Madagascar : les mines de saphirs condamnent les lémuriens à l'extinction
La ruée vers les pierres précieuses dans le pays détruit les derniers habitats naturels des lémuriens et des autres espèces menacées.
Du haut de leurs 60 centimètres, les indris sont les plus grands lémuriens de Madagascar, ainsi que de gros dormeurs. Ces primates se réveillent deux ou trois heures après le lever du soleil, se mettent en quête de feuilles à manger dans les hauteurs de la canopée entre deux siestes le jour et choisissent l’endroit où ils passeront la nuit bien avant que celle-ci ne tombe.
La photographe Adriane Ohanesian, le guide-interprète Safidy Andrianantenaina et moi avons souvent entendu leurs cris lors de notre périple dans le Corridor Ankeniheny-Zahamena, aussi connu sous l’acronyme CAZ. Ce son, semblable à celui d’une personne soufflant dans un trombone pour la première fois, peut se propager à travers la forêt luxuriante sur près de deux kilomètres.
Nous nous enfonçons en profondeur dans le CAZ, une étendue de forêt tropicale d’environ 3 800 km² qui fait la jonction entre deux parcs nationaux et permet aux différentes populations de lémuriens et d’autres animaux de se mélanger pour maintenir leur diversité génétique, essentielle à leur survie. Nous avons pour objectif de constater par nous-mêmes les répercussions de l’extraction illégale de pierres précieuses sur quelques-uns des derniers habitats des lémuriens sauvages.
Notre premier arrêt est le village de fortune d’Ambodipaiso. Ce site abrite des mines clandestines de saphirs, qui ont transformé certaines zones du CAZ en friches dénuées d’arbres et dégradées. Des saphirs y ont été découverts il y a sept ans, et en 2016, des dizaines de milliers de Malgaches avaient envahi les lieux, abattant les arbres et déviant des ruisseaux en toute illégalité dans l’espoir de trouver des pierres précieuses pour sortir de la pauvreté. Selon le Programme des Nations Unies pour le développement, Madagascar occupe la 161e place mondiale en termes de développement humain et 70 % de la population du pays vit dans la pauvreté.
La Banque Mondiale estime que l’équivalent de plusieurs dizaines de millions d’euros de saphirs et autres pierres précieuses ont été sortis clandestinement de Madagascar rien qu’en 1999. Si ces chiffres restent aujourd’hui encore les plus fiables, de récentes estimations évoquent un montant d’environ 130 millions d’euros par an. La majorité de l’extraction des pierres précieuses est réalisée illégalement dans des réserves, souligne Christoph Schwitzer, vice-coprésident du groupe de spécialistes des primates de Madagascar de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), l’organisation qui établit le statut de conservation des animaux et des plantes. Selon lui, le CAZ et les autres réserves « sont loin de recevoir une protection adéquate sur le terrain. »
Madagascar possède la troisième plus riche biodiversité au monde, derrière le Brésil et l’Indonésie. Huit plantes et animaux sur dix y sont endémiques. Le pays compte soixante-deux espèces de caméléons, ainsi que trois cent espèces de reptiles et autant d’amphibiens, dont 99 % d’entre eux ne vivent nulle part ailleurs. Madagascar est également le seul endroit sur Terre, avec l’archipel des Comores, à abriter des lémuriens à l'état sauvage. Il en existe cent-treize espèces, la dernière ayant été identifiée pas plus tard que l’année passée.
Ces animaux charismatiques attirent environ 250 000 visiteurs par an ; le tourisme génère plus de 6 % du PIB du pays et 5 % des emplois. Pourtant, presque la totalité des espèces de lémuriens sont menacées : trente-huit, parmi lesquelles l’indri, sont en danger critique, et dix-sept ont déjà disparu. Les écologistes et les primatologues redoutent désormais les conséquences de l’extraction de pierres précieuses sur l’habitat restant des lémuriens, dont 90 % a disparu à cause de la déforestation et de l’urbanisation.
« Les mines de pierres précieuses peuvent être un facteur majeur de la réduction de l’habitat », explique Christoph Schwitzer. « Elles peuvent détruire une zone protégée relativement vite. »
« Les gens se moquent qu’il s’agisse d’une réserve naturelle intégrale », m’avait confié Jonah Ratsimbazafy, vice-coprésident aux côtés de Christoph Schwitzer du groupe de spécialistes des primates de Madagascar de l’UICN, avant que je ne pose pied sur le sol malgache. « Ils y vont et extraient en masse des pierres. Personne ne peut les arrêter. Cette activité est liée à la corruption ainsi qu'à la pauvreté et la loi n’est pas vraiment mise en application. Sans la forêt, les lémuriens ne peuvent pas survivre. Ils n’ont pas d’avenir », avait-il ajouté.
