Insolite : ces crabes se déguisent pour survivre

Les humains ne sont pas les seuls à utiliser la mode à leur avantage : pour se camoufler, se protéger, ou tout simplement pour se nourrir, ces crabes font eux aussi preuve d'originalité lorsqu'ils conçoivent leur garde-robe.

De Liz Langley
Publication 8 août 2024, 11:24 CEST
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Dans les eaux de la mer Rouge, un crabe décorateur utilise un morceau de cnidaire comme camouflage.

PHOTOGRAPHIE DE Chris Newbert, Minden Pictures, Nat Geo Image Collection

Couvre-chefs repoussants, couvertures toxiques, épines venimeuses : l’univers de la mode n’est pas réservé aux humains. Parmi les 7 000 espèces de crabes qui peuplent notre planète, nombreuses sont celles qui prennent des décisions vestimentaires pour le moins… surprenantes.

Cependant, loin des pressions sociales humaines liées à l’apparence et à la mode, pourquoi les crabes ressentent-ils le besoin d’arborer de tels accoutrements ?

 

DES COUVRE-CHEFS POUR CRUSTACÉS

Les crabes-éponges d’Afrique de l’Ouest et de la Méditerranée portent des éponges vivantes sur la tête et le corps, non pas pour attirer l’attention, mais pour la détourner.

Les éponges permettent en effet de camoufler les crabes et, de ce fait, de les protéger des prédateurs. Certaines espèces d’éponges émettent même des substances chimiques toxiques ou nocives qui repoussent les prédateurs.

Les crabes-éponges utilisent leur paire de pattes arrière « pour garder une éponge intacte sur leur corps », explique Jay Stachowicz, écologiste marin à l’Université de Californie à Davis. Ils coupent un morceau d’éponge et le façonnent « afin que celui-ci recouvre la majeure partie de leur carapace », ou exosquelette.

Les crabes décorateurs, quant à eux, « disposent de poils crochus qui recouvrent toute leur carapace et qui agissent comme du scratch, ce qui leur permet d’accrocher et de garder en place toute sorte de décorations sur leur corps », décrit Stachowicz.

Les ornements qu’ils décident de porter varient en fonction des espèces.

« Certains sont très exigeants », précise le spécialiste. Ils « se protègent des prédateurs en utilisant des algues toxiques ou des anémones de mer urticantes » qui, comme les éponges, servent à la fois à dissimuler le crabe et à repousser ses prédateurs.

D’autres « choisissent leurs matériaux en fonction de ce qu’ils trouvent dans leur environnement », ce qui leur permet de se fondre dans le décor.

 

DES COLOCATAIRES PLUS OU MOINS INOFFENSIFS

Les crabes de l’espèce Loxorhynchus crispatus du sud-ouest des États-Unis sont « les décorateurs les plus extrêmes », selon Stachowicz. Ils se recouvrent d’anémones et de bryozoaires, de minuscules animaux qui peuvent ressembler à des plantes, de la fourrure ou de la gélatine.

Les crabes porte-oursin du bassin Indo-Pacifique et de l’Afrique de l’Est disposent de pattes arrière spécialisées qui leur permettent de supporter le poids d’un oursin lorsqu’ils partent en balade. Certains oursins ayant des épines venimeuses, leur seule présence suffit à dissuader les prédateurs des crabes de trop s’approcher.

Le crabe petit pois, quant à lui, ne prend pas la peine de se fabriquer un costume : le crustacé profite de sa petite taille pour se cacher à l’intérieur d’autres animaux. Selon Judith Weis, biologiste marine à l’Université Rutgers et autrice de l’ouvrage Walking Sideways: The Remarkable World of Crabs, le petit crabe vit dans les coquilles de bivalves, tels que des moules et des huîtres.

Tandis que certaines espèces de crabes sont de simples « commensales » de leurs hôtes, c’est-à-dire des passagères inoffensives, d’autres peuvent être de véritables parasites et s’emparer de la nourriture de ces derniers.

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    En Australie-Méridionale, un crabe-éponge de l'espèce Austrodromidia octodentata se déguise pour se faire passer pour une éponge. Ces crabes taillent les éponges sur mesure afin de bien recouvrir leur corps.

    PHOTOGRAPHIE DE Fred Bavendam, Minden Pictures, Nat Geo Image Collection

    Les bernard-l’hermite, de leur côté, récupèrent des coquilles de gastéropodes abandonnées pour protéger leur abdomen qui, contrairement à leur partie supérieure dotée d’un exosquelette résistant, est particulièrement mou et fragile. Le corps de ces crustacés a évolué de telle façon qu’il est enroulé et est donc adapté pour entrer et se maintenir dans l’intérieur en spirale des coquilles qu’ils trouvent. Tous les bernard-l’hermite n’ont cependant pas la chance de trouver des logements aussi adaptés, certains se retrouvant dans des déchets issus de l’activité humaine.

    Au fur et à mesure qu’ils grandissent, les bernard-l’hermite doivent changer de coquille pour en trouver une plus grande, « comme des enfants qui, en grandissant, ont besoin de nouvelles paires de chaussures », explique Weis.

    Certains renforcent même le pouvoir de protection de cette coquille en y attachant une anémone de mer. S’ils viennent à changer de tenue, ils détachent l’anémone de leur ancienne coquille et la rattachent à la nouvelle, décrit la biologiste.

    Les anémones profitent elles aussi de cette étonnante relation, la mobilité du crabe leur offrant de nouveaux points d’alimentation auxquels elles n’auraient pas eu accès si elles étaient restées immobiles. Elles peuvent même, si les crabes qui les hébergent « ne font pas attention en mangeant », récupérer les restes qu’ils laissent tomber pendant le repas.

     

    UN PARTENARIAT AVANTAGEUX

    Le crabe boxeur, parfois surnommé la pom-pom girl des fonds marins, tient quant à lui une petite anémone dans chacune de ses petites pinces en permanence, « ce qui lui permet de mieux se protéger des prédateurs et de profiter de la nourriture capturée par l’anémone ».

    Enfin, certains bernard-l’hermite du genre Paguropsis ne s’embêtent pas à rechercher de coquille : ils ne portent sur eux qu’une anémone qu’ils peuvent tirer plus ou moins haut sur leur corps, comme une couverture.

    Cet article a initialement paru en 2018 sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.

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