Comment fonctionne l’écholocalisation ?

À l’image des bélugas, des chauves-souris et même des Hommes, de nombreux animaux produisent des sons qui ricochent contre les objets, ce qui les aide à se déplacer et à chasser.

De Liz Langley
Publication 4 févr. 2021, 16:45 CET
Des dauphins du Nord nagent près de la surface non loin de la Colombie-Britannique, au Canada. ...

Des dauphins du Nord nagent près de la surface non loin de la Colombie-Britannique, au Canada. Le son se propage cinq fois plus rapidement dans l’eau que dans l’air, ce qui fait de l’écholocalisation une stratégie logique dans les océans.

PHOTOGRAPHIE DE Paul Nicklen

L’écholocalisation est le sonar de la Nature. Ce phénomène se produit lorsqu’un animal émet une onde sonore qui ricoche contre un objet et renvoie un écho donnant des informations sur la taille de cet objet et la distance à laquelle il se trouve.

Plus de mille espèces ont recours à l’écholocalisation, notamment les petits mammifères, tous les cétacés à dents et la plupart des chauves-souris. Ce sont majoritairement des animaux nocturnes, marins ou vivant dans des terriers, qui dépendent de cette technique pour trouver de la nourriture dans un environnement sombre. Les méthodes d’écholocalisation sont multiples ; elles peuvent consister en des vibrations de la gorge ou des battements d’ailes.

Les guacharos des cavernes, oiseaux nocturnes, et certaines salanganes chassant dans des grottes sombres, « produisent de brefs clics avec leur syrinx, l’organe vocal des oiseaux », explique dans un email Kate Allen, boursière postdoctorale au Département d’études psychologiques et cérébrales de l’université John Hopkins.

Certaines personnes peuvent également utiliser l’écholocalisation. Elles produisent alors des claquements de la langue, un comportement observé chez une poignée d’autres animaux, dont le tenrec (un animal semblable à une musaraigne endémique de Madagascar) et le loir pygmée du Vietnam (qui est aveugle).

 

LES CHAUVES-SOURIS, EXPERTES EN LA MATIÈRE

Lorsque l’on évoque le terme d’« écholocalisation », nous pensons immédiatement aux chauves-souris et à leur sonar intégré qui leur permet de pourchasser des proies rapides et volantes de nuit.

La plupart des chauves-souris, comme le minuscule murin de Daubenton, contractent les muscles de leur larynx pour produire des sons d’une fréquence supérieure au seuil de perception de l’oreille humaine, l’équivalent d’un cri chez ces mammifères, indique Kate Allen.

Les appels des chauves-souris varient grandement entre les espèces, ce qui leur permet de distinguer leur propre voix parmi celles d’autres individus présents dans les parages. Ils sont également propres à un environnement et à un type de proie. Ainsi, la chauve-souris d’Europe « chuchote » en présence de papillons de nuit pour éviter d’être repérée.

Mais certains de ces insectes ont évolué pour se défendre contre les chauves-souris qui se servent de l’écholocalisation. L’écaille martre contracte son tymbal, un organe situé de chaque côté de son thorax, pour produire des clics. Ces derniers brouillent le sonar des chauves-souris, qui ne s’approchent alors pas de leur proie.

En tant que spécialistes de l’écholocalisation, certaines chauves-souris peuvent se concentrer sur des objets mesurant un peu moins de 2 mm, soit l'épaisseur d’un cheveu. Comme les insectes se déplacent sans cesse, les chiroptères doivent émettre des clics en continu, parfois jusqu’à 190 par seconde. Même si leurs proies ne sont pas faciles à attraper, les prédateurs peuvent ingérer l’équivalent de la moitié de leur poids en insectes chaque nuit.

Les chauves-souris à nez de feuille (Phyllostomidae) émettent des sons d’écholocalisation à l’aide de leur grand nez replié, qui leur permet de se concentrer sur les sons qui ricochent. D’autres espèces peuvent rapidement changer la forme de leurs oreilles pour capter avec plus de précision les signaux entrants.

Des scientifiques ont même découvert que certaines roussettes, comme le petit éonyctère d’Asie du Sud, émettaient des clics en battant des ailes.

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    L’ÉCHOLOCALISATION CHEZ LES CÉTACÉS

    L’écholocalisation est une stratégie logique dans les océans, où le son se propage cinq fois plus vite que dans l’air.

    Chez les dauphins et autres cétacés à dents, comme les bélugas, c’est un organe spécialisé, la bourse dorsale située sur le sommet de leur tête et toute proche de l’évent, qui permet l’écholocalisation.

    Un dépôt graisseux de la tête, appelé le melon, réduit l’impédance ou la résistance aux ondes sonores entre le corps du cétacé et de l’eau, ce qui rend le son plus clair, explique Wu-Jung Lee, océanographe principal au Laboratoire de physique appliquée de l’Université de Washington.

    Un autre dépôt graisseux, qui s’étire de la mâchoire inférieure du cétacé jusqu’à ses oreilles, clarifie l’écho ayant ricoché sur la proie, un poisson ou un poulpe.

    Figurant parmi les proies favorites des orques, les marsouins communs émettent des clics d’écholocalisation extrêmement rapides et à haute fréquence qui ne peuvent être entendus par leurs prédateurs. Ils peuvent ainsi rester incognito.

    La fréquence de la plupart des sons d’écholocalisation des mammifères marins est trop élevée pour qu’ils soient perçus par l’oreille humaine, souligne Wu-Jung Lee, à l’exception de ceux produits par les grands cachalots, les orques et certaines espèces de dauphins.

     

    L’ÉCHOLOCALISATION POUR SE GUIDER

    En plus de servir pour la chasse ou se protéger, l’écholocalisation permet aussi à certains animaux de se déplacer au sein de leur habitat.

    Les sérotines brunes, une espèce de chauves-souris répandue à travers le continent américain, utilisent leur sonar pour se frayer un chemin dans les environnements bruyants, comme les forêts où résonnent les cris d’autres animaux.

    Les dauphins roses de l’Amazone se serviraient de l’écholocalisation pour se déplacer parmi les branches d’arbres et autres obstacles rapportés par le fleuve lors des inondations saisonnières, ajoute l’océanographe.

    La plupart des humains qui emploient la technique de l’écholocalisation sont aveugles ou mal-voyants et l’utilisent dans leurs activités quotidiennes. Certains émettent des claquements, avec leur langue ou un objet (une cane par exemple) pour se déplacer selon l’écho renvoyé. Des scanners cérébraux réalisés sur ces personnes ont révélé que l’aire du cerveau qui intègre les informations visuelles était employée lors de ce processus.

    « Le cerveau aime que toutes ses aires soient exploitées », confie Kate Allen. Il est donc « trop coûteux d’un point de vue métabolique de conserver » une aptitude à l’écholocalisation chez les personnes qui n’en ont pas besoin.

    Les humains font néanmoins preuve d’une adaptabilité remarquable. Des études démontrent même que nous pouvons apprendre à utiliser l’écholocalisation, si nous faisons preuve de patience.

     

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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