Les forêts de Madagascar sont protégées par le gouvernement depuis le 18e siècle, lorsque le roi Andrianampoinimerina a interdit l’abattage d’arbres vivants pour se chauffer. Mais au début du 19e siècle, les colons français ont commencé à abattre les arbres de manière intensive pour faire place aux cultures vouées à l’exportation. En quelques décennies, 75 % de la forêt primaire du pays a été coupée. En 1927, les Français ont interdit la chasse aux lémuriens et créé la première réserve naturelle d’Afrique, mais en 1990, trente ans après l’indépendance de Madagascar, la moitié des forêts restantes avaient disparu.
En 2003, Marc Ravolamanana, alors président du pays, initie une expansion considérable des zones protégées, quadruplant leur superficie à l’horizon 2016. Mais la forêt tropicale de l’Est, qui englobe le CAZ, où des indris et d'autres espèces de lémuriens vivent, n’a cessé de reculer. Avant l’arrivée des humains, elle s’étalait sur 11 millions d’hectares ; en 1985, elle n’en comptait plus que quatre millions. Depuis, la déforestation s’est accélérée dans certaines zones, apprend-on dans une étude menée par Lucienne Wilmé, coordinatrice nationale pour Madagascar au World Resources Institute (Institut des ressources mondiales en français), un organisme de recherche situé à Washington.
Admettant qu’il n’avait ni l’argent, ni les effectifs nécessaires pour assurer une protection environnementale efficace, le gouvernement de Madagascar a confié en 2012 la gestion du CAZ à Conservation International, une organisation environnementale américaine à but non lucratif. Alors qu’il est interdit depuis 2015 d’abattre des arbres de forêts primaires pour l’agriculture, l’exploitation forestière et minière, 0,5 % de la superficie des forêts vestigiales protégées disparaît chaque année, indique Eric Rabenasolo, directeur général des forêts au ministère malgache de l’Environnement et du Développement durable.
Comme cela est presque entièrement réalisé dans le cadre de « l’économie informelle », ce qui correspond à des activités et emplois non régulés par le gouvernement, il est impossible de savoir avec exactitude combien d’hectares de forêt ont été abattus pour laisser place aux mines de pierres précieuses. Les gisements de gemmes sont peu profonds et faciles à trouver ; par conséquent, les équipements identifiables de taille industrielle ne sont pas nécessaires.
De plus, les locaux font preuve d’opportunisme, travaillant par alternance dans les mines, l’agriculture et d’autres secteurs, ce qui rend impossible toute estimation du nombre total de personnes impliquées dans l’extraction minière illégale. Mais selon les chiffres de Rosaleen Duffy, professeure de politique à l’université de Sheffield, au Royaume-Uni, parus il y a dix ans dans The Journal of Modern African Studies, elles seraient au moins 500 000. L’industrie minière illégale de pierres précieuses serait donc le second plus grand employeur de Madagascar, après l’agriculture.
AMBODIPAISO
Nous arrivons à Ambodipaiso peu avant la tombée de la nuit. Le village ne dispose ni d’eau courante, ni d’électricité ou d’antenne téléphonique. Pourtant, des centaines d’habitants vivent ici, offrant services et marchandises aux mineurs de la zone, transportant de l’équipement et cherchant eux-mêmes des pierres précieuses.
Safidy Andrianantenaina et moi passons la nuit sur des lits de camp dans un minuscule abri fait de branches, tandis qu’Adriane Ohanesian dort sous une tente. Les cris d’un bébé, le fracas des casseroles et le chant des coqs me réveillent avant l’aube. Je me demande si ces bruits importunent les indris qui piquent un somme. Une fois le jour levé, je m’extirpe de l’abri et aperçois une femme donner une banane à deux lémuriens.
Méline dit les avoir achetés à un chasseur qui a tué leurs mères pour leur viande. Elle a baptisé le lémurien fauve Bridola et le vari noir et blanc Roki. Les lémuriens fauves et les varis noir et blanc sont respectivement considérés comme « quasi menacés » et « en danger critique » par l’UICN.
Méline et son mari sont propriétaires d'un magasin dans lequel ils vendent de tout, du riz à l’ail, en passant par des ramens et de l’amoxicilline. « J’ai peut-être quatre clients par jour », confie-t-elle. « Nous ne gagnons pas d’argent. »
À l’état sauvage, les lémuriens se nourrissent de bourgeons, de fleurs, de fruits et d’insectes, mais Méline donne principalement des bananes et du riz aux siens. Je remarque que la fourrure de leur queue est clairsemée. La preuve d’une carence alimentaire pour Patricia Wright, professeure d’anthropologie à l’université Stony Brook de l’État de New York et directrice exécutive de l’Institut pour la sauvegarde des environnements tropicaux de l’université. Selon elle, un régime alimentaire non adapté pourrait provoquer le décès prématuré des animaux.
