple refuser au Japon l’accès à leurs eaux territoriales pour y pêcher. Cette décision signifie également que le pays ne participera plus au dialogue international relatif à la pêche à la baleine.

« À mesure que nous devenons une communauté de plus en plus internationale, il est préférable que tout le monde soit assis autour de la table, même si vous êtes en désaccord, et de poursuivre le travail, tout simplement », indique Natalie Barefoot. « Nous abordons des problèmes internationaux et nous avons besoin de les aborder tous ensemble. »

 

Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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