Quatre mythes sur les loups déconstruits par des experts

Le plus gros canidé du monde inspire autant le respect que l'ire. Voici les fausses idées les plus répandues, démenties par les scientifiques.

De Christine Peterson
Publication 10 mai 2024, 11:15 CEST
Un jeune mâle surnommé Gray Mane marche devant sa meute à la recherche de proies sur ...

Un jeune mâle surnommé Gray Mane marche devant sa meute à la recherche de proies sur l'Archipel Arctique, au Canada, en 2018. La chasse a duré au moins deux jours et s'est étendue sur quarante kilomètres.

PHOTOGRAPHIE DE Ronan Donovan, National Geographic Image Collection
Loup gris
  • Nom Commun: Loup gris
  • Nom Scientifique: Canis lupus
  • Genre: Mammifères
  • Durée de vie moyenne à l'état sauvage: 6 à 8 ans
  • Taille: Entre 60 à 70 cm au garrot | Queue de 30 à 45 cm
  • Poids: 30 à 80 kg pour les mâles | 23 à 55 kg pour les femelles
  • Taille comparée à un humain de 1,80 m: Taille comparée à un humain de 1,80 m

Les loups sont l'une des figures antagonistes les plus populaires des contes, et ce depuis des milliers d’années. Parmi ces histoires, il y a, évidemment, le Grand Méchant Loup dans le Petit Chaperon Rouge. Mais il existe aussi des légendes sur les loups-garous chassant à la pleine lune.

 

Différentes versions sont écrites au fil du temps : peu de livres pour enfants modernes mettent en garde contre les loups qui mangeraient des grands-mères. Les histoires dépeignent inévitablement le plus gros canidé du monde d’une façon plutôt contrastée.

 

La manière dont on voit le loup gris génère toujours de nombreux débats, en particulier lorsque des animaux se font tuer. D’après les autorités de l’État du Wyoming, aux États-Unis, en février dernier, un homme du nom de Cody Robert a écrasé un jeune loup avec son scooter des neiges, scotché sa gueule, puis l’a exhibé dans un bar local avant de lui tirer une balle dans le dos.

 

Le Wyoming abrite plus de 350 loups qui évoluent dans l’écosystème de Yellowstone. L'État n’est pas réputé pour aimer les loups, mais cet acte était si cruel que même la communauté des chasseurs de l’État s’est mobilisée pour montrer sa désapprobation. Les photos de l’incident, devenues virales, ont suscité un scandale international.

 

« Cette personne a fait une chose considérée comme inacceptable par presque tout le monde », déclare Brian Nesvik, directeur du Wyoming Game and Fish Department. « J’ai écouté des centaines de personnes et aucune d’entre elles n’a considéré cet acte comme étant tolérable. »

 

Dans de nombreux cas, la mythologie profondément enracinée sur les loups comme de grands méchants peut conduire à des malentendus plus conséquents. National Geographic a demandé à Brian Nesvik et à d’autres spécialistes des loups de dissiper certains des mythes les plus courants concernant ces complexes créatures.

Un loup effraie des corbeaux pour les éloigner de sa nourriture dans le parc national de ...

Un loup effraie des corbeaux pour les éloigner de sa nourriture dans le parc national de Yellowstone. Le parc abrite au moins 120 loups.

PHOTOGRAPHIE DE Barrett Hedges, National Geographic Image Collection

 

MYTHE 1 : LES LOUPS TUENT POUR S'AMUSER

Même si aucun spécialiste ne peut prétendre comprendre les émotions d’un animal sauvage, l’idée que les loups tuent pour s’amuser, souvent appelée « abattage excessif », ne repose pas sur des faits.

 

D’après Ken Mills, biologiste des loups au Wyoming Game and Fish Department, les loups vivent à la limite de la carence alimentaire. Ils ne meurent pas de faim, mais ne font pas de réserves de graisse.

 

« Ce sont des marathoniens maigres. Ils doivent parcourir de grandes distances pour trouver des proies vulnérables, puis s'en saisir, […] les tirer vers le bas et les tuer. Ce n’est pas simple », explique Mills.

 

De plus, chasser de grosses proies comme des wapitis ou des élans est plutôt dangereux. À Yellowstone, où les humains ne peuvent pas chasser le loup, les blessures subies lors de la chasse au gros gibier sont la deuxième cause de décès chez les carnivores, déclare Kira Cassidy, une chercheuse du Yellowstone Wolf Project, l’une des études sur les loups les plus longues et détaillées jamais réalisées.

 

« Les meutes de loups ne mènent à bien qu’un faible pourcentage de leurs tentatives de chasse, de 10 à 20 % environ », explique Kira Cassidy.

 

Et comme trouver de la nourriture n’est pas garanti, s’ils repèrent une proie accessible, ils la tueront, dit-elle.