La professeure explique que la déforestation résultant de l’extraction minière est un « problème qui en entraîne d’autres » pour les lémuriens, car « si les animaux se trouvent dans une petite parcelle de forêt, ils n’auront pas assez de nourriture à disposition. » Une famille d’indris comptant entre deux et cinq membres a besoin d’environ huit hectares de forêt pour survivre ; un chiffre qui peut atteindre une quarantaine d’hectares pour les groupes d’autres espèces de lémuriens. Pour que la population de lémuriens reste stable, les parcelles de forêt doivent se toucher : les lémuriens étant essentiellement arboricoles, ils ne traverseront pas de grandes étendues à découvert pour rejoindre d’autres groupes et trouver une partenaire. Ils dépendent aussi de nombreux arbres pour se nourrir. Or, l’abattage d’une seule essence peut entraîner la disparition d’autres arbres et plantes présents dans une zone donnée.
À mesure que d’autres arbres sont abattus, les différents groupes de lémuriens entrent en contact les uns avec les autres et des combats ont lieu afin de s’approprier les ressources. Il s’agit là d’un autre problème selon Patricia Wright, qui ajoute que les lémuriens sont encore plus vulnérables en raison du déboisement pour laisser place aux mines, les humains n’ayant plus besoin de s’enfoncer dans la forêt pour les chasser.
Je discute avec Banjindray Elys D’Antoine à Ambodipaiso. Il me confie avoir mangé du lémurien lorsqu'il travaillait dans les mines situées au sud du CAZ. La viande, dure, doit être bouillie un long moment avant d’être frite, m’explique-t-il. Je lui demande quel goût a cette viande. Il me répond : « Celle d’un chat. »
Accompagnés de deux policiers en repos recrutés pour notre sécurité, Adriane Ohanesian, Safidy Andrianantenaina et moi quittons Ambodipaiso pour une marche de 11 kilomètres, qui nous mène jusqu’à la plus grande mine de pierres précieuses du CAZ, Tananarive, nommée par les locaux sur le ton de la plaisanterie d’après le nom français de la capitale malgache, Antanarivo.
Moins d’une demi-heure plus tard, le cri désormais familier des indris nous parvient. Sous l’épaisse canopée des arbres, des orchidées, certaines mesurant jusqu'à 30 mètres de haut, foisonnent. Sur le sentier, nous apercevons des mille-pattes géants ainsi qu'un ver aussi long que mon bras.
Six kilomètres plus loin, nous arrivons à Bemainty, où environ quatre-vingt personnes vivent sans eau courante, sans électricité, sans système d’assainissement, sans accès aux soins médicaux ou aux communications. Randriamatody, le chef du village, qui utilise un seul nom comme de nombreux Malgaches, nous raconte qu’en 2016, des criminels ont attaqué la bourgade en pleine nuit, dérobant l’argent correspondant aux frais payés par les mineurs de passage et tuant l’ancien chef de Bemainty.
« Rien de tel ne s’était produit ici avant la création de la mine », confie une femme prénommée Farah, qui dit avoir été blessée lors de l’attaque. Selon elle, l’extraction minière dans la zone « ne bénéficie en rien » au village. « Tout ce que j’ai gagné, c’est cette cicatrice sur mon front. »
TANANARIVE
Deux heures après avoir quitté Bemainty, nous descendons une colline et Tananarive, une friche boueuse, parsemée de petites cahutes et de trous, se dévoile devant nous. De toute évidence, la plupart des saphirs y ont déjà été extraits. Nous sommes informés que la majorité des mineurs sont rentrés chez eux ou partis à Ilakaka, une mine située à environ 650 kilomètres au sud-ouest, non loin du parc national de l’Isalo. D’autres ont pris la direction d’une nouvelle mine au sein du CAZ, établie à environ 130 kilomètres de Tananarive, en périphérie du village de Lakato. Mais il reste encore quelques mineurs qui extraient de façon artisanale les pierres précieuses à Tananarive.
Une fois qu’une parcelle de forêt est déboisée, un tronc est positionné en travers d’un proche ruisseau afin de le détourner vers la zone souhaitée. L’eau élimine la couche supérieure de terre et une équipe composée de quatre à cinq mineurs commence à creuser. Plusieurs semaines peuvent être nécessaires pour créer un puits mesurant neuf mètres de diamètre et un peu plus de trois de profondeur. Lorsque le trou fait environ un mètre de profondeur, l’eau des nappes phréatiques y pénètre précipitamment et est aspirée par une pompe mécanique. La terre ainsi excavée est lavée sur un tamis, qui retient les petites pierres. Celles-ci sont ensuite examinées pour voir si elles contiennent des pierres précieuses.
Nous faisons la rencontre de trois jeunes hommes, Mbola, 30 ans, Soasite, 25 ans, et Zanry, 20 ans, bruyamment occupés à cette dernière tâche. Sur un tamis situé au-dessus d’une structure porteuse en bois, Soasite dépose une pelleté de terre, qui est arrosée d’eau par un tuyau relié à une pompe placée dans le ruisseau détourné. Les deux autres hommes replacent ensuite la boue à l’aide d’une pelle sur le tamis pour qu’elle soit à nouveau nettoyée. Mbola et Zanry, le visage couvert de boue, sont vêtus de sacs de riz vides, découpés pour laisser passer leurs bras et protéger leurs vêtements des éclaboussures. Le trio rit sans cesse. Safidy Andrianantenaina nous explique qu’ils se moquent de nous. Nous les regardons travailler pendant 30 minutes environ, mais ils ne trouvent aucun saphir.
Une femme située au-dessus de nos têtes nous appelle. Il s'agit de Laurence Asma, vêtue d’un legging sous une jupe en jean, de tongs ornées d’un drapeau américain et d’un maillot à manches longues sur lequel est écrit en sequins « Je suis charmante ». Son animal de compagnie, un lémurien fauve prénommé Ani, est cramponné à son épaule.
Laurence nous confie qu’elle a quitté Toliara, une ville du sud-ouest, pour venir s’installer ici il y a deux ans. Elle est à la tête de plusieurs petites mines à Tananarive qui emploient 20 hommes, bien loin de la centaine de mineurs qui travaillaient pour elle en 2016, à l’apogée de la ruée vers le saphir.
« Il y avait énormément de pierres ici avant », déclare-t-elle. « Plus maintenant. » Elle explique cependant avoir l’intention de rester encore un peu à Tananarive. « J’attends. J’attends Allah. Il m’apporte parfois une grosse pierre et je l’emmène dans mon village. » À ce jour, sa plus grande découverte a été un saphir qui lui a rapporté 3 100 €, une fortune dans un pays où le revenu moyen par habitant dépassait à peine un dollar (0,89 €) par jour en 2016. Les bénéfices de la vente sont divisés à parts égales entre les quatre ou cinq membres de l’équipe qui ont découvert la pierre.
Laurence Asma explique qu’un partenaire financier sri lankais basé à Antananarivo lui envoie de l’argent via le réseau Orange Money afin d’acheter du riz pour ses employés et du carburant pour ses trois pompes. Elle se rend régulièrement dans la capitale malgache pour lui vendre les pierres que son équipe a trouvées. Les Sri Lankais « vendent aux Thaïlandais et aux Dubaïotes », explique-t-elle avant d’ajouter en riant que quelqu’un en tire un bon prix, mais que ce n’est pas elle.
Cela fait 1 500 ans que le Sri Lanka extrait des saphirs. Les Sri Lankais, qui ont acquis une expertise sans pareil pour la notation, la taille, le polissage et la commercialisation des gemmes, dominent le commerce à Madagascar. Mohammed Murshid, 29 ans, est négociant à Ambatondrazaka, ville d’importance la plus proche du CAZ et principal centre du commerce des saphirs extraits dans la région. Il nous indique qu’un saphir bleu de grande qualité de 25 carats provenant de Tananarive lui coûte 300 000 ariarys malgaches, soit environ 75 €.
Il y a quelques mois, j’ai vu sur Internet un saphir de cinq carats, taillé, poli et non chauffé vendu par un joaillier basé en Floride pour 17 500 €. En raison de la manière dont le marché international des pierres précieuses fonctionne, presque aucun des milliers d’euros par carat du prix de vente d’un saphir ne revient aux mineurs de Tananarive. Quant aux dirigeants de mines locales comme Laurence Asma, ils n’obtiennent pas grand-chose.
Bien que ses gains soient maigres, Laurence Asma se dit chanceuse d’être à la tête d’une mine relativement fructueuse. « Trop de gens ne gagnent pas suffisamment pour pouvoir manger trois fois par jour », explique-t-elle. « Qui dit pas de pierre, dit pas de travail. » Elle accuse le gouvernement de ne pas s’être soucié des besoins des Malgaches. « Nous avons un mauvais président », déclare-t-elle, faisant référence à Henry Rajaonarimampianina, au pouvoir à l’époque – il a depuis perdu les élections en novembre dernier.
UN MANQUE DE MOYENS ET D'ACTIONS
En raison de la gravité des menaces qui pèsent sur la faune et la flore des aires protégées de Madagascar et le manque de moyens du gouvernement pour faire respecter la loi, des groupes locaux ont décidé d’intervenir. Les membres élus d’organisations forestières communautaires volontaires, appelées VOI, gèrent désormais les aires protégées sous l’égide de Conservation International ainsi que d’autres organisations environnementales à but non lucratif.
Après avoir dit au revoir à Laurence, nous retournons au village où nous avions garé notre voiture et nous mettons en route pour Moramanga, à 110 kilomètres au sud-ouest. Nous voulons nous entretenir avec Jean Yves Ratovoson, vice-président d’une VOI accusé d’avoir abattu dix lémuriens, neuf indris et un propithèque à diadème, des espèces en danger critique, dans le CAZ. L’homme, âgé de 51 ans, a été arrêté début 2018 par la police dans un camp de chasse près d’Andasibe et est depuis détenu dans la prison de Moramanga en attendant son procès. Il risque quatre ans d’emprisonnement s’il est inculpé.