 

À moins que les loups ne soient chassés par l’Homme ou par une autre meute, ils reviendront encore et encore pour se nourrir d'une carcasse jusqu’à ce qu’il n’y ait plus rien dessus.

 

Depuis vingt-trois ans que Mills travaille avec les loups dans le Wyoming, le Michigan, l'Ontario ou au Nouveau Mexique, il n’a enquêté que sur peu d’incidents dans lesquels les loups tuaient plus que ce qu’ils mangeaient. Parmi les incidents recensés, notons tout de même celui d'une meute de loups tuant dix-neuf wapitis dans le Wyoming.

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    Des loups grignotent sur la carcasse d'un bœuf musqué. Pour avoir cette image, le photographe Ronan Donovan a placé une caméra-piège à l'intérieur de la carcasse. La meute est revenue se nourrir sur la carcasse pendant un mois.

    PHOTOGRAPHIE DE Ronan Donovan, National Geographic Image Collection

     

    MYTHE 2 : LES LOUPS SAUVENT DES ÉCOSYSTÈMES

    Le concept de cascade trophique persiste depuis que les scientifiques ont réintégré les loups dans le parc national de Yellowstone dans les années 1990. L’idée est la suivante : lorsque les loups disparaissent d’une région, les ongulés comme les cerfs, les wapitis et les élans deviennent abondants et endommagent les prairies, les flancs de montagne et les marécages.

     

    Pourtant, des recherches récentes ont démontré que la réalité était plus complexe.

     

    Selon des études publiées au début de l’année dans la revue Ecological Monographs, les écosystèmes comme celui de Yellowstone ont subi de tels changements après le départ des loups et des grizzlis qu’il n’a pas été possible de revenir à l’état antérieur simplement en ramenant les prédateurs, du moins pour certains endroits.

     

    L'étude, basée sur vingt ans de recherche à Yellowstone, a conclu que la région était dans un « état alternatif stable », et n’était pas retournée à son état antérieur.

     

    « Les loups représentent une composante importante pour l’équilibre d’un écosystème », explique Cassidy, « mais leur présence n’est pas le seul facteur critique pour l’équilibre, la stabilité ou la résistance d’une région.

     

    MYTHE 3 : LES LOUPS ATTAQUENT LES HUMAINS

    Dans des films pour enfants tels que La Reine des Neiges ou La Belle et la Bête, les loups sont un danger pour les humains. En réalité, les loups attaquent très rarement les Hommes. On compte deux morts par rencontre avec un loup en Amérique du Nord durant le siècle dernier. Le risque d'être tué par la foudre est quatorze fois supérieur.

     

    Les loups gris vivent dans la partie septentrionale du globe, des États-Unis à l’Asie en passant par l'Europe. Les rencontres avec les Hommes se font tout aussi rares dans ces environnements.

     

    « D'après mon expérience, ils sont plutôt terrifiés par les Hommes », déclare Cassidy. « Ou bien ils sont très méfiants, au point que la plupart des gens ne les voient pas. »

     

    MYTHE 4 : SI ON LES LAISSE FAIRE, LES LOUPS DÉCIMERONT LES TROUPEAUX

    En Amérique du Nord, les loups gris et leurs proies, principalement les grands ongulés tels que les cerfs, les wapitis, les élans et les bisons, ont évolué ensemble pendant des dizaines de milliers d’années. Au fur et à mesure que les loups améliorent leurs techniques de chasse, les wapitis deviennent plus aptes à se défendre et à s’échapper.

     

    « Cette fascinante évolution est la raison pour laquelle les proies comme le wapiti sont massives, rapides et intelligentes », explique Cassidy. « Ceux qui ne le sont pas risquent davantage d’être tués et ont donc moins de chances de transmettre leurs gènes. »

    Surnommés « loups de Vancouver », ces canidés habitent sur la côte rocheuse de la Colombie-Britannique, où ils ...

    Surnommés « loups de Vancouver », ces canidés habitent sur la côte rocheuse de la Colombie-Britannique, où ils se nourrissent de poissons et d'autres créatures marines.

    PHOTOGRAPHIE DE Ian McAllister, National Geographic Image Collection

    Il en va de même pour les loups gris, les deux espèces se livrent à une « course à l’armement » évolutive qui donne à l’une un léger avantage sur l’autre.

     

    Dans les régions où les espèces proies disparaissent, souvent en raison de maladies ou du développement urbain, les loups élèvent moins de petits, en perdent plus et se mettent à la recherche de nouvelles sources de nourriture.

     

    Peu importe ce que l’on pense des loups, ce n’est rien d’autre qu’une espèce quelconque dans la nature, déclare Nesvik, une espèce qui essaie de se remplir la panse comme nous tous.

    Cet article a initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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