Jean Yves et moi discutons dans le bureau du directeur de la prison. Il me confie que c’est la première fois qu’il est arrêté. Lui, agriculteur, et sa femme, professeure des écoles, ont neuf enfants.
Il dit être allé chasser parce qu’il était en colère. Il m’explique s’être présenté à l’élection de vice-président de la VOI de Firaisankina « pour aider sa communauté. » Alors qu’il patrouillait la zone du CAZ placée sous le contrôle de la VOI, Jean Yves a découvert qu’un abattage illégal d’arbres à grande échelle s’y produisait et que, malgré ses efforts, personne n’agissait. « Cinq camions par jour sortaient de là chargés de bois », explique-t-il. « La quasi-totalité de la zone a été déboisée. »
Il explique en avoir averti le directeur de Conservation International dans le CAZ, Hantanirina Ravololonanahary. « Ils sont venus dans la forêt pour le constater, mais ils n’ont rien fait », déplore Jean Yves. « Pourquoi ceux qui abattent des arbres ne sont pas envoyés en prison comme moi ? La loi est la même. »
Alors, quand une connaissance l’approche pour lui proposer de participer à une chasse aux lémuriens dans le CAZ, il accepte. « Je me suis dit que s’ils pouvaient [couper des arbres], alors je n’aurais pas de problème. Je savais qu’il ne fallait pas chasser les lémuriens, mais cette situation m’avait mis en colère. »
Dans une lettre adressée à Joanita Ndahimananjara, ministre malgache de l’Environnement à l’époque, Hantanirina Ravololonanahary décrit les mesures prises par l’organisation à la suite de l’arrestation de Jean Yves, mais ne fait aucune mention de l’abattage illégal d’arbres qui lui a été signalé par l’agriculteur avant la prétendue chasse aux lémuriens.
Hantanirina Ravololonanahary n’étant pas disponible pour un entretien, Conservation International m’a alors référé à Tokihenintsoa Andrianjohaninarivo, chercheuse en biodiversité régionale de l’organisation à Toamasina, une ville située sur la côte est. Je l’ai contactée et lui ai demandé quelle était la marche à suivre lorsque des responsables d’une VOI signalaient à Conservation International l'abattage illégal d’arbres.
« Nous en rendons compte auprès des autorités locales et organisons une patrouille afin de vérifier les faits », me répond-elle. Je lui fais alors part de l’allégation de Jean Yves Ratovoson, qui affirme que le directeur de Conservation International dans le CAZ était au courant de cet abattage mais n'avait pas agi.
Long silence au bout de la ligne.
« Conservation International gère l’aire protégée, mais n’a pas le pouvoir de procéder à des arrestations », reprend la chercheuse. « Tout ce que nous sommes en droit de faire est d’avertir le Service des forêts. Ce sont eux qui peuvent ensuite réagir. Nous avons signalé aux autorités chaque infraction, mais la plupart du temps, ils ne peuvent intervenir, soit parce qu’ils n’ont pas le budget suffisant, soit parce que leurs équipes sont ailleurs. Si nous ne bénéficions pas du soutien des autorités, nous ne pouvons rien faire. »
Face à mon insistance, la porte-parole Jenny Parker McCloskey reconnaît que Conservation International a reçu un signalement d’abattage d’arbres des membres de la VOI dont fait partie Jean Yves Ratovoson, mais que ce dernier ne figurait pas parmi les personnes à l’origine du signalement. Elle explique qu’Hantanirina Ravololonanahary a confié le dossier à des représentants du Service des forêts. De multiples requêtes leur ont été adressées afin de vérifier qu’ils avaient bien reçu le rapport de Conservation International, mais ils n’y ont jamais répondu.
L’explication de Tokihenintsoa Andrianjohaninarivo semble plausible. Les policiers qui ont arrêté Jean Yves Ratovoson avaient espéré attraper ses complices, qui s'étaient échappés lors de la descente, mais le chef de la police, Yvan Randriamiarana, me confie qu’ils n’avaient pas les ressources nécessaires. Il raconte que les suspects vivaient dans un village situé au bout d’un chemin de terre et que les policiers n’avaient aucun moyen de s’y rendre. « Nous n’avons ni voiture ni moto. À Andasibe, il y a dix gendarmes, mais nous devrions en avoir au moins quinze, car la zone est vaste et la densité de population élevée. »
Selon Steig Johnson, professeur d’anthropologie à l’université de Calgary et vice-coprésident du groupe de spécialistes des primates de Madagascar de l’UICN, le fait qu'un dirigeant d’une VOI soit accusé d’avoir tué des lémuriens est « particulièrement démoralisant. Il y a un manque fondamental de formation et d’engagement avec certaines de ces communautés. La condamnation d'un individu pour un crime ne profite à personne. Nous devons traiter à la racine ce genre d'infractions contre la faune et la flore dans ces communautés. »
Comment protéger le CAZ si ses protecteurs chassent eux-mêmes les lémuriens ? Cette question, je la pose à un volontaire de la VOI, Abraham Rajotonirina. C’est lui qui a découvert le camp de chasse de Ratovoson lors d’une patrouille qu’il menait afin de repérer tout signe d’activités illégales. Il en a informé un des vice-présidents de la VOI, Toto Jean Etienne, ce qui a conduit à l’arrestation de Jean Yves Ratovoson.
« Peut-être que nous devrions être payés pour protéger la forêt », répond-il. « Nous travaillons gratuitement, mais nous le faisons parce que nous aimons la forêt. Nous avons besoin d’une route en meilleur état pour que les touristes puissent venir et tomber amoureux de la forêt eux aussi. » D’après lui, si la communauté recevait de l’argent, elle pourrait alors rémunérer « des guetteurs. » En Tanzanie, un programme similaire baptisé TACARE porte ses fruits, soutenant les communautés locales tout en sauvegardant l’habitat essentiel à la survie des chimpanzés.
VERS UNE INDUSTRIE PLUS DURABLE ?
De retour aux États-Unis, je rencontre Vincent Pardieu, un gemmologue qui a attiré l’attention de l’industrie sur la ruée vers le saphir à Tananarive en 2016, lors d’une présentation à l’Institut américain de gemmologie à Carlsbad, en Californie – une institution qui identifie et évalue les pierres et forme les gemmologues. Depuis 2012, Vincent Pardieu envoie le message suivant à l’industrie des pierres précieuses : l’extraction minière illégale à Madagascar ne nuit pas à l’habitat des lémuriens.
Selon lui, les rapports qui insistent sur les terribles conséquences des mines de saphirs sont des « fake news. »
« Tous les matins, j’entendais les lémuriens ; c’est bien la preuve qu’ils sont encore vivants », déclare-t-il en faisant référence à son séjour à Tananarive en 2017. « Si les mineurs attaquaient les lémuriens, je ne pense pas que nous pourrions les entendre. » Malgré les rapports qui attestent d’une déforestation autour de la mine, Vincent Pardieu persiste : « Les mineurs ne détruisent pas la forêt. Ils sont trop occupés à travailler, pourquoi iraient-ils couper des arbres ? Il s’agit d’un autre très bon exemple de fake news. »
Or, le déboisement constitue une première étape essentielle à l’établissement d’une mine de pierres précieuses. À Tananarive, chaque groupe de mineurs cuisine sur un feu de bois au moins une fois par jour et le bois de la forêt est utilisé pour de nombreuses choses, de la construction des cahutes des mineurs aux outils qu’ils emploient pour passer la terre au tamis. Le gemmologue affirme toutefois que la zone autour de Tananarive avait été déboisée avant l’arrivée des mineurs pour l’agriculture.
Richard Barad, de l’Institut des ressources mondiales, a analysé pour National Geographic les données de Global Forest Watch. Celles-ci révèlent une forte augmentation de la déforestation dans la région qui englobe Tananarive à partir de 2013, soit un an après la découverte de saphirs dans le CAZ, qui se trouve à environ une vingtaine de kilomètres au sud de Tananarive.
De 2003 à 2013, la forêt a reculé en moyenne de 525 hectares par an. Rien que pour l’année 2013, près de 1 750 hectares de forêt ont été abattus. Depuis, le rythme annuel de déforestation n’est jamais passé sous la barre des 1 500 hectares et a même dépassé les 2 000 hectares en 2017, suite à la découverte de saphirs à Tananarive. La région étant peu peuplée, il semble exagéré de dire que l’agriculture est responsable de la soudaine accélération de la déforestation.
Vincent Pardieu souligne également que l’extraction de pierres précieuses fait vivre, difficilement, les habitants des régions rurales où le chômage est élevé.
« Qu’est-ce qui est préférable pour les autorités locales : avoir plusieurs milliers de mendiants ou tous ces gens qui gagnent de l’argent dans la forêt ? », demande-t-il, avant d’ajouter que l’application des mesures de protection des aires comme le CAZ n’est pas faisable en raison de la corruption et du manque de moyens. (Madagascar figure dans le dernier quintile du classement mondial relatif à la corruption de Transparency International.) Selon lui, il est fort probable que la police « gagne de l’argent et que les locaux meurent de faim. »
Andrianarisoa Herilalatiana, responsable des communications pour la police nationale de Madagascar, souligne que la police a créé un département anti-corruption fin 2017 et que, depuis, seuls deux officiers impliqués dans la subtilisation et la falsification de documents ont été arrêtés.
En 2012, Vincent Pardieu a co-écrit un article de blog paru sur NationalGeographic.org dans lequel il proposait qu’un pourcentage des bénéfices de la vente des pierres précieuses soit reversé pour la sauvegarde de la faune et de la flore. L’Institut américain de gemmologie est souvent capable d’identifier l’origine d’une pierre précieuse en la comparant avec des documents de référence existants, un service qui peut accroître la valeur d’une pierre. Si la provenance d’une gemme était connue, les bénéfices de sa vente pourraient servir à la restauration du site de la mine.
En 2017, le laboratoire de recherche suisse, GRS GemResearch Swisslab AG, a publié un rapport dans lequel il déclarait pouvoir identifier les saphirs roses de Tananarive grâce à une analyse spectrale. Une telle technologie pourrait donner vie à l’idée de Vincent Pardieu, à savoir allouer une partie de l’argent que les gens aisés dépensent en achetant des bijoux pour aider à la sauvegarde de l’habitat des lémuriens.
Mais selon Tom Moses, vice-président exécutif de la recherche à l’Institut américain de gemmologie, si les saphirs roses de Tananarive « sont suffisamment reconnaissables », il sera plus difficile de déterminer la provenance des saphirs bleus, leurs différences chimiques étant moins flagrantes. Trouver l’origine d’une gemme « n’est vraiment pas une science exacte », a-t-il souligné.
La durabilité commence à susciter un intérêt grandissant, bien que lent, dans les industries de la joaillerie et des pierres précieuses. La Fondation Tiffany & Co., branche philanthropique de la célèbre maison de joaillerie new-yorkaise, apporte son soutien financier à une organisation basée à l’université du Delaware appelée Gemstones and Sustainable Development Knowledge Hub (Centre de connaissances des gemmes et du développement durable en français). Quant au Responsible Mining Index de la Responsible Mining Foundation, basée en Suisse, il commence à inclure des pierres précieuses de couleur dans ses évaluations portant sur la responsabilité environnementale.
Doug Hecker, président de l’Association commerciale américaine de pierres précieuses, une organisation de l’industrie, déclare que ses membres sont tenus de « faire tout ce qui est en leur pouvoir pour s’assurer qu’ils ne causent pas de dommages, qu’ils ne contribuent pas à la dégradation de l’environnement et qu'ils respectent les lois et réglementations en vigueur dans les pays où ils font des affaires. »
Alors que les clients prennent conscience de l’impact environnemental de l’extraction de pierres précieuses, les marchands pourraient avoir des difficultés à vendre des pierres provenant de Madagascar. En effet, celles-ci ne disposent pas de certifications de la chaîne de contrôle, car le pays n’exige pas qu’il soit prouvé qu’une pierre précieuse vendue dans le pays ou exportée soit issue d’une mine légale.
« À Madagascar, la population souffre beaucoup et l’extraction minière représente une part très importante de ses moyens de subsistance », confie Michelle Rahm, qui ne vend que des pierres précieuses synthétiques et dirige une petite organisation à but non lucratif basée dans le Colorado qui vient en aide aux enfants de Madagascar. « Si le public veut boycotter les pierres provenant de l’île, la population risque d'en pâtir. »
Les saphirs synthétiques, bien que chimiquement et visuellement identiques aux pierres naturelles, sont bien moins onéreux et ont un impact minimal sur l’environnement. D’après Michelle Rahm, « ceux qui achètent des pierres synthétiques ne sont pas sur le marché » des pierres naturelles pour de multiples raisons et « achèteront uniquement des pierres synthétiques. » Par conséquent, acheter des saphirs de synthèse ne nuit pas aux mineurs de Madagascar de la même façon que le boycott des pierres précieuses naturelles.
Elle ajoute qu’une mesure utile serait de former les locaux à tailler et polir les gemmes pour qu’une partie plus importante de la richesse produite par les saphirs reste dans le pays. À l’image de Vincent Pardieu, Michelle Rahm souhaiterait également que l’industrie soutienne les efforts visant à limiter les dommages environnementaux.
UN REBOISEMENT BÉNÉFIQUE AUX LÉMURIENS ET AUX COMMUNAUTÉS
La station Kianjavato Ahmanson se trouve à 240 kilomètres au-delà de la frontière sud du CAZ et à une heure de route en direction de l’est du parc national Ranomafana. Il s’agit d’un avant-poste de la Madagascar Biodiversity Partnership, une organisation à but non lucratif fondée en 2010 par Edward Louis, généticien en conservation et vétérinaire au Zoo Henry Doorly à Omaha, dans le Nebraska. Ce dernier souhaitait mettre en place des projets communautaires scientifiques à Madagascar visant à venir en aide à la fois aux Malgaches ainsi qu'à la faune et à la flore, par le biais notamment de la reforestation.
Alors que la population du pays ne cesse d’augmenter – passant de 15,3 millions en 2000 à 25,6 millions de personnes en 2017 – et la superficie des forêts de décroître, le reboisement est essentiel pour prévenir de nouvelles diminutions des populations de lémuriens et d’autres animaux et plantes qui font de Madagascar l'arche de Noé de la biodiversité.
Plus d’une centaine de personnes travaillent dans les 19 pépinières du projet, où sont cultivés les arbres qui seront plantés dans les zones déboisées du pays. L'un des objectifs est d’aider les agriculteurs à obtenir le titre de propriété de leurs terres ; en échange, ces derniers acceptent qu’une partie de leurs champs soit plantée d’arbres dont dépendent les lémuriens. Depuis 2010, près de deux millions d’arbres ont ainsi été plantés et leur taux de survie approche les 80 %.
Adriane, Safidy et moi visitons la station Kianjavata lors d’une des deux journées hebdomadaires dédiées à la plantation des arbres. Nous regardons les femmes placer les jeunes plants dans des sacs contenant de la terre et de l’eau. Elles gagnent des crédits en fonction du nombre d’arbres qu’elles mettent en terre, qu’elles utilisent pour acheter des lampes solaires, des filtres à eau, des machines à coudre ou encore des poêles à granules respectueux de l’environnement qui n’utilisent pas de bois provenant de la forêt. Ces poêles réduisent aussi les émissions de fumée mauvaises pour la santé.
« Si vous n’êtes pas malade, vous pouvez travailler », explique Edward Louis. « Tout est lié. »
À quelques encablures de là, des hommes remplissent chaque panier tressé de cinquante jeunes plants de caféiers, d’acacias et de cacaoyers, qu’ils descendent au pied de la colline avant de les charger dans un camion. Les hommes sont payés en crédits ou en liquide, environ 1,30 € par jour, soit presque 50 % de plus que le revenu moyen malgache.
Le trajet jusqu’au village d’Ambolotara est rapide. Une fois là-bas, les hommes portent les paniers sur les 2,5 kilomètres du sentier menant au site de plantation, situé sur le flanc d’un ravin. Cette terre appartient à un agriculteur qui participe au projet. Les partenaires acceptent de réserver la moitié de leurs terres à une forêt permanente, tandis que les 35 et 15 % restants servent respectivement à l’exploitation forestière ainsi qu'aux cultures vivrières et commerciales.
Le ravin est parsemé d’arbres mesurant jusqu’à 20 mètres de haut. Tous ont été plantés en 2013 et 2014.
« Vous pouvez voir de nombreuses nouvelles pousses spontanées », indique Fredo Tera, intermédiaire communautaire du projet de reboisement et gestionnaire du site de la station. Cela est la preuve que les jeunes plants deviennent une forêt saine, nous explique-t-il. « Les lémuriens nous aident à planter les arbres puisqu'ils le font eux-mêmes dans la forêt. » En d’autres termes, ils dispersent les graines grâce à leurs déjections.
Dans une zone de plantation toute proche, située en périphérie de Kianjavato, le reboisement s'est déjà traduit par une hausse de la population locale de grands hapalémurs : de 30 spécimens en 2009, leur nombre est passé à une centaine en 2017. L’année dernière, 24 petits ont vu le jour.
« Nous sommes à l'image d'un bébé qui grandit chaque année », confie Fredo Tera. Lors du lancement du projet, 30 000 plants ont été mis en terre ; cette année, ils seront 600 000.
Sur le chemin du retour au camion, Fredo balaie du regard la partie nue du ravin entre la parcelle plantée aujourd’hui et celles reboisées en 2013 et 2014. Avec encore un peu de travail, l’endroit pourrait un jour ressembler à nouveau à la forêt naturelle qui le recouvrait par le passé. « Notre rêve, c'est de recréer une forêt ici-même », confie-t-il.
Paul Tullis a réalisé des reportages sur les questions environnementales mondiales pour le New York Times Magazine, Scientific American et Bloomberg Businessweek notamment. Son travail a été récompensé, entre autres, par la Société des journalistes environnementaux, la Société des journalistes professionnels et l’Association des journalistes gastronomiques. Vous pouvez le retrouver sur Twitter. Depuis 2010, Adriane Ohanesian travaille comme photojournaliste en Afrique, couvrant des sujets tels que les conflits et les crises humanitaires au Soudan et au Soudan du Sud, le mariage d’enfants en République Centrafricaine, la guerre en Somalie, ainsi que le braconnage et la sauvegarde des espèces au Kenya. Retrouvez-la sur Twitter et sur Instagram.
Wildlife Watch est un projet d'articles d'investigation commun à la National Geographic Society et à National Geographic Partners. Ce projet s'intéresse à l'exploitation et à la criminalité liées aux espèces sauvages. N'hésitez pas à nous envoyer vos conseils et vos idées d'articles et à faire part de vos impressions sur ngwildlife@natgeo.com.
Cet article est initialement paru sur le site nationalgeographic.com en langue anglaise.